57 % de PIB : la folle poursuite de la dépense publique française

Publié le 08 juin 2013 par Copeau @Contrepoints

L'Etat français est drogué à la dépense publique, au point de tuer le secteur privé. A 57%, n'est-on pas tombé depuis longtemps dans le socialisme ?

Par Michel Albouy

Dépenses publiques en France : où est la baisse ?

La taxe à 75 % sur les salaires supérieurs à un million d’euros n’y suffira pas, les autres taxes non plus du reste ! Avis aux amateurs du plus d’impôts ! Le ratio de la dépense publique sur PIB devrait passer à 56,9 % en 2013. Ce chiffre peut paraître anodin et un brin technocratique pour tous ceux qui sont victimes de la panne de croissance et d’emplois (à commencer par les jeunes) de la France ; il révèle pourtant mieux qu’aucun autre chiffre la véritable situation économique de notre pays – et son orientation collective – drogué à la dépense publique.

Car là est véritablement le problème de la France d’aujourd’hui en ce début de 21e siècle. En effet, à ce stade de la dépense publique, on peut se demander si la France n’est pas en train de devenir un vrai pays socialiste, au sens – non péjoratif du terme – où l’essentiel de l’économie est davantage orienté par la dépense publique que par celle des décideurs privés (entreprises et ménages).

Comprenons-nous bien : 57 % du PIB est aspiré et refoulé – on n’ose pas dire géré – par la puissance publique dans l’économie. Deux questions se posent à cet égard : (a) dans quelle mesure l’aspiration marche bien (quid de la fraude fiscale et de la justesse de l’effort demandé aux cotisants ?), et (b) dans quelle mesure la répartition de la manne ainsi collectée est efficiente sinon efficace ? À ces deux questions, on peut être dubitatif. Voilà de beaux chantiers pour la Cour des comptes !

À noter que celle-ci s’est déjà penchée sur la dépense publique d’éducation et nous verrons si ses conclusions, pourtant édifiantes, seront suivies d’effets… L’État n’est malheureusement pas le seul en cause dans cette dérive de la dépense publique. Les collectivités locales ne sont pas en reste, ainsi que d’autres acteurs publics. Bref, le toujours plus de dépenses publiques est maintenant arrivé à son apogée et à moins d’infléchir sa progression, notre pays risque de s’appauvrir et le chômage s’aggraver.

Ce chiffre de 57 % relativise également le faux procès intenté de façon récurrente aux accusés d’un "ultra libéralisme" – qui pointerait également son nez à travers la Commission de Bruxelles –, toujours invoqué par les gardiens du temple du "modèle français" et grands supporteurs du toujours plus de dépenses publiques. La question, au stade où nous en sommes, n’est plus de savoir si on doit choisir entre l’économie de marché (le grand méchant marché) et l’économie administrée (le gentil administrateur public), mais de savoir si oui on non on va commencer à infléchir la courbe galopante de la dépense publique qui nous plombe tous, jeunes et vieux. Et cette question est moins sexy que les vrais-faux débats récurrents sur le plus ou moins d’État assaisonnés du rôle plus ou moins néfaste des marchés financiers sur l’économie.

Par ailleurs – et cela est bien le plus triste –, l’extraordinaire augmentation de la fiscalité sur les revenus des Français et les entreprises avec la présidence Hollande, que l’on croyait stabilisée en 2013 (mais qui devrait continuer son chemin en 2014 ?), ne devrait pas permettre de réduire notre déficit public et notre dette. Un comble pour tous les fonctionnaires de Bercy qui, armés d’une calculette financière, calculent – toutes choses étant égales par ailleurs – l’augmentation des impôts et taxes diverses de façon à équilibrer tendanciellement le déficit du budget à 3 % pour satisfaire à Bruxelles.

Tel Sisyphe, nos fonctionnaires de Bercy sont condamnés à un travail inutile et vain : celui de s’abrutir à rouler deux rochers (la dette et le déficit) éternellement. Car là est bien le problème : le raisonnement "toutes choses étant égales par ailleurs" ne tient pas, car il fait fi du comportement des acteurs. Que ce soit pour l’ISF, l’impôt sur le revenu ou celui sur les sociétés, les acteurs s’adaptent pour échapper à un État prédateur ; sans parler de la ponction réalisée sur le pouvoir d’achat des ménages, qui se répercute sur la consommation et qui impacte les recettes de TVA.

Et la rhétorique sur le patriotisme économique cher à nos édiles de droite comme de gauche n’y pourra rien. On devrait se souvenir à cet égard que la rhétorique de l’URSS qui vantait les mérites de l’ouvrier Stakhanov pour promouvoir l’ardeur au travail avec les résultats que l’on sait. Bref, l’incantation ne suffira pas à redresser la barre de notre économie et la dérive de nos dépenses publiques.

La dépense publique nous plombe. Voilà ce dont il faut être persuadé et nous devons en tirer les conséquences. Du reste, si elle était la solution, nous serions les grands gagnants de la compétition internationale ! Alors, pourquoi ne pas revoir nos dogmes ? La France a encore beaucoup d’atouts – mais pour combien de temps ? –, et il est encore temps de réagir. Mais pour cela il faudrait des décisions courageuses et baisser drastiquement les dépenses dans les secteurs non prioritaires pour notre futur. Mais cela signifie faire des choix difficiles politiquement, surtout pour un président de gauche et qui de plus a toujours privilégié la synthèse œcuménique au sein de son parti. Mais 57 % est-ce bien raisonnable ?
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Paru initialement sur Le Cercle Les Echos