L’immobilier atteint des sommets à Hong Kong

Publié le 11 avril 2013 par Copeau @Contrepoints

Hong Kong est classée parmi les dix villes les plus chères, au même titre que Tokyo, Genève ou Singapour. Dans les quartiers les plus huppés de l’île (Central, Causeway Bay), les prix peuvent atteindre 19 000€/m² et certains logements perchés sur le Peak (point culminant de l’île) peuvent atteindre 60 000€/m². Les prix de l’immobilier ont en moyenne augmenté de 150% entre 2005 et 2012. Quelles sont les raisons de cette hausse spectaculaire des prix ?
Par Guillaume Bazan.

On peut identifier trois raisons principales.

D’abord l’offre en logements à Hong Kong est largement freinée par le gouvernement hongkongais qui détient le contrôle de la terre (le régime de propriété est en leasehold comme en Angleterre) et délivre des permis de construire au compte-goutte. Le nouveau chef de l’exécutif de Hong Kong CY Leung (en fonction depuis juillet 2012) a promis de délivrer plus de permis et planifié des projets de rénovation des anciens sites urbains, mais ceci ne peut avoir d’impact sur le marché qu’à moyen terme. Cette promesse est d’ailleurs à double tranchant puisque la rénovation des sites urbains sera consacrée à la construction de logements sociaux pour les Hongkongais, ce qui risque de réduire l’offre du secteur privé et encourager ainsi la hausse des prix.

Il y a également une demande très importante et un phénomène de spéculation de la part des investisseurs étrangers, surtout de la part de ceux de Chine continentale. Ces derniers totalisent près de 15% des ventes totales de logement. Ce chiffre est encore plus important pour les appartements de luxe où ils représentent 30 à 40% des ventes. En effet Hong-Kong est une zone de placement vraiment intéressante pour les Chinois de la R.P.C. (République populaire de Chine). Même si Hong Kong n’est plus officiellement considéré comme un paradis fiscal, cette ville offre des conditions fiscales très avantageuses pour les Chinois. Hong-Kong est un des pays où les taxes sont les moins importantes au monde (15% sur les revenus, 5% sur la valeur locative du logement, 17,5% sur les bénéfices réalisés sur le territoire, 0% sur les bénéfices réalisés à l'étranger, pas de TVA) ; bien moins importantes qu’en Chine continentale. C’est donc la destination de rêve pour les Chinois qui cherchent à faire de l’optimisation fiscale ou avoir un pied à terre de luxe pour faire du shopping (la clientèle de luxe chinoise a une préférence pour le quartier de Tsim Sha Tsui). Certains investisseurs chinois sont enfin plus effrayés par la bulle immobilière en Chine continentale que par celle de Hong Kong et essayent de diversifier leur risque en investissant dans l’immobilier hongkongais, jugé « moins pire » que celui de Chine continentale.

La troisième raison est monétaire. Le plan de soutien à l’économie de 570 milliards USD dévoilé par le gouvernement de la R.P.C. en 2008 s’est traduit par un gonflement de la bulle immobilière d’abord en Chine continentale puis à Hong Kong – comme à chaque fois que les banques centrales injectent trop de monnaie dans l’économie (cf. crise des subprimes aux États-Unis).

La monnaie de Hong Kong, le Hong Kong dollar (HKD), est arrimée au dollar américain (USD) et fluctue en parité fixe avec celui-ci (1USD = 7,80 HKD). Comme le montre ce graphique, les taux d’intérêts à dix ans sont très bas depuis quatre ans (ils passent de 3% en 2009 à 0,5% en 2013). Ceci est dû à la politique monétaire de la Fed qui a lancé trois opérations de Quantitative Easing (QE) consécutives en 2008, 2010 et 2012 pour soutenir l’économie américaine (je doute personnellement que la reprise à laquelle on assiste aux EU depuis le second semestre de 2012 doive quelque chose à la politique monétaire de la Fed).

 

De plus, le taux de croissance réel du PIB (c'est-à-dire le taux qu’on obtient en retirant les effets de l’inflation au taux de croissance nominal du PIB) est bien plus important à Hong Kong qu’aux EU. Normalement le taux de croissance du PIB réel doit approximer les taux d’intérêts à dix ans. Mais comme ces taux sont tirés vers le bas à cause de la politique monétaire de la Fed, le fossé se creuse entre le taux de croissance du PIB réel à Hong Kong et les taux d’intérêts à dix ans du HKD. Mais il ne faut pas perdre de vue que le taux d’intérêt est une information, et que dès lors qu’il est faussé, l’information qu’il est censé pourvoir l’est aussi. Ainsi le régime de change fixe avec le USD maintient les taux du HKD artificiellement bas, ce qui encourage les investissements dans l’immobilier (puisque le coup d’endettement est quasi nul et la plus-value mobilière quasi-certaine, du moins jusqu’à l’éclatement de la bulle).