Patricia Laranco (Île Maurice / France).

Par Ananda

L’ENVERS DU DECOR

Il y a toujours

cette boue qui nous menace

et qui nous tire vers le bas,

elle est en nous :

lourdeur corruptible, organique

de la chair

véhicule du Temps, de la dévastation

où œuvrent à bas bruit, la destruction programmée,

le lent pourrissement des sites intestins…

Nous qui aspirons à la lumière, à l’azur,

nous, extraits à grand peine du limon des nuits,

nous, au fond, aussi fragiles que la gelée

nous retournons toujours

où nous avons jailli.

Les macules de la maladie, du déclin,

de la lassitude à force

de trop lutter

ont raison de notre foi, de notre vigueur…

Dès l’aurore, le germe de fin

est logé

au plus discret de notre fibre intérieure,

fertile en apoptoses et en effondrements,

en érosions sournoises de l’axe de vie.

Chaque minute ajoute

à notre illusion

mais aussi, en Janus, à notre autophagie

et nos parfums, nos ruses de séduction,

nos combats pied à pied contre ce qui salit

et qui use masquent assez mal les miasmes épais,

putrides, de nos viles décompositions .

Nous ne voyons (car nous ne voulons regarder)

que le rayonnement de notre être animal

-traître-, que l’agilité de notre mental

mais au regard de cette vase

que pèsent-ils ?

Si l’on ne nous

mettait pas en terre, à la fin

ou si quelque bûcher

ne nous dévorait pas

quelque bec de freux ou quelque croc de chacal

s’en viendrait cisailler

ce qui reste

de nous !

Patricia Laranco.