Monnaie alternative ou rêve palliatif ?

Publié le 31 janvier 2013 par Idealmag @idealmag2
Les périodes de crise ont toujours été propices à l'émergence de monnaies locales. Depuis 2009, on ne cesse de les citer, de les compter, de les mesurer; elles remplissent les rapports en tout genre dans des bureaux de municipalités pour occuper des fonctionnaires à la bonne conscience, créant même parfois; miracle... un petit emploi au passage sur le siège de "trésorerie centrale expérimentale", un peu comme un banquier-banquière sans en être. "que dieu m'en garde"; se diront-ils... C'est bien... oui, c'est bien c'est sympa ! Soyons simples, brefs et francs... monnaie d'échange alternative ou pauvreté programmée ? Où avez-vous vu une vraie monnaie citoyenne locale et simple, éthique, qu'on peuisse trouver facilement, intégrer simplement, utiliser rapidement, en souscrivant sans complication d'aucune sorte; comme s'inscrire à une bibliothèque par exemple ?

Lors des dernières crises financières, il fallait une brouette de billets pour acheter son pain, tant la monnaie avait dévalué... Aujourd'hui, dernière crise en date, il faut des brouettes de rapports dans toutes les langues, tous les formats imaginables, pour arriver à comprendre si vous y arrivez, la lourde complexité de la dernière fabuleuse expérimentation alter-micro-monétaire, menée par un groupe d'inter-fédérations alternatives, elles-mêmes supervisées, sous l'oeil expert des commissions collégiales relevant des collectivités territoriales et alter-structures para-municipales, à coup de gros budget d'argent "vrai"; tant qu'à faire... C'est pas demain la veille qu'on trouvera à Paris, Toulouse ou Perpignan, sans faire de jaloux, une gentille monnaie locale pour acheter sa miche de pain. On a largement le temps de manger nos fonds de placards.

Au final, a-t-on le droit ou pas de lancer une monnaie locale ? Sera-t-elle oui ou non indépendante ? Qui peut l'accepter et l'échanger ? Comment l'organiser ? Sera-t-elle citoyenne pour une fois, et équitable ? Comment la protéger de la spéculation ? Qui décidera de son unité de valeur ? Et par quel moyen simple et rapide peut-elle se mettre en place ?

J'invite cordialement  les lecteurs à se plonger dans l'un de ces pompeux rapports pour trouver réponse à ses questions simples et évidentes ! Prenez votre souffle et installez-vous bien confortablement, vous en aurez pour un bout de temps. Non pas à lire, dieu merci, mais à digérer.

Mais que demande aujourd'hui le peuple ? Cessons de nous balader de rapports en exposés, de conférences en commissions, et passons aux choses sérieuses et basiques, c'est à dire : maintenant, ici et pour tous. La question est précisément de se débarrasser du pouvoir centralisant l'argent. Curieusement, on tente d'amorcer des initiatives de monnaies alternatives en reprenant tous les rouages administratifs de la monnaie dominante. Pour preuve; le mariage vu partout entre monnaies citoyennes et établissements bancaires. Plus drôle encore; leur conversion en euros ou dollars. Mieux ; l'achat de monnaie "verte" avec l'euro ! Elle est pas bonne celle-là ? Veuillez m'excuser, mais sa sent le "foutage de gueule à l'envers". Et dire que ce sont des alter-mondialistes ou petits élus "éco-solidaires" qui barbotent là dedans. Très fort...  Mes frères et soeurs : je vous l'annonce solennellement : nous ne somme pas rendus.

Précisément... ne nous rendons pas. Faisons cette monnaie locale, instaurons ce nouvel échange économique.

Remercions tout de même celles et ceux qui se sont prêtés aux expériences impulsées par les associations citoyennes, pour observer les grandes lignes, leurs orientations et résultats obtenus dans la mise en place de quelques monnaies locales.


Petite synthèse des monnaies locales expérimentées.

On compte environ 4000 monnaies sociales dans le monde; monnaies parallèles, locales, libres, communautaires… Tous ces dispositifs alternatifs visent à combler les manques des systèmes dominants; et pourrait-on rajouter, l'écrasant concept de l'argent dette.
  Les nombreuses innovations de modèles extrêmement variés

Depuis trente ans, les monnaies parallèles ont donné lieu à quatre générations de dispositifs :

-Les LETS (Local exchange and trading system) Monnaies non convertibles dans les monnaies officielles, généralement développées hors partenariats économiques avec les institutions bancaires et collectivités territoriales, et qui visent surtout des objectifs de convivialité communautaire ou locale.

-Les banques de temps, systèmes de lien social et d’entraide, souvent partenaires des pouvoirs publics, particulièrement les municipalités, ou avec des structures de l’économie sociale et solidaire, notamment les fondations. De ce fait, nombre de ces dispositifs emploient un ou plusieurs salariés.

- Le modèle "Chiemgauer allemand", qui vise à stimuler les activités économiques locales. Il fédère des monnaies papier, convertibles, dont l’objectif est de faciliter les échanges de biens et de services et qui peuvent bénéficier de partenariats avec les acteurs financiers locaux, comme au Brésil où ils ont été développés par et avec des banques communautaires.

