Canoë Bay - Patrick Prugne

Par Belzaran


Titre : Canoë Bay
Scénariste : Tiburce Oger
Dessinateur : Patrick Prugne
Parution : Mars 2009


Patrick Prugne est un auteur que j’ai découvert en lisant « Frenchman ». Cet ouvrage est le meilleur que j’ai lu depuis bien longtemps. Il possédait toutes les qualités qu’on puisse attendre en ouvrant un album de bandes dessinées. Une fois ce bouquin terminé, j’ai cherché à découvrir les autres œuvres nées du travail de cet auteur. C’est de cette manière que j’ai découvert « Canoë Bay ». Cet opus est paru il y a environ trois ans. La version que je possède est éditée par la galerie Daniel Maghen. Il s’agit d’un superbe objet qui se compose de quasiment une centaine de pages. Les vingt dernières forment un cahier graphique décrivant le travail de Patrick Prugne sur les illustrations. Le prix du bouquin avoisine les dix-sept euros. Contrairement à ce qu’il avait fait dans « Frenchman », Prugne ne se charge pas du scénario et des dessins. Le premier aspect est confié à Tiburce Oger que je découvre ici. Je vais conclure cette présentation en évoquant la couverture qui est un petit bijou. On découvre deux indiens dans un kayak. Dans un ciel bleu sombre qui se confond avec la mer, ils voient poindre un navire à l’allure inquiétante. Dès ce premier contact visuel, on se sent envahi par une atmosphère intense et envoutante… 

Le site BDGest propose le résumé suivant de l’histoire : « Jack, un jeune orphelin acadien, se retrouve enrôlé de force par la marine marchande britannique. Il est, parmi des milliers, une victime du « Grand dérangement », épisode douloureux de l’histoire américaine, au cours duquel les anglais déportèrent les habitants de l’Acadie vers leurs colonies de la côte Atlantique. Canoë Bay retrace l’histoire de cet enfant soumis aux terribles conditions de la vie sur le « Virginia », dont l’équipage, composé d’anciens bagnards emmenés par le bien nommé « Lucky Roberts », se mutine bientôt. Devenus pirates, Jack et les siens devront apprendre à se méfier des Anglais, des Français, et de quelques « faux » frères de la côte... »

Même si l’histoire est indépendante de celle contée dans « Frenchman », on trouve beaucoup de points communs dans le décorum qui abrite les deux aventures. On est plongé dans le dix-huitième siècle sur le continent américain. On est à nouveau plongé dans un monde dans lequel cohabitent plus ou moins facilement indiens, canadiens, soldats anglais et français. Ce fil conducteur entre les deux ouvrages me ravissaient tant j’avais été conquis par celui que j’avais déjà lu. J’étais donc habité d’un enthousiasme certain en me plongeant dans « Canoë Bay ».

La trame se construit autour d’un enfant au parcours peu orthodoxe. Néanmoins, l’attrait de la narration ne réside pas uniquement dans le devenir de ce personnage. Ce dernier appartient à un groupe qui va être obligé de migrer régulièrement pour fuir une société qui s’avère bien hostile à leurs égards. A cela s’ajoute la quête d’un trésor. Toutes ces pérégrinations se construisent autour de « Lucky Roberts » qui est un pirate des plus charismatiques. Il génère une emprise sur son entourage qui s’étend jusqu’au lecteur. Ce sont ses décisions qui imposent le rythme à l’histoire. Pour notre plus grand plaisir, il n’est jamais sans idée ni volonté.

Au-delà de personnages hauts en couleur que je vous laisserai découvrir au gré de leurs aventures, il faut évoquer la richesse du scénario. On se trouve à vivre le quotidien d’un mousse sur un navire, on assiste à une rébellion en haute mer, on découvre le Nouveau Monde, on erre en forêt pour sauver sa peau tout en cherchant en trésor. A cela s’ajoute la présence d’indiens, la quête d’un père pour retrouver sa fille et la guerre entre anglais et français… Les auteurs ne se moquent pas de nous et arrivent à faire cohabiter tous ses aspects avec un dosage subtil et savamment dosé. Le rythme est effréné. On ne s’ennuie jamais tout au long des quatre-vingts pages qui composent l’histoire. On s’attache aux personnages, on se passionne pour leur quête. Bref, on en prend plein les mirettes et notre curiosité ne fait que grimper en intensité.

L’autre richesse de cet ouvrage est la qualité de ses illustrations. Je n’ai pas les mots pour les décrire tant elles sont remarquables. Chaque case est une œuvre d’art qui mériterait de trouver sa place sur un mur. Que ce soit les décors fermés, maritimes, forestiers, enneigés, diurnes ou nocturnes, tous sont maitrisés à merveille par Patrick Prugne. Il s’agit incontestablement d’un des meilleurs dessinateurs du neuvième art. Je regrette de ne pas le voir produire davantage. Parallèlement, vu l’ampleur de ses œuvres, il ne peut pas sortir un album tous les mois. En tout cas, je vous conseille vivement de partir à la découverte de cet auteur.

En conclusion, « Canoë Bay » est un véritable petit bijou de bandes dessinées. Il s’agit d’un ouvrage qui marque le lecteur quand il s’y plonge. Je ne peux que vous inciter à vous plonger au plus vite dans cet ouvrage. De mon côté, je vais être aux aguets du travail de Patrick Prugne. Je ne veux rien rater de ses productions. Ce serait du gâchis…   

par Eric the Tiger

Note : 19/20