Muse – the 2nd low

Publié le 01 octobre 2012 par Acrossthedays @AcrossTheDays

« Il n’existe que deux sortes de musique : la bonne et la mauvaise. » (Duke Ellington)

Autant le dire d’emblée, la musique proposée par Muse dans The 2nd Law n’entre dans la première catégorie édictée par Duke Ellington. Fans inconditionnels et journalistes vendus à la solde du capitalisme musicale, arrêtez-vous ici. La suite risque de ne pas vous être des plus agréables.

L’âge d’or

Je le clame haut et fort : « J’ai aimé Muse ». Je me suis plongé dans la musique de Muse en même temps que dans ma pré-adolescence, à l’aube du vingt-et-unième siècle. Je me rappelle le nombre incalculable de soirées durant lesquelles le CD de Origin of Symmetry a tourné dans ma chaîne hi-fi, en même temps que je sombrais dans les bras de Morphée. Je me rappelle avoir joué à longueur de journée, et sur ma première basse, « New Born » et « Hysteria« . Je rentrais du collège au rythme de « Time Is Running Out » et remuais la tête sur « Plug In Baby » devant mes devoirs de physique-chimie. Bref, je bouffais du Muse, de Showbizz à Absolution en passant par l’Origine de la Symétrie. Trois albums qui m’ont suivi.

La signature chez Warner Bros

A la sortie de Black Hole And Revelations, premier album du groupe chez Warner Bros, j’ai compris que Muse prenait une dimension toute autre et taillait ses morceaux pour des scènes plus grandes [des stades, ndlr] qui (vivant au fond de ma campagne en bordure du Pays Basque) me paraissaient inaccessibles. L’album était bon mais, comme les fans de la première heure, j’ai commencé à me détacher du phénomène.

En 2009, l’album The Resistance (renommons-le « The 1st Low« ) a été pour moi tellement bon que j’y ai porté, à peu de chose près, la même attention qu’à la démission du gouvernement letton d’Ivars Godmanis. Quelques écoutes m’ont suffit pour le mettre de côté. La radio m’en a donné à m’en faire gerber. L’âme de Muse avait définitivement été rachetée par une major et je me rattachais désespérément à ses débuts.

2012, The 2nd Law : l’intime fait place au vide

Quand j’ai appris que Muse était en studio, je me suis surpris à espérer un retour à leurs premières sonorités, le groupe ayant déclaré vouloir arrêter les concerts de stades. Bellamy a même annoncé vouloir redonner à leur musique un côté plus intime avec des sons plus terre à terre. C’était en 2010 et je m’en faisais une joie.

Quelques mois avant la sortie de l’album, le discours, la grammaire et la vocabulaire ont subitement changé. Les rumeurs et les déclarations ont commencé à fuser : le groupe a tout d’abord déclaré vouloir être le premier à donner un concert depuis l’espace. Ensuite, la formation s’est épanchée sur ses influences : elle a souligné, sans aucune honte pour un groupe aux solides racines rock, s’être inspiré du jeune californien Skrillex.

Je n’ai, dès lors, plus compris. Où veulent-ils aller ? Que veulent-ils devenir ? Que font-ils ? The 2nd Law, sorti ce lundi, m’a apporté quelques éléments de réponse.

Un album qui « désespère »

J’avais déjà connaissance de « Survival« , hymne controversé des Jeux Olympiques de Londres qui a fait office de fondement quant à la découverte des autres pistes. J’ai découvert, avec effarement, les onze autres ingrédients du met qui, s’il était réellement question ici de cuisine, pourrait être assimilé à un cheesecake dans lequel on aurait mis de l’ail, de l’ananas et du guacamole.

Car avec The 2nd Law, Muse nous livré ici un mélange de musique classique/rock/pop/electro (des titres arrivent à aborder tous les styles en trois ou quatre longues minutes). Le tout pourrait paraître, sur le papier, assez brouillon. Rassurez-vous, il n’en est rien ! Chaque piste est simple et claire : tellement claire que la majorité sont vides. Bellamy nous avait annoncé un album personnel mais il livre une compilation de riffs impersonnels piochés chez Queen, les Red Hot Chili Peppers ou, bien malheureusement, Skrillex. Où est passé la façade intimiste que le chanteur-compositeur-pianiste voulait donner à cet album ? Disparue.

Déboussolant, à des années lumières de leurs débuts, de la longueur d’un documentaire sur la pêche au thon à Gruissan et totalement impersonnel, The 2nd Law déçoit, sinon désespère. Une galette qui offre un sentiment d’impuissance et l’envie de prendre l’avion, de se rendre dans le Devon, chez Matthew Bellamy et de lui balancer : « Dude, you fucked up ». 

Dans la musique, il y a des musiciens qui ne veulent pas rester dans des cases. On l’aura compris, Muse, après avoir atteint les sommets au bout de seulement quatre albums, a essayé de changer sa recette. Malheureusement, un style n’évolue pas en le superposant à d’autres ou en aspirant les dernières nouveautés, comme une Madonna irait chercher le dernier producteur en vogue. Résultat, la puissance qui faisait Muse est passée, stérilisée par une envie de rentrer dans les clous de la radio sous un vernis de prises de risques musicales. Le vernis, néanmoins, n’est pas bon marché.