Victime d'une injustice: Le journaliste Lakhdar Siad adresse une lettre à l'opinion publique et aux ONG autonomes

Publié le 09 novembre 2012 par Kabyle @Madjid_SERRAH


UN PROCÈS TRONQUE, PRES DE SIX ANS APRÈS LA PLAINTE


La justice algérienne vient de produire un autre sombre épisode de sa triste histoire. Je viens en effet d’être informé par mon avocat que le Tribunal de Tizi-Ouzou a programmé la tenue de mon affaire avec un dossier à priori tronqué (mon PV d’audition est incomplet, manque des PV d’auditions des personnes incriminées et des témoins, disparition du certificat médical…etc.) et dont les faits graves et la plainte s’y référent remontent au 28 mars 2007, soit plus de 5 ans et demi plus tard, soit 1980 jours. Bref rappel des faits selon grosso-modo les pièces disponibles dans le dossier et mes notes personnelles : 
- Le 28 avril 2007 à Tizi-Ouzou, agression dans les locaux de la permanence du Mouvement citoyen des Ärchs de Kabylie sis à Tizi-Ouzou ville par un groupe d’individus formellement identifiés et portés sur le PV d’audition de la Police. 
- Le 29 avril 2007, établissement d’un certificat médical par un médecin expert des Tribunaux et dépôt de plainte au niveau de la Sûreté de wilaya (département) de Tizi-Ouzou. 
- Le12 mai 22007, le dossier est transmis par la Police au Parquet de Tizi-Ouzou pour instruction, sous le numéro 4495. 
Et depuis cette date et pendant près de trois ans, les démarches et requêtes personnelles aussi nombreuses que pénibles entreprises au sein des services judiciaires (le service courrier et par la suite celui des archives du Tribunal de Tizi-Ouzou) pour retrouver les traces de ma plainte n’ont donné aucun résultat. « Votre dossier est transmis à la justice », me répète-t-on cependant au niveau de la Sûreté de wilaya de Tizi-Ouzou en mettant à ma disposition le document qui conforte cette affirmation. 
- Le 07 mars 2010, le Procureur de la république est saisi (demande d’intervention) pour transmettre le dossier au Tribunal. 
- Le 17 mars 2010, le dossier est envoyé à la Sûreté de daïra d’Azazga pour m’auditionner une deuxième fois alors que le parquet de Tizi-Ouzou devait intervenir au niveau de la Sureté de wilaya de Tizi-Ouzou pour l’envoi du dossier et son instruction. Informé par mon avocat, je refuse de m’y soumettre à cette procédure pour le moins surprenante. 
- Le 16 juin 2010, le Procureur d’Azazga renvoie le dossier à Tizi-Ouzou. 
- Le 30 aout 2010, le Procureur de Tizi-Ouzou fait retourner le dossier à Azazga. 
- Le 27 octobre 2010, le Procureur de Tizi-Ouzou écrit au parquet d’Azazga : « Il faut agir vite dans le dossier » (!!!). 
- Le 20 janvier 2011, le Procureur d’Azazga envoie une notification pour audition (j’ignore pour qui et pourquoi). 
- Le 08 février 2011, traces d’autres notifications entre les Parquets de Tizi-Ouzou et d’Azazga. 
- Le 16 mars 2011, même courrier. 
- Le 28 mars 2011, même courrier. 
- Le 29 mars 2011, la demande d’intervention est classée (archivée) par le Procureur de Tizi-Ouzou pour le motif de « non réponse aux convocations ». 
A préciser que durant toute la durée de cette procédure je n’ai jamais reçu de convocation des services de la Justice ni accusé réception d’un document émanant de leur part alors que mon adresse est bien mentionnée dans le premier et seul PV de Police établi le 29 avril 2007 et transmis au Tribunal de Tizi-Ouzou. 
- Le 06 mai 2012, demande d’intervention au Procureur Général de la Cour de Tizi-Ouzou. 
- Le 08 mai 2012, le Procureur Général transmis la demande au Procureur du Tribunal de Tizi-Ouzou. 
- Le 20 juin 2012, le dossier est transféré au parquet de Tizi-Ouzou. 
- Le 29 septembre 2012, programmation de l’affaire et son report pour « consultation du dossier » demandé par mon avocat en raison du court délai dont nous disposions pour préparer le procès et du contexte de fête religieuse de son occurrence. 
- Le 05 novembre 2012, l’avocat informe le Procureur de Tizi-Ouzou des pièces manquantes dans le dossier et ce dernier lui promet d’y remédier. 
A ce sujet, je souligne que j’ai fait le choix d’agir correctement au sein des Instances précitées sans le recours d’usage courant dans les Tribunaux algériens aux pratiques de sollicitations des liens familiaux et tribaux dans l’administration, de corruption et de passe-droits, cela étant conscient des péripéties et des chances quasiment nulles d’aboutir dans ce cas de figure à faire ramener les individus mis en cause devant une juridiction dans un Etat qui depuis au moins deux décennies est en tête des tableaux des pires méfaits et délits de la planète et par conséquent toujours vraisemblablement envieux de préserver sa place de bon dernier dans les classements mondiaux en rapport avec la sécurité, la Justice, le respect des libertés individuelles et collectives, la consécration effective de la liberté de culte, l’économie, la santé, l’éducation, l’environnement, le bien être social et même l’hygiène. 
Un système aveugle et violent qui refuse d’autre part la mise en œuvre d’un processus d’autonomie des peuples et des identités amazighes dominantes en Algérie, notamment dans la région de Kabylie qui aspire à vivre librement en harmonie avec son identité, sa langue et son histoire plusieurs fois millénaire et se tourner vers un avenir démocratique et prospère en phase avec les valeurs universelles et les défis de l’heure. 
Il s’agit là d’un autre grave dysfonctionnement de la Justice complètement incompatible avec un pouvoir qui prétend présentement se réformer tout en se taillant à sa propre mesure afin de s’éterniser pour bénéficier de la rente pétrolière et d’autres indus privilèges, des lois et des décisions qui sont en principe du ressort de la souveraineté populaire. 
En définitive, l’immobilisme, la déliquescence et les fuites en avant des instances judiciaires d’office concernant ma plainte pour « CBV, injures et menaces de mort » durant tout ce temps laissent peu de doute quant à leur fonctionnement opaque. 
Lakhdar SIAD 
Journaliste 
siadla@yahoo.fr 
Azazga (Kabylie), le 07 novembre 2012