Survivre au syndrome de l’entrepreneur

Publié le 16 janvier 2013 par Sandrine Audras @SandrineAudras

Cela peut surprendre mais c’est une vrai question que je pose là: y a t-il une vie professionnelle possible après une expérience entrepreneuriale ?

Formulée ainsi, la question ne semble pas tendre vers une réponse positive. Et pourtant si, mais sous certaines conditions.

Examens des faits qui fâchent

Donc, la question est : si l’on a vissé un jour la casquette de « patron » sur sa tête, peut-on prétendre à nouveau à celle de « salarié » ?

Techniquement, on peut.
Sauf que cette expérience – forcement enrichissante, me direz-vous –  qui vous a fait passer de l’autre côté du bureau, vous a irrémédiablement marqué au fer rouge.
Et on risque de vous le faire remarquer plus ou moins élégamment: de fait, si vous vous présentez de nouveau sur le marché du travail, c’est bien que votre expérience de patron n’a pas été couronnée de succès.

Mieux vaut vous y préparer:
e
n France, entreprendre vous condamne à réussir.

Si ce n’est pas le cas, toutes les compétences déployées – voire acquises pour l’occasion – perdront 50% de leur valeurs sur votre futur CV.
Vos qualités professionnelles et personnelles seront immanquablement examinées à la lumière de ce qui sera perçu comme un échec… Autant accepter de suite que l’éclairage ne sera pas flatteur.

Pire… on doutera de vous d’emblée sur deux points:

-  votre capacité à collaborer et à intégrer de nouveau une équipe.

- le fait que cela ne vous reprenne pas … d’entreprendre… d’où la question de la pérennité de votre présence, et celle de la pertinence de vous faire confiance.

Est-on pour autant définitivement perdu pour le monde de l’entreprise « normale », celle avec collègues/manager/hiérarchie etc.

Point du tout !!
Cependant la tâche sera plus aisée si on accepte certains faits et si on se prépare sur quelques points.

Reprendre la main

Le plus important est sans doute de définir un projet professionnel solide.

Au-delà de la nécessité de travailler du nouveau, c’est d’un objectif identifié dont on a besoin: une fonction précise, une taille d’entreprise, un secteur d’activité…

Pourquoi ? Pour éviter de s’épuiser dans des recherches tout azimut aux bilans énergétiques déplorables d’une part.
Et d’autre part, parce qu’il est plus confortable d’être celui qui décide où il va, plutôt qu’être celui qui va où il peut.

Une fois passé en mode « projet », il sera plus facile de se positionner comme « apporteur de compétences », image plus facile à vendre que celle de « victime collatérale d’une expérience entrepreneuriale,  en recherche de poste ».

« Je veux redevenir salarié… enfin, je pense… ». Certes.
Encore faut-il s’en convaincre avant d’essayer d’en persuader d’autres.

Car c’est là que se situe le point de départ de la stratégie à élaborer pour intégrer à nouveau le monde du salariat : démontrer que l’aventure « Patron » est terminée et que l’on est « véritablement prêt  » pour reprendre la casquette du salarié. Et que l’on est prêt à s’engager de nouveau parce que l’on a fait le deuil de l’expérience passé.

Si ce n’est pas le cas, le prochain entretien ressemblera plus à une nécrologie qu’à un éloge… les fantômes font rarement de bons candidats, les héros si.

Une autre étape importante est la réalisation d’un bilan objectif des actions et des résultats – positifs et négatifs – qui conduisent à postuler de nouveau.
Les motivations s’établissent mieux sur des faits, faire preuve de lucidité rassure.
Et comme on n’est pas obligé de vous croire sur parole, il est essentiel de savoir donner des exemples concrets et positifs qui étayeront votre envie de changer de casquette.

Reprendre la main, c’est être celui qui inscrit son « changement de casquette » dans la continuité de son parcours professionnel, en toute pertinence et en toute positivité.

Tuer le doute dans l’oeuf

« Patron un jour » rime assez facilement avec « patron toujours »….
Et il s’agit de démontrer que non, parce que c’est ce qui inquiète le plus.

…S’inspirer d’un slogan publicitaire récent: « Avant, j’étais Entrepreneur … mais çà, c’était avant ». [sourire]

En outre, on a un peu trop tendance à oublier que le fait d’avoir été patron a certes conféré un certain nombre de droits, mais a obligé également à certains devoirs (légaux, sociaux, professionnels). Et il ne faut pas hésiter à le souligner !

Certes, on a été autonome, décideur mais on saura également l’être moins.
On a su se plier aux règles du marché, s’adapter à la concurrence, convaincre le banquier? On saura tout autant intégrer une équipe, suivre des directives, et être un collaborateur efficace.

Un des enjeux majeurs est de valoriser expériences et acquis tout en trouvant le subtil mélange entre humilité et projection dans la fonction visée.
C’est être celui qui mettra d’emblée en avant les avantages à intégrer de nouveau une structure, en toute connaissance de cause.

Là réside peut être la différence entre un demandeur d’emploi et un porteur de compétences: ne pas céder à l’urgence  et au sentiment d’échec, mais définir une stratégie qui valorise l’acquis et l’expérience.

La première personne à convaincre et à rassurer, c’est donc soi. Si on ne se crédite pas d’un minimum de légitimité et d’à propos, il sera encore plus délicat pour les autres de le faire …

Et ensuite ?

Etre conscient que le virage est serré, et qu’en conséquence il ne sert à rien de vouloir aller vite sous peine d’aller trop souvent dans le mur.
De même que la décision d’entreprendre ne se fait pas sur un coup de tête … enfin, normalement… celle de retourner vers le salariat s’organise et se prépare d’autant plus.

C’est là qu’il peut être pertinent de se faire accompagner par des coachs ou des associations.
Grâce à l’élaboration d’une stratégie adaptée à la personne et au professionnel que l’on est devenu, on est en mesure d’aborder le marché du travail plus sereinement. Avec le sentiment d’être – au moins à ce niveau – maitre des situations que l’on se crée.

Retourner vers le salariat est donc possible.
De nombreuses entreprises actent que l’expérience se nourrit de succès mais également « d’échecs » et recherchent ces compétences propres à l’entrepreneuriat que l’on a acquises et développées.

Il faut donc s’accrocher.
Mais cela, l’ex-patron que l’on est sait le faire… et très bien même… !


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