Haneke n’est qu’Amour

Publié le 04 novembre 2012 par Unionstreet

Si une certitude existe au cinéma, c’est bien celle qui voudrait qu’un film d’Haneke présenté à Cannes est toujours un événement. Autre certitude : Michael Haneke n’a pas de coeur. Mais Amour va venir ébranler cette dernière affirmation. Même si la dureté de la vie est montrée frontalement, le réalisateur autrichien présente un film humain tandis que la mort pèse dès le générique sur nos pauvres épaules.

Et voilà donc notre homme auréolé de sa deuxième palme qui aura laissé de côté le temps d’un film toute la noirceur et la perversité humaine qu’il affectionne tant de filmer. Amour c’est la fin d’un long voyage à deux, une promesse à l’éternelle tenue. Et le spectateur est embarqué là dedans, dans un huis-clos parisien et assistera à cette dernière danse. Le film est dans la longueur et le silence, mais c’est pour mieux bouleverser le spectateur à la sortie. Car la froideur du tout vous rendra juste simple voyeuriste attendant la mort des protagonistes (comme toujours chez Haneke).

Mais le côté glacial de la forme n’enlève pas la beauté du fond : Où sommes nous prêt à aller par amour ? Comment supporter la souffrance et la transformation de l’être aimé ?Cette question vous taraudera longtemps après avoir vu le film. De plus la beauté formelle du film est amplifiée par Schubert (Impromptu) et quelques scènes d’une rare intelligence (Riva au piano, le pigeon…).

Les acteurs font des merveilles. De splendides dialogues interprétés par deux acteurs sublimes : Trintignant et Riva. Si aux prochains Césars ils ne raflent pas des prix d’interprétations, je jure de ne plus aller au cinéma. Tout leur jeu est d’une infinie justesse et nous ressentons la douleur physique de ces deux corps qui peu à peu ne pourrons plus communiquer.

Sans jamais tomber dans le pathos, Amour se termine par un geste psychologiquement odieux mais qui est en réalité l’une des plus grande déclaration d’amour vue au cinéma. Du très grand Haneke quoi. Il montre tout, s’accorde un peu de poésie, met quelques baffes dans notre gueule (moins que d’habitude) puis nous laisse seul avec Isabelle Huppert dans cet appartement immensément vide. Chef d’oeuvre.

(petit bonus, la version d’Impromptu par Alexandre Tharaud, qui joue son propre rôle dans le film)