Morceaux choisis - Rafael Alberti

Par Claude_amstutz

Laisse ton rêve.
Enroule-toi,
blanche et nue, dans ton drap.
On t'attend là
derrière les murs du jardin.
 
Tes parents meurent, endormis.
Laisse ton rêve.
Vite, allons, vite.
Les murs franchis,
on t'attend avec un couteau.
 
Repars chez toi, presse le pas.
Laisse ton rêve.
Vite, allons, vite.
Dans la chambre de tes parents
entre, nue et blanche, en silence.
 
Cours vite, vite, jusqu'aux murs.
Laisse ton rêve.
Saute.
Viens.
 
Quel rubis flambe dans tes mains
et brûle d'un feu noir ton drap?
Laisse ton rêve.
Vite, allons, vite.
... Ferme les yeux et dors.
 

Rafael Alverti, Matin à terre, suivi de L'Amante / L'Aube de la giroflée (coll. Poésie/Gallimard, 2012)

traduit de l'espagnol par Claude Couffon

image:  Manuel Alvarez Bravo, The Daydream (artnet.com)