C'est mercredi, c'est poésie.

Publié le 24 octobre 2012 par Pagman

Pendant des années

j'ai versé du bourbon dans ma tête
pour tuer les voix.
Mais vint le temps où j'ai dû lâcher la gnôle
ou rendre mon passeport.
Des jours ça allait si mal
que je devais remballer mes affaires dès le matin
dire que j'étais malade 
et quitter mon poste de télé-vendeur
trente secondes avant de tuer quelqu'un.
Je passais prendre deux Big Mac et louer deux pornos
je rentrais
tirais les rideaux
et me branlais dans du steak haché
pour étouffer le bruit.
Il me fallait des heures de télé et des romans de 800 pages sans
répondre au téléphone
pendant des jours
sans me raser ni laver une assiette
ni changer de slip
juste pour garde la tête hors de l'eau.
Aujourd'hui
je vais mieux
j'ai changé pour Burger King.

Un autre ? Bon, d'accord.

Les écrivains qui n'écrivent pas, dis-je
c'est comme les putes qui ne sucent pas
ils devraient changer de métier
faire cuistot chez McDo
ou postier en Italie.

Dan Fante, in "De l'alcool dur et du génie", éditions 13e Note.


Pour les amateurs et amatrices, Dan Fante sera à Paris ce week-end et lira ses poèmes samedi 27 octobre à 18h30 au café-librairie Marcovaldo, 61, rue Charlot, 75003 Paris.