Le châtiment extrajudiciaire

Publié le 07 août 2012 par Veritejustice @verite_justice

 LES REPRÉSENTANTS DE L’ÉTAT DOIVENT AUSSI RESPECTER LA LOI!

Policier, avocat, gardien de prison ont le devoir de ne pas outrepasser leurs droits et ils se doivent de respecter les citoyens lors de leurs interventions .

La cause en bref

Des accusations ont été portées contre B, un détenu, pour voies de fait causant des lésions corporelles, voies de fait contre un agent de la paix et acte d’intimidation contre une personne associée au système judiciaire, A, un agent de détention, par suite d’une altercation au cours de laquelle les deux hommes ont été blessés.  Le juge du procès a acquitté B des deux accusations de voies de fait et ordonné l’arrêt des procédures quant à celle d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire parce qu’il y avait eu atteinte aux droits garantis à B par l’art. 7 de la Charte.  La Cour d’appel du Québec a annulé l’arrêt des procédures et renvoyé l’affaire au tribunal de première instance pour la continuation du procès de B.

Les événements 

[12]  Le 15 mai 2007, au volant d’un fourgon cellulaire, M. Asselin a assuré le transport de détenus, dont M. Bellusci

[13]  Le ministère public a prétendu que M. Bellusci avait alors agressé M. Asselin sans avoir été provoqué par celui-ci, et qu’il avait menacé de violer l’épouse et les enfants de l’agent de détention.  M. Bellusci a reconnu avoir proféré les menaces, mais il a soutenu que M. Asselin l’avait en fait agressé.

[14]   À l’issue du procès, un doute raisonnable a subsisté dans l’esprit du juge quant à savoir si M. Bellusci avait agressé M. Asselin, mais il s’est dit convaincu que M. Bellusci avait menacé d’agresser sexuellement l’épouse et les enfants de M. Asselin.  Il a donc acquitté M. Bellusci des accusations de voies de fait, mais il l’a jugé coupable d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire.

[15]  Toutefois, le juge du procès a acquis la conviction, suivant la prépondérance des probabilités, que les incidents survenus dans le fourgon cellulaire s’étaient déroulés de la manière suivante : a) M. Bellusci s’est livré « à des attaques verbales, abusives, insultantes et grossières » (par. 26) à l’endroit de M. Asselin, b) ce dernier a compromis la sécurité de M. Bellusci en dévoilant aux autres détenus à bord du fourgon cellulaire que M. Bellusci était un violeur, c) en réaction à ce dévoilement, M. Bellusci a menacé de violer l’épouse et les enfants de M. Asselin, d) celui‑ci a été blessé alors qu’il a entrepris d’ouvrir la cellule du fourgon et que M. Bellusci a violemment repoussé la porte sur lui et e) M. Asselin a ensuite agressé et blessé M. Bellusci, qui était alors enchaîné, menotté et entravé aux pieds dans une cellule du fourgon

L’analyse du comportement du gardien de prison selon un juge

[22]  Le juge du procès estime que les citoyens seraient outrés par le châtiment extrajudiciaire infligé illégalement dans la présente affaire.  M. Bellusci a été agressé par un représentant de l’État alors qu’il était enchaîné, menotté, entravé aux pieds et enfermé dans une cellule d’un fourgon sécurisé.  Le juge conclut que l’agent de détention a vraisemblablement décidé de se venger et de faire « payer physiquement » à M. Bellusci son comportement outrancier (par. 21).  Les blessures infligées à ce dernier sont loin d’être mineures.  On a relevé des « traces d’empreintes de grillage avec pétéchies sur le derrière de l’épaule gauche au niveau de l’omoplate, [des] blessures entraînant des déformations de l’avant‑bras gauche [et des] bosses et blessures à la tête et au cou » (par. 34).  En raison de sa blessure à la tête, M. Bellusci est demeuré sous observation toute une nuit à l’infirmerie de la prison.

[23]   Le juge du procès se dit convaincu que les menaces de l’appelant, aussi répréhensibles qu’elles aient été, n’auraient vraisemblablement pas été proférées si M. Asselin n’avait pas inopportunément dévoilé aux autres détenus à bord du fourgon que l’appelant était un délinquant sexuel.  Il est certes conscient de la difficulté inhérente au travail de gardien de prison, mais celle-ci ne pouvait justifier M. Asselin de faire un dévoilement qui compromettait la sécurité de M. Bellusci pendant son incarcération.

La décision de la Cour Suprême du Canada

Le pourvoi est accueilli et l’arrêt des procédures ordonné par le juge du procès est rétabli.

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