Le modèle "multipartenarial", directement associé aux collectivités locales, comme le projet français "SOL", système complexe, multipartenarial, qui conjugue des objectifs économiques et environnementaux.

Quel est le modèle dominant en France ?

A Villeneuve-sur-Lot, s'est développé la monnaie "Abeille"; à Toulouse la monnaie "SOL Violette";  quelques projets locaux en Ardèche; dans la Drôme; à Chambéry;  Annemasse; etc… Mais le modèle le plus diffusé reste celui des "SEL", (Systèmes d’Echange Local). L’association SEL’idaire recense près de 400 SEL sur tout le territoire.

Les SEL et les LETS participent plus à la convivialité d’un quartier qu'à une monnaie locale et parallèle. Les "banques de temps" sont intéressantes dans le cadre de l’entraide sociale.

Cependant, force est de constater que les grandes crises traversées par l'Amérique du sud, comme l'Argentine par exemple, qui a vu naître quantité de monnaies locales, n'ont jamais trouvé de solutions réelles par ce genre d'initiatives, alors que leur société a tout simplement plongé malgré tout dans la misère et la pauvreté.

Cela  n'indique-t-il pas premièrement, que le concept de monnaie parallèle doit trancher radicalement avec les rouages administratifs et mariages bancaires ? En second lieu,  pourquoi  effacer le principe de valeur d'échange, simple, mathématique et logique ? Un pour un; deux pour deux; dix moins cinq. Où irons-nous avec des concepts "new age" qui n'osent pas parler d'argent dans l'échange, de chiffres simples et claires ? Nous parlons bien de "monnaie", et non d'un concept abstrait et timide qui n'ose pas dire son nom.


Quel est ce frein au développement des monnaies parallèles ?

La confiance est le fondement d'une monnaie, nous le savons toutes et tous. En matière monétaire, on pense généralement que la monnaie est affaire d’Etat, qui d'ailleurs laisse planer la menace de peines lourdes pour qui se rendrait coupable de le suplanter. En France, la moindre nouvelle alternative connaît d'abord et toujours la "crainte populaire" et au mieux le doute.

S'il est acquis que le citoyen instruit est aujourd'hui devenu civilisé, et souhaitons-le plus évolué, il doit être capable de sortir d'une monnaie de singe datant du moyen âge, instauré par de rusés manipulateurs, devenus banquiers ennemis des peuples. Mais personne ne saurait retirer à un peuple tout entier sa détermination à se relever dignement. Il nous faudra d'abord combattre nos pires ennemis, ceux de l'intérieur : l'ignorance et la peur.


Doit-on construire une monnaie locale “contre” la monnaie dominante ?

Que vise-t-on avec une nouvelle monnaie ? De la convivialité, du lien social, de la relocalisation, des échanges, un moteur à la consommation. Rien de tout cela n'entre en conflit de substitution aux monnaies institutionnelles dominantes, mais dans une logique de complément. Il s’agit de créer des modèles d’échange et de partage que la monnaie officielle est inapte à développer. Que l'Euro ou le Yuan demeurent, que le Dollar trépasse ou que le Franc renaisse, n'est ni un souci ni un obstacle.


La preuve que les deux monnaies peuvent cohabiter : 25 monnaies parallèles circulent en Catalogne.
 
La plus célèbre, l'Ecosol, est même associée à une très sérieuse boutique en ligne, un catalogue de 130 produits agricoles. L'achat est même possible sur Internet et dans une vingtaine d'établissements partenaires d'une coopérative dédiée. Ces ecosols, acquis par simple échange contre de la monnaie courante, côtoient d'autres devises locales, mise en réseau profitables aux tissus commerciaux locaux, sans marge bénéficiaire excessive, dans une philosophie sociale d'opposition à l'économie spéculative.

Bien... mais nous ne sommes qu'à la moitié du chemin.

Quelles seraient les différences fondamentales ?

1 - La décentralisation de la monnaie.

En étudiant de près le rapport de SOL VIOLETTE (initiative Toulousaine), 80% des SOL échangés sont consacrés à l'alimentation. C'est dire si le besoin fondamental de se nourrir doit pouvoir primer. Allez donc voir si votre banquier aujourd'hui sera sensibilisé par votre souci majeur de nourrir votre famille. Cette centralisation est bien la clé de voute du pouvoir bancaire, et il est indéniablement le grand responsable de la famine des peuples par sa domination et sa logique d'endettement.

Décentralisons la monnaie pour libérer son flux naturel. Pour cela tentons d'imaginer toutes les hypothèses, toutes les idées possibles, sans crainte ni honte. On peut tout imaginer, confronter nos idées, débattre et expérimenter sur le champ.

Non seulement la monnaie doit appartenir aux seuls utilisateurs, mais doit surtout être régulée par eux-mêmes, sur des critères de besoin et de valeurs d'échanges.

