Hong Kong, paradis libéral ?

Publié le 28 décembre 2012 par Copeau @Contrepoints

Hong Kong a une réputation de pays libéral, en particulier en raison de sa première place au classement de l'Index of Economic Freedom qui mesure la liberté économique dans le monde. Est-ce justifié ?

Par Alexis Vintray.

Panorama de Hong Kong

Hong Kong a une réputation de pays libéral, en particulier en raison de sa première place au classement de l'Index of Economic Freedom qui mesure la liberté économique dans le monde. Est-ce justifié ? Nous avons cherché à le vérifier en interrogeant  Simon Lee du Lion Rock Institute, un think tank libéral à Hong Kong.

Selon lui, l'incroyable prospérité de ce petit pays [1] tient à deux facteurs clef, qui limitent le pouvoir des politiques de prendre des mesures dommageables pour l'économie.

D'une part, l'arrimage de la monnaie locale, le dollar de Hong Kong, au dollar américain, prive depuis octobre 1983 le pouvoir de l'arme monétaire et permet une grande stabilité économique. Le cours de 7,8 HKD pour un dollar américain n'a depuis quasiment pas bougé depuis lors. De 1998 à 2003, le pays a ainsi connu la déflation, sans que le pouvoir puisse faire marcher la planche à billets, pour le plus grand bien de tous au final.

Cours HKD USD

D'autre part, le fort taux d'immigration et la grande mobilité de la population empêchent le pouvoir d'augmenter trop les taxes. S'il le faisait, la population partirait dans des proportions énormes. Surtout, cette culture d'immigrants nourrit la créativité et l'innovation en favorisant un mélange permanent des individus et des cultures.

Ces deux facteurs permettent une fiscalité qui nous semble bien enviable : Impôt sur le revenu et impôts sur les bénéfices aux environs de 15% par exemple. Rapporté au PIB, l’État pèse environ 35 à 40% du poids de l’État français et affiche une dette inférieure à 40% du PIN, permettant ainsi un développement économique massif et l'un des plus hauts niveaux de vie au monde. Cela alors que, sans ressources naturelles, ce petit territoire d’un peu plus de 1.000 km² n'a rien de particulier pour lui.

Pourtant, l’État, même limité par ces deux facteurs, continue à jouer un rôle significatif. La dépense publique est ainsi passée de 15% à 22% du PIB entre 2003 et 2012. Le logement est particulièrement impacté par l'action de l’État : le pouvoir maintient ainsi une pénurie artificielle des terrains, qui a fait exploser les prix et les terrains ne sont pas cédés mais seulement prêtés aux acteurs privés. Le logement public (public housing, pas nécessairement social) représente aujourd'hui près de 50% du parc immobilier.

Une politique qui, couplée avec le développement parallèle d'un État providence, risque de tuer la première force de Hong Kong à savoir une population cosmopolite et créatrice. Il ne faut pas être surpris, rappelle Simon Lee, de voir l'innovation chuter au rythme de la croissance de l’État-providence... De même, les aides massives tendent à limiter l'esprit d'entreprendre ou l'initiative individuelle dans le domaine associatif. Alors que dans les années 1960 à 1980, Hong Kong exportait marchands et hommes d'affaires dans le monde, le pays repose aujourd'hui de plus en plus sur la Chine. Autant dire donc que, si Hong Kong est incontestablement plus libéral que la France, cela n'en fait pas un paradis libéral pour autant.

Si les facteurs du succès de Hong Kong semblent bien locaux, faut-il perdre tout espoir de répliquer ce succès ailleurs, en particulier en France ? Hier peut être, mais pour demain c'est au contraire encourageant : il devient de plus en plus aisé de bouger, de faire jouer la concurrence entre États de par le monde, en témoignent par exemple les récents départs de Gérard Depardieu, Bernard Arnault ou Alain Afflelou. De quoi nous donner espoir pour la France !

À lire aussi :

  • John James Cowperthwaite, un des pères du miracle de Hong Kong
  • Le Honduras lance le Hong Kong du XXIe siècle
  • Notre dossier sur Hong Kong

---

Entretien mené en juillet 2012. Nos remerciements à Simon Lee et Andy Yeung

Note :

  1. le terme pays est peu approprié ici avec la politique « un pays, deux systèmes » mais nous l'utilisons par facilité