Pourquoi Merkel devait être sifflée en Grèce

Publié le 11 octobre 2012 par Juan
La visite de la chancelière allemande a été l'occasion de manifestations en Grèce. Ecouter Angela Merkel se féliciter du programme d'austérité grec sur une estrade aux côtés de son homologue conservateur local avait quelque chose de surréaliste en cette quatrième année de la Grande Crise.
« Nos discussions montrent clairement qu'il y a en ce moment des progrès tous les jours »
Angela Merkel, mardi 9 octobre, Athènes.
Des progrès ? Le chômage a cru de 42% en une année pour atteindre un quart de la population active.
Quel progrès !
 
Venait-elle constater l'ampleur d'une asphyxie dont elle est largement responsable avec ses collègues européens ? Elle a été accueillie par des foules en colère, on évoque 25.000 personnes à Athènes. La presse allemande fut choquée par l'accueil. Un éditorialiste dénonça même l' «ingratitude» des Grecs face à l'aide qu'ils avaient reçus. Car des Allemands plus nombreux voudraient qu'on lâche la Grèce et ses problèmes.
Les images désormais habituelles de manifestations plus ou moins violentes ont à nouveau été diffusées par les journaux télévisés européens. Grenades lacrymogènes, policiers casqués contre manifestants masqués, murs mobiles et jets d'eau anti-émeute, tout était là. Les No Comment d'Euronews étaient frappants.
Il y avait aussi des manifestants en colère mais paisibles. Ceux-là étaient plus nombreux, avec quelques représentants de Die Linke. Il y avait aussi, ailleurs, des saluts nazis. Car la conséquence de cette Grande Crise et l'austérité locale ne cesse aussi de renforcer les nazillons grecs.
Ces clichés donnaient l'image d'un pays au bord de la rupture, incapable de reprendre son souffle.
Cette rupture inquiète d'ailleurs le Fond Monétaire International. L'institution dirigée par Christine Lagarde s'est émue des politiques de rigueur en Europe et de l'inefficacité potentiel du Mécanisme Européen de Stabilité. Ce dernier prévoit le prêt direct de la BCE aux Etats qui en feraient la demande, en contrepartie de mesures de rigueur. C'est justement là que le bas blesse. Le FMI craint que peu d'Etats ne recourent au MES ou que, si certains le font, qu'ils n'aggravent leur situation par une dose d'austérité supplémentaire. En d'autres termes, quelle que soit l'option, l'efficacité du MES semble bien virtuelle: il a beau avoir reçu la meilleure note de crédit des agences de notation, ce machin ne sert à rien pour le moment.
Ce n'était pas la seule inquiétude du FMI: la fuite des capitaux privés devient préoccupante en Europe. Entre juin 2011 et juin 2012, quelques « 296 milliards d'euros ont quitté l'Espagne et 235 milliards l'Italie ».
En France, le traité européen a été adopté par une écrasante majorité (477 suffrages contre 70), et même une majorité socialiste et PRG tout court. Ce n'est qu'un instrument. Il paraît qu'il rassure nos banquiers et nos partenaires. Espérons-le puisque sinon le TSCG ne sera que néfaste.
Cette « lucidité » tardive du FMI à l'encontre du MES ne fait que renforcer les craintes.
Comme pour se faire pardonner, ou donner un signal plus positif à la régulation européenne, une dizaine de chefs d'Etat et de gouvernement se sont déclarés d'accord pour instaurer une taxe sur les transactions financières. La Commission européenne a reçu cette semaine onze confirmations écrites à un courrier initié par le couple franco-allemand.
Autre lucidité tardive, la même Commission a concédé quelques regrets mercredi: l'Europe aurait trop misé les services, notamment financiers; aux détriments de l'industrie. Désargentée, elle a proposé d'augmenter de 16% à 20% du PIB de l'Union à 27 d'ici 2020 la part de l'industrie.
Mais avec quels moyens ?