2 - La fausse valeur de l'argent ancrée dans nos mentalités.

Créons une monnaie basée sur des valeurs naturelles d'échanges et des liens sociaux.


Je trouverai intéressant que la valeur d'échange ne soit pas égale pour tous les actes. On s'épuise bien plus dans un travail d'ouvrier, et on trouve plus difficilement du travail,  alors qu'un médecin  s'épuise peu à prescrire des médicaments, d'autant que la clientèle malade n'est franchement pas difficile à trouver. Puis pourquoi ne pas gagner plus d'argent en travaillant dans l'entre aide et l'assistance, qu'en achetant et revendant des objets ? 

Des niveaux de valeurs différents, réajusteraient naturellement le déséquilibre actuel, où les petites mains parfois esclavagées sur une espérance de vie très courte et douloureuse, sont moins bien payées pour le même temps de travail qu'un banquier confortablement assis, pour des tâches qui ne relèvent pas du bien public, jusqu'à preuve du contraire.

Pour parer aux déséquilibres de gains, on pourrait faire circuler plusieurs catégories de valeurs dans un même réseau d'échange monétaire :
(U = unité)

-la valeur temps = (U x 3), monnaie produite en échange du travail accompli pour autrui,
-la valeur objet = (U x 1), monnaie produite venant de l'échange d'objets courants, objets d'art, et fabrication,
-la valeur nourrissante = (U x 4), venant de l'échange de produits et services alimentaires, bien-être et santé,
-la valeur solidaire = (U x 5), venant d'une entre aide, la plus forte valeur locale,
-la valeur savante = (U x 2), venant des activités d'enseignement.

Prenant la base actuelle approximative du tarif horaire de main d'oeuvre, 1 heure de temps de travail d'une monnaie locale équivaudrait à 10 unités, (comme 10 euros).

- Un acte de 4 heures de main d'oeuvre, serait calculé à 10 Unités x 4h  = 40 U ( X par la valeur 3)  = 120 Unités.
- Une vente de produits agriculture : 10kg x 2,50 U = 25 U (X par la valeur 4) = 100 Unités.
- Un acte d'enseignement : 4 heures de cours particuliers à 10 Unités x 4h = 40 U (X par la valeur 2) = 80 Unités
- Un acte d'entre aide solidaire ou humanitaire : 4 heures main d'oeuvre à 10 unités x 4h = (X par valeur 5) = 200 Unités

Ainsi, toutes les classes de la société pourraient échanger ces différentes valeurs de monnaie, en fonction de leurs liens et échanges sociaux, de manière plus juste.

3 - Une source inépuisable pour annihiler le poison "capital"
  Toutes ces monnaies pourraient être "imprimées" librement et donc fournies par chaque utilisateur, sans administration bancaire centralisée.

Comment ? Exemple :

-Tout le réseau local s'entend sur un choix de petits  formulaires de valeur (billets), échangés et complétés librement entre l'offrant et le demandeur.
-Pour chaque entente d'échange (tarif ou prix  global), le demandeur rempli le chèque imprimé du montant réclamé, (comme font les banques aujourd'hui sur demande d'un crédit).
-Cet argent est pris de nulle part. Il est accordé et inscrit selon la somme réclamée, notifiant l'acte, le nombre d'unités, le type de valeur, et la date.
-Ce chèque (monnaie) peut être échangé contre produits ou services.

Le principe élémentaire tiendrait du lien d'échange et du facteur local. La crédibilité des fonds tiendrait sur la traçabilité de ces liens, inscrits systématiquement sur les monnaies (chèques imprimés). Amasser cette monnaie n'aurait aucune utilité si elle était plafonnée à "tant de capital", devant obligatoirement tourner et être échangé dans un temps également limité (plusieurs mois ou années). De cette sorte, la richesse ne tiendrait plus sur la quantité, mais sur les liens sociaux et liens d'échanges.

Quel serait le capital de départ de chaque utilisateur, et comment l'attester ?  C'est bien l'une des questions qu'il s'agit de creuser jusqu'à sa solution idéale.

De nombreuses autres questions sont à creuser pour obtenir un système perfectible à souhait. Seul un large débat citoyen et démocratique permettrait d'initialiser une vraie monnaie locale, basée sur une philosophie d'échange plus équitable. Une fois des valeurs plus justes établies et une charte acceptée par tous, la nécessité d'un contrôle centralisé n'existe plus, étant articulé au sein d'un réseau "local" d'utilisateurs. Le moindre abus peut être ainsi localement et facilement tracé et repéré de tous. La dette et le crédit contracté au sein d'un établissement bancaire n'existent plus et on fait disparaître le manque.

Si cet article vous semble fou et totalement dénué de sens, ne vous retournez pas. Si en revanche, des questions ont besoin d'être soulevées, soulevez-les... Si vos connaissances ou compétences économiques pourraient aider à débroussailler certains recoins délicats, merci d'éclairer nos lanternes ! Participons, débattons, osons soulever les questions et faisons sauter les verrous d'un tabou, trop timidement approché jusqu'à ce jour.

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