How far can you go? (about EU)

Publié le 08 novembre 2012 par Edgar @edgarpoe

Désolé pour ce titre anglophone, que seuls les lecteurs de David Lodge en VO sauront apprécier à sa juste valeur.

Dans un billet précédent, j'imputais à l'Union européenne le décès tragique d'un bébé.

Deux commentateurs ont estimé que cela allait bien loin.

Précisons tout d'abord qu'il n'est en effet pas de certitude en la matière. Il arrive notamment que l'on meure dans un lit à l'hôpital, signe qu'en effet la proximité du lieu n'est pas un gage définitif de guérison.

Sur le cas précis, aucune certitude donc. Mais il serait fou de ne pas faire le lien entre la dégradation accélérée des services publics en général et la pression bruxelloise pour faire des économies.

Un commentateur me dit que même en tenant compte de cela, à 56% de prélèvements obligatoires, il faut de toute façon réagir.

Je réponds.

1. comme le souligne le Part Ouvrier Indépendant, dans le tract que je citais, c'est en 1975 que la France disposait du plus grand nombre de maternités. Et le taux de prélèvement obligatoire n'était que de 44% en 1978, 3 ans plus tard. Signe que quand la croissance est là, on peut avoir des services publics généreux et une pression fiscale inférieure à 50% (à supposer même que 56% soit un mal, ce que je ne crois pas).

2. Jacques Sapir estimait en 2010 que l'euro avait réduit la croissance au point de réduire le PIB 2010 de la France de 400 milliards d'euros. Cette année là, le PIB était de 1931 milliards d'euros, les dépenses publiques de 1081 milliards et donc le taux de prélèvements obligatoires de 56%. Avec 400 milliards de PIB de plus, ce que l'euro nous a fait perdre, le taux de prélèvements obligatoires eût été de 46%.

3. Il faut comprendre que la (très mauvaise) dynamique de l'économie française aujourd'hui, dont l'une des caractéristiques semble être la hausse des prélèvements obligatoires, n'est pas le fait d'une hausse de la dépense publique. Il s'agit d'un effondrement des recettes, dû à la lente asphyxie par l'euro. Comme les services publics ont, en gros, un coût fixe, ils représentent une part croissante du PIB. Il n'est pas non plus anormal, s'agissant de services de première nécessite en très grande partie, que ce soient les dernières dépenses que l'on coupe. Le problème c'est que c'est à cela que l'onrisque d'arriver.

L'erreur d'optique des bayrouistes, Aphatie, Fillon et autres comptables sérieux d'apparence, c'est de ne voir ce qui est visible au premier abord : les dépenses publiques qui restent au niveau de l'époque où la France était encore un état démocratique mais avec une proportion croissante  du PIB. Apparemment il manque à ces analystes la capacité (ou la volonté) de voir ce qui n'est pas là mais devrait y être : les 400 milliards de PIB que l'euro nous a ôté.

Donc je ne crois pas que la fermeture de maternités soit seulement le fruit d'une rationalisation intelligente de la carte hospitalière (l'honnêteté me conduit à dire que je trouve un document médical affirmant l'inverse, mais dont l'analyse paraît reposer sur des données vraiment peu affinées).

L'avenir tout proche risque de toute façon de montrer que les maternités ne sont pas les seuls équipements publics en danger.

En 2002, un petit livre de géographes sortait avec le titre "la France à 20 minutes". Il s'agissait de cartographier combien de français étaient à plus de 20 minutes de différentes services. C'était avant les ravages de l'euro, à une époque où l'on cherchait encore à construire des équipements collectifs sans les attendre du marché. Je ne veux pas croire que ce temps là soit fini.