Un des faits accélérateur de ce qu’il faut bien appeler une débâcle fut,
sans nul doute, l’affaire Florange. Comme il fallait
s'y attendre l’activisme forcené mais stérile d’Arnaud Montebourg et sa
menace de nationaliser le site, n’a fait que créer frustrations et déceptions
et ce malgré la sauvegarde des emplois. Comme il fallait également s’y
attendre, ce n’est pas Arnaud Montebourg qui pâtit de l’affaire, bien au
contraire, mais Jean-Marc Ayrault et François Hollande auxquels on
reproche de n’avoir pas voulu se lancer dans une coûteuse, inefficace et
symboliquement dangereuse nationalisation, même temporaire.
En dehors des difficultés indéniables qu’il y a à gouverner la France dans
l’état ou elle se trouve et avec les perspectives qui sont les siennes, en
dehors de la difficulté que rencontrent de manière générale tous les
gouvernants à peine élus à ne pas décevoir, les Socialistes payent leur
discours irresponsable et/ou naïf (au choix) dans l’opposition.
Lorsque Jean-Marc Ayrault dans un entretien avec le
Journal du dimanche nous dit «J'agis sans semer des illusions. Sur
Florange j'assume parfaitement ce qui a été décidé. Je ne mens pas aux
Français » il a parfaitement raison mais manifestement ça ne suffit
pas. Agir sans semer d’illusions est essentiel mais encore faut-il que les
français sachent faire la distinction entre illusions et réalité.
Or, la Gauche, parce qu’elle a trop longtemps fait passer des illusions pour
des véritables solutions, se trouve prise à son propre piège. Elle a beau faire
du mieux qu’elle peut, dans les limites des contraintes auxquelles elle est
soumise, son action au gouvernement sera toujours jugée à l’aulne de son
discours d’opposants.
Ainsi lorsque ce même Ayrault dans le même journal nous dit « François
Hollande n'a jamais promis qu'il sauverait toutes les usines (…)» il a
également raison. François Hollande n'a effectivement jamais dit qu'il
sauverait toutes les usines, mais il n'a jamais dit le contraire, pire encore
il a laissé croire lorsqu'il était dans l'opposition que c'était possible, et
c'est là que se trouve le problème.
En accablant Sarkozy et ses promesses non tenues comme à Gandrange, les
socialistes et Hollande en tête ont laissé croire que l'Etat pouvait sauver les
industries en déclin. En laissant croire qu'en nationalisant l'Etat pouvait
sauver les haut-fourneaux de Florange, Montebourg et à travers lui Hollande ont
laissé croire que l'Etat pouvait sauver une activité condamnée par tous les
spécialistes du sujet. En refusant avec force la fermeture de l’usine PSA
d’Aulnay lors de son intervention télévisée du 14 juillet, François Hollande a
laissé croire que l'Etat pouvait s'opposer à cette
fermeture. C'est tout le problème des socialistes, dans l'opposition ou
tout fraîchement élus, ils ont laissé croire que tout était possible à partir
du moment où la volonté politique était là, et une fois au pouvoir et
confrontés à la dure réalité, ils s'étonnent qu'on leur reproche de ne pas
faire des miracles.
Pour le moment ils peuvent encore se cacher derrière le
« désastreux » bilan de Sarkozy pour ne rien assumer, mais lorsque
dans 1 an, et contrairement à ce que François Hollande a imprudemment annoncé,
le chômage sera à des sommets encore jamais atteints, le boomerang leur
reviendra violemment en pleine figure.
D'autant plus violemment que du temps de Nicolas Sarkozy, les Socialistes n'ont
pas arrêté de lui reprocher de ne pas donner la priorité au chômage et au
pouvoir d’achat. Comme si le chômage et le pouvoir d’achat étaient dissociables
du reste de l’économie. Comme s’ils pouvaient se traiter uniquement avec la
force de la volonté politique.
En attendant, les déçus se multiplient, ce sont les
syndicalistes d’Aulnay qui ne « veulent plus entendre parler de
Montebourg» ou ceux de Florange qui se déclarent « trahis
». Plus généralement ce sont tous ceux qui à travers les
sondages expriment leur défiance vis-à-vis de ce Gouvernement qui se montre
incapable de faire des miracles.