Quelle place, dans la foi, tient aujourd'hui la virginité de Marie ?

Par Perceval

La virginité perpétuelle de Marie, est une « Vérité » qui reposerait sur la réplique de Marie à l'ange Gabriel venu lui annoncer son enfantement divin: "Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d'homme?" (Luc, I, 34).

Polémiquer sur la rupture ou non de l'hymen de la mère de Jésus, ne relève t-il pas d'une lecture matérialiste des Evangiles ? Cette lecture amène à nous interroger sur le fait que Marie ait pu concevoir le Christ en son sein sans avoir eu de relation avec un homme, mais aussi qu'elle lui a donné naissance ... sans que son hymen soit rompu. Ce qui implique que Jésus soit né miraculeusement, en sortant de son ventre … comme Jésus ressuscité rentrait dans les maisons: sans passer par la porte !

Marie «  est restée Vierge en concevant son Fils, Vierge en l'enfantant, Vierge en le portant, Vierge en le nourrissant de son sein, Vierge toujours. [...] Il se créa donc une Mère tout en demeurant dans le sein de son Père ; et naissant d'elle, il ne cessa de demeurer en Lui. Et comment aurait-il cessé d'être Dieu en se faisant homme puisqu'il accordait à sa Mère de ne pas cesser d'être Vierge, tout en l'enfantant ? Aussi en se faisant chair le Verbe n'a point péri, il ne s'est point transformé en chair ; c'est la chair qui s'est unie au Verbe pour ne point périr. » Saint-Augustin dans un de ses sermons.

Peut-on croire à la fois en la conception virginale et en l'Incarnation ? Si Jésus est Dieu et homme, n'est-il pas à la même enseigne que tous les humains... ? Pourquoi «  désincarner » Marie ?

Jan Gossaert dit Mabuse (1458-1541) est un peintre flamand. Si on excepte la nudité de la poitrine, sa Danaé est traitée comme la vierge Marie, une attitude modeste et soumise, le regard reconnaissant, on peut y ajouter le bleu du vêtement bien qu’à cette époque la relation ne soit pas encore aussi forte entre Marie et la couleur bleue.

Fra Angelico

René Laurentin (1) dans son Court traité sur la Vierge Marie, défend ce « dogme » ; en expliquant que l'âme est souvent ( et malheureusement ) présentée « comme un double et un au-delà du corps, alors qu'elle en est la forme substantielle et constitutive. Le corps est fâcheusement conçu comme un vêtement, voire une "guenille" ou "une prison de l'âme", alors qu'il en est l'organe vivant et transparent, le signe connaturel. Nos contemporains pensent facilement que ce qui advient au corps n'a pas d'importance pour l'"âme". Quoi d'étonnant que le mystère corporel et spirituel de la virginité en général et de la virginité dans l'enfantement en particulier, paraisse dépourvu de signification religieuse et qu'on bute également sur la transfiguration du Christ chère à l'orient, et, plus généralement sur tous les mystères qui impliquent un rayonnement des réalités spirituelles au niveau du corps?, Laurentin, pp. 177-178.

« Selon la Tradition, en effet, elle est parfaitement "Mère" en même temps que parfaitement vierge. La virginité ne diminue pas plus la maternité comme telle, que la divinité du Christ ne diminue son humanité. Il ne faut donc pas hésiter à dire: Marie, intégralement Mère, a mis au monde par ses forces naturelles, avec ce sentiment de don de soi, de maîtrise de soi, et de liberté qui convient à une authentique maternité [...], Laurentin, p. 178

Comment les Pères de l'Eglise ont-ils pu concevoir une « chose » aussi exceptionnelle et non-naturelle ? Laurentin répond qu'ils « Ils s'expriment à ce sujet dans une langue religieuse et poétique, non en termes cliniques. Nous imiterons cette discrétion qui tient à ce qu'ils expriment le droit fil du mystère, et entendent nourrir la foi, non la curiosité. »

Pourquoi affirmer un tel « mystère » ?

Parce qu'il serait lié à la «  naissance du Verbe »... Les pères chercheraient à affranchir la naissance de Jésus, des servitudes et déterminismes de la chair. Le fils de Marie, selon l'humanité est ainsi bien le fils de Dieu de toute éternité.
Comment exprimer que Jésus, est homme mortel, et divin dans sa perfection universelle et éternelle ?
De plus, la vierge Marie voudrait représenter «  l'icône parfaite de la foi qui est l'âme de la virginité. » parce que «  elle réalise corporellement ce que l'Eglise réalise spirituellement dans sa foi, c'est-à-dire la virginité dans la fécondité, elle qui a conçu Dieu en son coeur avant qu'en son corps (Augustin) »

Jésus-Christ et le couronnement de la Vierge- Marie: la-peinture-de-sienne-eglise-sata-maria


Pas sûr, qu'aujourd'hui nous comprenions très bien ce rapprochement entre Marie, l’Église et la foi … !
Mare serait la « nouvelle Eve », donc un nouveau point de départ de la création …
Alors, si j'apprécie le symbolisme du corps, comme partie intégrante de l'homme, qui est sauvé par le Christ... Il m’apparaît, qu'aujourd'hui, nous ne pouvons comprendre que la non-virginité soit l'image de la chute...
Ainsi, Justin philosophe chrétien du IIème siècle, oppose Ève et Marie. Il explique qu'Eve était "vierge et non souillée" avant d'écouter le serpent. Pour réparer la faute d'Eve, Marie doit forcément être vierge. Ces conséquences théologiques, aujourd'hui, deviennent incompréhensibles … !

(1) René Laurentin est né le 19 octobre 1917 à Tours (France). Prêtre, théologien, exégète, historien, spécialiste notamment des apparitions mariales. Ancien expert au Concile Vatican II, Membre de l’Académie théologique pontificale « Pontificia Academia Mariana Internationalis » de Rome...