❛Disque❜ L'Ensemble l'Échelle, Roland de Lassus • La Chambre Musicale d’Albert le Magnifique, un premier enregistrement particulièrement réussi.

Publié le 14 octobre 2012 par Appoggiature @App0gg1ature

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Compositeur de la Renaissance tardive (Cinquecento : XVI° siècle), Roland de Lassus (Orlande de Lassus, ou encore Orlando di Lasso pour ses contemporains italiens) naît en 1532 à Mons, dans l'actuelle Belgique. 
Il entre en musique en commençant comme choriste à la manécanterie de la paroisse de Saint-Nicolas-en-Havré, où il reste jusqu'à l'âge de douze ans. 
De 1547 à 1549 il travaille à Milan, puis part à Naples vers 1550 : c'est l'époque de ses débuts en composition. Nous le retrouvons plus tard à Rome, travaillant pour Cosme de Médicis, après quoi il devient Maître de Chapelle de la Basilique Saint Jean de Latran en 1553. 
En 1555, il retourne aux Pays-Bas ; et c'est un tout jeune homme - quoique déjà nanti d'un métier extrêmement solide - qui voit ses premières œuvres publiées, à Anvers, à partir de cette même année.
En 1556, Lassus rejoint la Cour d’Albert V de Bavière, lequel désire s'entourer de musiciens du plus haut renom. Il restera au service de ce prince comme de son fils, Guillaume V, jusqu'à sa propre disparition, en 1594 Cet Orphée belge (comme il fut nommé par ses contemporains) était doté d'une voix exceptionnelle. Ses talents de compositeur et chanteur se sont d'ailleurs propagés en dehors du milieu musical: en 1570, le pape Grégoire XIII le fait chevalier ; et en 1571 et 1573, le roi Charles IX de France l'invite à sa Cour. 
À la fin des années 1570 et 1580 - malgré la fréquentation des madrigalistes de la Cour d'Este - son style est devenu plus simple et plus raffiné.

Roland (Orlande) de Lassus, ou Orlando di Lasso, 1532-1594

Compositeur prolifique, Lassus a écrit plus de deux mille œuvres dans tous les genres, en latin, français, italien et allemand. Ce qui en est parvenu jusqu'à nous demeure considérable : cinq cent trente motets, cent soixante-quinze madrigaux italiens et villanelle, cent cinquante chansons françaises et quatre-vingt-dix lieder allemands - enfin, près de soixante messes complètes ont été conservées ! Ses ultimes créations sont, le plus souvent, considérées comme majeures. Parmi elles, brille particulièrement  le recueil de vingt-et-un madrigaux spirituels connu sous le nom Lagrime di San Pietro - Larmes de Saint Pierre.
L’Ensemble l’Échelle a été fondé en septembre 2010 par l'alto Caroline Marçot et le ténor (1) Charles Barbier (retrouvez notre article sur la Missa Grande de Marcos Portugal, offerte l'an dernier aux Invalides). Ses artistes ont choisi de nous entraîner dans des compositions peu jouées du maître, dédiées à son protecteur Albert V, dans un recueil intitulé pour cette raison La Chambre Musicale d'Albert le Magnifique. Il s'agit en vérité d'un bouquet de petits chefs-d'oeuvre, retrouvant le souvenir du concert vocal (alto, ténor) et instrumental (cornets et sacqueboute) à la vénitienne. Cette formule fut inventée vers 1580 par Giovanni Gabrieli, compositeur de la Sérénissime, pour définir les partitions vocales avec accompagnement d'orgue ou d'un sobre ensemble instrumental.  Une "petite forme", par conséquent, propre à nous faire pénétrer dans la complicité simple d'une réunion entre amis, une musique de plaisir partagé et de connivences...


L'Ensemble l'Échelle

L'agilité, la finesse et la sensibilité des solistes de l’Ensemble ne sont jamais mises en défaut : le chant reste toujours d'une pureté parfaite, et, point très important, les intentions du compositeur, ne sont jamais surjouées). L’instrumentarium utilisé met en lumière la délicatesse des textes, reflet de l’intimité d’un Lassus partageant avec autant d'imagination que simplicité un métier parvenu à son zénith…
 La soprano Véronique Bourin, (que nous avons déjà entendue avec plaisir au sein de l'ensemble Doulce Mémoire), et le ténor Charles Barbier se haussent, dès ce premier opus, au niveau des compétiteurs les plus prestigieux (plages n° 6, 11, 23... extraits sonores en bas de page). À leurs côtés, les coruscants instrumentistes (plages 1, 34, 43 ou 44... extraits en bas de page), eux aussi, méritent tout les éloges.
Éloquent, techniquement très abouti et intelligemment organisé, cet album superbe, doté au surplus d'une prise de son superlative, est chaudement recommandé à qui veut s'initier à l'art de Roland de Lassus. Pour  qui souhaitera approfondir, recommandons en outre Philippe Herreweghe (Les Larmes de Saint Pierre, Harmonia Mundi) ; ainsi que Rinaldo Alessandrini ou l’Ensemble Clément Janequin dans des cycles de Chansons et Mauresques. Et encore, l'Ensemble Vocal Orlando - justement nommé - de Laurent Gendre pour Les Lamentations du Prophète Jérémie (Cascavelle). Enfin, les diverses productions dues aux Tallis Scholars de Peter Philips.
(1) Charles Barbier est également sopraniste et chef d'ensemble...
‣  Retrouvez le site de la Chambre Musicale d'Albert le Magnifique.
‣ Pièces à l'écoute simple, en bas de page  1) n°1, Cantate Domino (Prima Pars) 2) n°6, Maria Clausus Hortus - 3), n°11, Verbum Caro - 4) n°23, Duo numéro 12 - 5) n°34, Regina Cœli Lætare (Prima Pars) - 6) n°43, Ad Te Perenne Gaudium - 7) n°44, Resonet In Laudibus (Prima Pars).© Disques Paraty, 2011.
 Stéphane Houssier