Lundi 15 avril 2013 à 20h30, au cinéma Comoedia : Philociné « La Nuit du Chasseur »

Publié le 29 mars 2013 par Journal Cinéphile Lyonnais @journalcinephil

  Séance animée par Tristan Garcia (écrivain et philosophe)
autour du thème « Les âges de la vie »
Le site du cinéma comoedia

La Nuit du Chasseur
De Charles Laughton
Avec Robert Mitchum, Shelley Winters, Lillian Gish
USA , 1955, 1H33

Date de sortie 11 mai 1956

Synopsis : Un prêcheur inquiétant poursuit dans l’Amérique rurale deux enfants dont le père vient d’être condamné pour vol et meurtre. Avant son incarcération, le père leur avait confié dix milles dollars, dont ils doivent révéler l’existence à personne. Pourchassés sans pitié par ce pasteur psychopathe et abandonnés à eux-mêmes, les enfants se lancent sur les routes.

D’où vient le projet ?

Au début des années 1950, Charles Laughton (1899-1962), comédien anglais installé aux Etats-Unis, voit sa carrière décliner. Au cinéma, les succès des années 1930 (un oscar pour La Vie privée d’Henry VIII, mais aussi une prestation remarquée dans Quasimodo) sont déjà loin. Un jeune agent, Paul Gregory, le remet en selle : Laughton se refait un nom en lisant la Bible à travers les Etats-Unis. Jusqu’à décrocher la couverture de Time Magazine, en mars 1952. Le même Paul Gregory le pousse alors vers la mise en scène de cinéma. Il lui suggère de lire le roman à paraître d’un certain Davis Grubb : La Nuit du chasseur.

Cette histoire de faux prêcheur, séducteur et tueur de veuves, se déroulant pendant la Grande Dépression et située précisément là où l’auteur est né (Moundsville, Virginie occidentale), apparaît au comédien comme « un conte pour enfants cauchemardesque ». Laughton ajoutera, à la sortie du film : « Notre thème, comme celui du livre, est celui de la situation dramatique des petits enfants qui doivent apprendre que le mal apparaît sous de nombreux déguisements… »

Un hommage à David Wark Griffith

La Nuit du chasseur dépeint une Amérique rurale hors du temps (alors que l’histoire est sensée se dérouler lors de la dépression des années 30), proche de celle de David Wark Griffith. Le film est un hommage évident à son cinéma, en partie à travers l’actrice Lilian Gish, qui tourna dans un grand nombre de films muets du réalisateur.

Un soin tout particulier pour la photographie

Le traitement du noir et blanc oscille entre expressionnisme (l’ombre de Robert Mitchum envahissant la chambre des enfants) et réalisme (les scènes de Shelley Winters avec ses enfants). La photo est l’oeuvre de Stanley Cortez qui travailla aussi avec Orson Welles sur La Splendeur des Amberson.

Le seul film de de Charles Laughton

La Nuit du chasseur est certes le seul film de Charles Laughton, mais pas son unique expérience de la réalisation. Six ans auparavant, alors qu’il jouait l’inspecteur Jules Maigret dans L’ Homme de la tour Eiffel, l’acteur en réalisa une partie sans être crédité. Le producteur Irving Allen était le réalisateur originellement prévu pour ce film franco-américain. Mais après seulement trois jours de tournage, Charles Laughton menaça de quitter le projet si Burgess Meredith n’en prenait pas les commandes. Laughton dirigea quant à lui les scènes où Meredith jouait.

Peter Graves et Robert Mitchum

Peter Graves, qui joue ici le petit rôle du père truand des enfants, deviendra autrement plus célèbre une décennie plus tard, en incarnant Jim dans la série télévisée Mission : impossible.

Robert Mitchum a 35 ans au moment du tournage. Il consolide ici sa statuaire : solitaire, paupières lourdes, sourire ambigu, poitrine massive et timbre de voix mémorable. L’année suivante, en 1956, son arrestation et son emprisonnement pour détention de marijuana, loin de briser son aura, va au contraire asseoir un peu plus sa légende.

En 1991, un mauvais remake pour un grand chef-d’oeuvre

Ce film fit l’objet d’un remake en 1991 pour la télévision. Contrairement au film qui épousait le point de vue des enfants, le téléfilm se concentre sur le personnage du précheur incarné par Richard Chamberlain. Tout le monde s’accorde à dire que cette nouvelle mouture dirigée par David Greene ne parvient aucunement à égaler l’original.