Il était une fois en France, T6 : La Terre Promise - Fabien Nury & Sylvain Vallée

Par Belzaran


Titre : Il était une fois en France, T6 : La Terre Promise
Scénariste : Fabien Nury
Dessinateur : Sylvain Vallée
Parution : Octobre 2012

« Il était une fois en France » est une série qui aura marqué la dernière décennie du neuvième art. Elle a connu son dénouement lors de la parution de son dernier acte intitulé « La Terre Promise » en octobre dernier. Le travail scénaristique de Fabien Nury associé au dessin de Sylvain Vallée a fait naitre une histoire à l’ampleur rare. La quatrième de couverture est un modèle du genre. « Orphelin. Immigré. Ferrailleur. Milliardaire. Collabo. Résistant. Criminel pour certains, héros pour d’autres… Joseph Joanovici fut tout cela, et bien plus encore. Voici son histoire. » Le programme est ambitieux, la réalisation tout autant.
Au risque d’enfoncer une porte ouverte, il est indispensable d’avoir lu les cinq premiers épisodes pour profiter pleinement de cette dernière ligne droite. La densité de l’intrigue et le grand nombre de personnages font que ne peut pas prendre le train en route. Cette saga est remarquable dans son aspect la petite histoire dans la grande Histoire. En suivant les pérégrinations de Joseph, c’est toute la France de l’Occupation qu’on découvre. La complexité du personnage fait qu’il navigue dans tous les milieux et dans les deux camps. Cela fait que la dimension documentaire de l’intrigue s’emmêle parfaitement dans l’épopée du « héros ».
Une des autres richesses de la série est la personnalité de son protagoniste principal. Il correspond parfaitement à la description faite sur la quatrième de couverture. Son ambivalence fait qu’il génère chez le lecteur tout le spectre des émotions. Son exil d’orphelin nous touche, sa volonté de grimper socialement nous impressionne, sa quête de protection de sa famille est respectueuse, son courage est évident. Parallèlement, sa froideur met mal à l’aise, son manque de patriotisme dans ses accointances avec les nazis irritent, son inhumanité pour faire régler certains problèmes horripile. Bref, on n’est loin du manichéisme et cet aspect rend l’histoire prenante et envoutante.
Depuis quelques tomes maintenant, la guerre est terminée. Il est temps de régler les comptes. Certains veulent mettre un voile sur cette époque. D’autres veulent faire payer ceux qui ont fauté. Joseph marche sur un fil. Certains de ses actes font de lui un grand résistant. D’autres en font un des plus grands collaborateurs avec l’ennemi. Un juge de Melun fait de la condamnation de Joanovici une affaire personnelle. Il cherche à déterrer tous les cadavres et à faire plier tous les soutiens du célèbre accusé. « La Terre Promise » marque la fin de son parcours. On le voit condamné. On le découvre se faire une nouvelle santé en province. On le suit chercher à fuir en Israel. On l’accompagne jusqu’à ses derniers jours.
Fabien Nury a  réussi un tour de force en générant une intrigue aussi intense pendant la guerre qu’après sa fin. L’intensité et le suspense apparaissaient évidents quand il s’agissait de sauver sa peau sous l’occupation. Chaque coin de rue ou chaque rencontre pouvait amener la mort. Une fois le pays libéré, on pourrait espérer profiter d’une lecture plus apaisée. Ce n’est pas le cas pour notre plus grand plaisir. La France d’après-guerre est remarquablement transcrite. On s’y croit complètement. Notre immersion est totale. A travers le parcours de Joseph, on voit bien que le lendemain du huit mai mille neuf cent quarante-cinq, tout n’a pas changé du tout au tout. Rien n’est blanc ou noir. Tout oscille dans un gris plus ou moins foncé et le héros se rapproche tour à tour de la lueur ou de l’obscurité. On se passionne pleinement pour chaque rebondissement. On est d’autant plus touché qu’on sait en ouvrant l’album qu’il s’agit du dernier. C’est également pour nous, lecteur, la fin d’un long voyage. Ce parallèle ajoute une véritable émotion à notre lecture.
Le dessin de Sylvain Vallée accompagnement parfaitement notre aventure. Son style simple correspond parfaitement propos au contenu et l’époque qui l’abrite. Son travail sur les visages, les décors et les couleurs facilitent notre immersion et notre dépaysement. « La Terre Promise » marque une conclusion remarquable d’une série qui l’est tout autant. La qualité extrême n’a jamais diminuée tout au long de l’apparition dans les rayons des différents actes de la vie de Joseph Joanovici. Je ne peux que vous conseiller de vous partir à la découverte de cette série. Elle vaut réellement le détour… 

par Eric the Tiger

Note : 17/20