[Critique] TOURISTES

Par Onrembobine @OnRembobinefr

L’Étrange Festival 2012

Titre original : Sightseers

Note:
Origine : Angleterre
Réalisateur : Ben Wheatley
Distribution : Alice Lowe, Steve Oram…
Genre : Comédie
Date de sortie : 26 décembre 2012

Le Pitch :
Une trentenaire anglaise part pour la première fois en vacances avec son boy friend, qu’elle connait depuis trois mois. Choisissant le camping-car comme moyen de locomotion, les deux tourtereaux ne mettront pas bien longtemps pour voir leurs vacances prendre une tournure assez particulière…

La Critique :
« Voila ce qu’est une comédie pour moi. Bon, évidement il y a pas mal de meurtres sanglants… mais bon, on rigole quand même ! ».
Avec dans sa besace deux films quasiment imparables, le futur enfant terrible de la perfide Albion Ben Wheatley revient donc avec Touristes. Relative comédie plutôt sanglante d’une saveur douce-amère et au gout beaucoup moins rance que Kill List, Touristes, selon les mots du réalisateur, devait « Contrebalancer avec la gravité et la brutalité de son prédécesseur et revenir à quelque chose de plus léger » . Effectivement, c’est plus léger…. Mais en même temps, après Kill List, ce n’était pas très difficile !
Touristes revient donc vers les premiers amours de Wheatley, prouvant que si il est définitivement un réalisateur sachant provoquer l’effroi, il ne manque pas non plus d’humour.

Muni d’une bonne idée de départ, le film est servi par deux acteurs très concernés (superbe Alice Lowe et Steve Oram, plus barbu que jamais) et devient le théâtre de scènes d’improvisation bien senties, qui donnent du nerf et du mordant à cette comédie irrévérencieuse finalement pas si marrante que ça.
Bien mis en scène et servi par une musique au poil, le film propose une ambiance grisâtre et pluvieuse, donnant un aspect très réaliste au quotidien des protagonistes se retrouvant paradoxalement dans des situations assez inhabituelles et pour le moins délicates.
Si le film prend le postulat, une fois encore, de parler d’une famille pour le moins dysfonctionnelle ( « En existe-il d’autres sortes ? » questionnera Wheatley lors de l’avant-première), il met en scène des situations qu’il est fort possible que vous ayez déjà vécu dans votre vie, mais auxquelles (du moins je pense…) vous n’avez pas réagi de la même façon que les sinistres héros.
Un couple de timbrés, une mère foldingue et des chiens quasi-télépathes… tout cela dans une Angleterre mouillée par une pluie fine et pénétrante qui offre des attractions aussi passionnantes que Le musée des Tramways ou un camping où de joyeux yourtes célèbrent à grand coups de tam-tam la fin du solstice d’été. En ce mois de septembre, ce goût de vacances à la « british », ça fait rêver.

Il y a bien sur de nombreuses scènes savoureuses,mais, encore sous le choc de Kill List, je ne peux m’empêcher d’être un peu déçu. Ici tout est plus léger, le propos est certes dérangeant, mais loin de l’intrigue sinistre aux allures de sacrifices païens du film précédent.
Alors oui, la photographie est de grande qualité, certaines scènes bien ficelées, mais au final, je n’ai pas été aussi torpillé que lorsque Kill List m’a envoyé son missile. De plus, en progressant dans les minutes, Touristes n’arrive plus à éviter certaines redondances et une certaine lassitude qui ne prend véritablement fin que lors du dénouement final.

Wheatley prend donc son public à contrepied et signe un film « différent », marquant ainsi sa farouche détermination à ne pas être étiqueté dans un certain style même si, au fur et à mesure de ses œuvres, se dessine une certaine patte au niveau de la mise en scène.
Ceux qui n’ont pas aimé Kill List adoreront peut-être celui-là et il certain que le bougre touchera de nouvelles personnes avec ce film particulier et toujours sans concessions.
Car au final, et sous couvert de comédie, le réalisateur tape une fois de plus comme un bœuf dans les tranchées de ceux qui croyaient qu’il allait suivre une certaine ligne après Kill List. Le barbu ne va définitivement pas cesser de nous surprendre et de nous caresser dans le sens du poil… Pour mieux nous l’arracher ensuite !
Je terminerai en citant une réponse du réalisateur à la question d’un fan français, après la projection de Touristes, autour d’une certaine opposition qu’il existe en France entre le cinéma d’auteur et le cinéma de genre.
« En ce qui me concerne il n’y a pas de frontière entre le cinéma de genre et un autre… Prenez Hitchcock : c’est un réalisateur incroyable qui a fait des films de genre non ? »

Bien dit Benny !

@ Pamalach