Oui, mais quelle est la question ? de Bernard Pivot

Par Emidreamsup @Emidreamsup

« Pour mon malheur, le questionnement grâce auquel je me suis fait un nom dans la presse écrite, à la radio et à la télévision, s est étendu à ma vie privée. Je souffre d une maladie chronique que j appelle la questionnite . Son symptôme est évident, identifié de tous mes proches : je n arrête pas de leur poser des questions. Je ne peux pas m en empêcher. C est plus fort que moi. C est une seconde nature. Je suis en état de perpétuelle curiosité. Et de manque si je n arrive pas à la satisfaire. Je ne suis pas le type qui se contente d un machinal Comment vas-tu ? . Je veux savoir. Quoi ? Peu importe, je veux savoir. Toute personne détient de grands et de petits secrets qu elle n entend pas divulguer, mais que mes questions peuvent l amener à avouer. Il n y a pas d homme ou de femme sans double fond. Sans mystères, sans cachotteries, sans arrière-pensées. Moi, j en ai. Beaucoup. Heureusement, je ne suis jamais tombé sur un loustic comme moi qui vous bombarde de questions et qui, à la longue, devient insupportable. »
Adam Hitch est un journaliste dont la vie sentimentale est ravagée par son addiction aux questions.

L’excellent journaliste/présentateur/écrivain Bernard Pivot propose pour son dernier roman un titre qui lui ressemble :  Oui, mais quelle est la question ?

Roman ou autobiographie ? Telle est LA question que l’on se pose tout au long de ce récit. Adam Hitch est intervieweur. Rien que ce détail suffit à faire écho à l’auteur. Dès les premières lignes, on prend un malin plaisir à chercher les indices pouvant nous donner la réponse à LA question. Sans compter que l’utilisation du « je » se joue de nous.

Adam Hitch aime poser des questions… enfin non pour lui poser une question c’est comme respirer. Il ne peut pas s’en passer, même si cela complique sa vie privée. En effet, imaginez-vous vivre avec quelqu’un vous assommant de questions à longueur de temps… Flatteur et intriguant au début, on doit vite se dire qu’il est indiscret, étouffant voir épuisant.

Si cette questionnite aiguë est un calvaire dans sa vie amoureuse, pour son métier c’est une bénédiction. Cet aspect est tout aussi intéressant, même si l’auteur ne s’y intéresse pas plus que cela au final. Il privilégie la sphère personnelle à la sphère professionnelle. Si le roman se lit rapidement et que les interludes, consistant en des questions que Adam pose à Dieu, sont des petits bonheurs, j’avoue que j’aurais aimé qu’il s’arrête un peu plus sur son métier. A l’heure où les journalistes ont de plus en plus de mal à proposer des interviews intéressantes, sortant des sentiers battus, posséder le don de poser des questions vraiment intéressantes est un luxe. Sans avoir l’air d’y toucher, Bernard Pivot a soulevé en moi de nombreuses questions sur mon métier, mais aussi sur ma manière de vivre. Je me souviens que plus petite j’avais toujours envie de poser des questions, mais étant donné qu’il était mal vu d’être trop curieuse ou de déranger les autres, je les gardais le plus souvent pour moi.

Oui, mais quelle est la question ? possède une qualité indéniable qui est de décomplexer le curieux qui sommeille en chacun de nous. Un roman bourré d’humour et surprenant qu’il serait bien dommage de ne pas dévorer.

Ce livre entre dans le cadre du Challenge 1% Rentrée Littéraire 2012 de Hérisson.