Les présentations s’enchaînent et ne se ressemblent pas. Avant le début de son défilé, le couturier Zuhair Murad, petit protégé d’Elie Saab, se cachait dans un recoin de la salle, inspectant les rangs des invités et commentant pour quelques assistants l’arrivée du beau linge : quelques actrices, dont Mélanie Doutey enveloppée d’une charmante robe à pois noir et blanc ou Cyrielle claire dont la beauté, avouons-le, reste encore entière. Sur le podium, les mannequins portaient de l’or, de l’or… et encore de l’or – non ! il y eut une touche de ciel, dont la couleur a retenu toute mon attention. Vous l’aurez compris, chez Zuhair Murad, on parle de Golden Age (thème de la collection), de la réminiscence d’un faste traversé de spiritualité : que c’est beau. Devant tant de combi-pantalons ou de robes du soir en dentelles et soies, entièrement couvertes de sequins, les clientes outrageusement parfumées, en grande partie libanaises, applaudirent à tout rompre. Mais dans mon coin, je restai impassible, installé placidement entre les épaisses colonnes du salon impérial de l’hôtel Westin, feu Intercontinental…
Quatre jours, déjà, et la folle semaine de la Couture s’achève sur quelques présentations joaillières. Pour la plupart d’entre nous, le terme Couture évoque une image d’Epinal, de créations vaporeuses, toutes rebrodées de perles et de brillants, au point d’éclipser la femme qui les porte. Mais la nouvelle génération couture travaille avec acharnement sur l'élaboration de vêtements issus d'un laboratoire en fusion, dont les imaginations acérés revendiquent le devoir d’user de technologies de pointe, mais aussi de matériaux qui, a priori, sont plus faciles à trouver dans un entrepôt de construction que dans un salon d’essayage !Certes, réconcilier ces images n’est pas chose facile. Comprendre que plus qu’un spectacle, il subsiste désormais un espace certain pour des pièces artistiques tout droit inspirés de réflexions philosophiques confortent, toutefois, que la Couture est en pleine mutation. Une lente métamorphose opérante, qui repose désormais sur un discours, une histoire, une considération intellectuelle ou une vision futuriste et clairvoyante du monde… loin d’un défilé de robes, belles soient-elles, stériles d'éloquences.Fabrice Gil