Cathy Horyn a encore frappé… et Oscar de la Renta en prend pour son grade.

Publié le 14 septembre 2012 par Maybachcarter

Dans cet article datant de l’année dernière que je consacrais à Virginie Mouzat, je vous avais déjà parlé de Cathy Horyn. Elle fait partie de mon trio de “Superwoman” du journalisme Mode, notamment parce qu’elles sont franches, intraitables et restent parmi les RARES à ne pas aller dans le sens du vent quand le reste du milieu Fashion le fait. En gros, elles sont plutôt grande gueule, chacune à leur manière, et les multiples pressions qu’elles peuvent subir (de la part des marques ou de leur propre direction éditoriale) ne les effraient pas.

Cathy Horyn.

Suzy Menkes (International Herald Tribune) a une approche très technique et contextuelle quand elle critique une collection.  Virginie Mouzat (Le Figaro) a une vision culturelle (ou “intello” pour faire court). Cathy Horyn, elle, tranche dans le vif. C’est ce qui a fait sa réputation. C’est rarement gratuit, mais elle sait dire ce qui coince sans prendre des pincettes… et cela lui a souvent valu d’être bannie des défilés de certaines marques, qui ne souhaitaient plus l’inviter à cause de ses articles jugés trop acerbes. Le Daily Beast a déclaré qu’elle était la critique Mode la plus crainte, et même si ça peut semler un brin exagéré, ils ne sont pas loins de la vérité. Après tout, c’est bien elle qui a osé parler ouvertement de l’inutilité de la VOGUE FASHION NIGHT OUT (attaque directe à l’égard d’Anna Wintour). C’est elle qui a dit qu’Alexander Wang n’était “pas vraiment un designer“, et que son succès était dû “à des vêtements fabriqués en Chine et donc vendus à des prix raisonnables”. Et enfin, c’est aussi elle qui a déclaré, à l’époque, que Decarnin (ex-Directeur Artistique de BALMAIN) devrait faire “autre chose que d’appuyer sur le bouton RAPPEL” (allusion aux collections Balmain qui s’enchaînaient et se ressemblaient toutes).

Avec le temps, on se dit qu’elle aurait voulu peut-être rentrer dans le rang… peine perdue.

A chaque fashion week, ses polémiques. Elle a d’abord émis des critiques très sévères à l’encontre des “blogueurs mode qui se prennent pour des journalistes”. Elle n’a pas été la seule à faire de telles remarques bien sûr, mais les siennes ont eu pour mérite de ne pas tourner autour du pot. Bis repetita cette fois, à l’encontre d’Oscar de la Renta.

Oscar de la Renta

Nul besoin de présenter Mr de la Renta. Il s’agit d’une de ces figures incontournables de la mode américaine. Formé par Mr Balenciaga Himself, il a habillé tout ce que l’establishment compte de femmes célèbres (Julia Roberts, Jackie Kennedy..et plus récemment, Ann Romney, épouse du rival d’Obama dans la course à la Maison Blanche). On parle donc de quelqu’un qui a pignon sur rue, et un designer spécialiste des “robes-uniquement-conçues-pour-les-tapis-rouges”. Ce papy de 80 ans, originaire de la République Dominicaine, est une institution et son cercle d’amis se résume entre autres à Sarah Jessica Parker et Diane Von Furstenberg. Autant le dire, on ne critique pas Papy Oscar comme ça.

J’ai dit plus haut qu’Oscar de la Renta était une institution de la mode américaine….. Hé bien, Cathy Horyn n’est pas du tout d’accord, et c’est bien ça qui mettra le feu aux poudres. Quelques heures après avoir assisté à son défilé, Mme Horyn publie sur le site du New York Times, sa critique à l’endroit de la collection Printemps/Eté 2013 de la marque. Et une petite phrase d’introduction suffit à donner le ton: ” Monsieur de la Renta est plus un hot dog qu’une éminence grise de la mode américaine “. Cette phrase est une pique indirecte (je pense) à Nicole Phelps qui écrivait 24h plus tôt sur Style.comOscar de la Renta is New York fashion’s éminence grise.” (avec la petite pub De la Renta à côté, pour ne pas gâcher le plaisir).

Cathy Horyn poursuit sa petite revue en disant (en substance) que la collection est acariâtre et manque de réalisme par rapport à son époque.

Petite précision importante: comparer Oscar de la Renta à un Hot Dog ici n’est pas à prendre au sens premier. En anglais “Hot Dog” signifie également être un “cheveu sur la soupe”, ou plus globalement être hors sujet/hors propos. Mais bien évidemment, vous imaginez bien qu’à la publication de cette petite phrase assassine, peu de gens sont allés chercher les différents degrés de lecture de cette expression.. Ni une, ni deux, Papy Oscar ne se démonte pas et décide, à son tour, de publier une lettre ouverte adressée à Mme Horyn:

Vous avez bien lu. Il répond à la journaliste du New York Times en la traitant de “hamburger qui passé 3 jours“. Je peux comprendre qu’il ait été vexé qu’on ose le destituer d’une place à laquelle il a droit après près de 50 ans dans l’industrie du luxe… mais je n’ai pas trouvé la critique de Cathy Horyn SI insultante que cela, ou relevant de l’attaque personnelle comme il le stipule. En même temps, avant même de voir la critique d’Horyn, je trouvais la dite collection pour le moins ratée.

Tout ceci nous ramène à cet éternel débat qui est de savoir jusqu’où un journaliste peut aller dans la critique. Et la question ne se pose bien évidemment pas que dans la mode. Après la couverture très limite “Casse-toi Riche Con !” du quotidien Libération au sujet de la supposée évasion fiscale que prépare Bernard Arnault (homme le plus riche d’Europe et propriétaire du 1er groupe de marques de luxe au monde), on a appris que LVMH (société de Mr Arnault) a décidé de retirer l’intégralité de ses publicités du journal. On parle d’une perte estimée environ à 500.000€, en plus de la plainte déposée par Bernard Arnault.

Finalement, la presse et les marques, c’est un peu “Je te tiens, tu me tiens par la barbichette”..