Journées Internationale de lutte contre les Grands Navires

Publié le 09 juin 2013 par Oliaiklod @Olia_i_Klod

Il existe désormais une chanson de lutte contre les maxi navires de croisière dans la lagune de Venise, paroles et musique de Margot Galante Garrone.

"Par tera e par mar" : trois jours d’événement organisés par le comité No Grandi Navi qui se bat contre l’entrée des "gratte-ciel de la mer" dans notre lagune.

Retour sur la journée et la soirée de samedi :

A Sacca Fisola la vie continue son cours.

Les quais du canal de la Giudecca ont été décorés à l’attention des touristes, complices involontaires de la destruction programmée de Venise pour satisfaire la rapacité de quelques vautours.

Messages en plusieurs langues pour des gens qui ne comprennent que leur petit plaisir… quand nous voyons que des costumés vénitiens, qui prétendent aimer Venise, font ce genre de croisière, sans complexe, nous comprenons alors l’étendue compliquée des dégâts de la propagande populiste des ces compagnies mafieuses, dont aucune ne paie d’impôt sur les bénéfices, car toutes sont domiciliés dans des paradis fiscaux, font naviguer des bateaux sous pavillon de complaisances, et emploient de la main d’œuvre sous contrat signés dans des pays peu regardant sur le statut des travailleurs.

Le "village" s’est rempli et s’est animé, beaucoup d’organisation sont présentes pour ces trois journées, l’occasion de faire des rencontres réelles avec des ami-e-s jusqu’ici virtuels.

L’ambiance est familiale, beaucoup d’enfants, et, c’est étonnant, conscients des enjeux de ces trois jours et du danger que représente ces monstres des mers pour l’avenir de leur ville natale.

En face, un de ces monstres, justement, est là, tapis dans son repaire, crachant inlassablement dans l’atmosphère des volutes noires de fumées nauséabondes que l’on sent bien depuis ici. Il attends l’affrontement du lendemain et nous défie…

Comme nous vous l’avons montré hier, le camp est bien organisé, avec des zones identifiés pour chaque activité.

Toute la journée de samedi, les conférences et les débats se sont succédé, avec de nombreuses et nombreux intervenant (tout en italien, évidemment).

Nos lectrices et lecteurs ont même pu les suivre en direct live, grâce aux importants moyens techniques mis en place à Sacca Fisola. Vous pouvez revoir 1 heure 38 d’enregistrement de ces débats ici.

Nous avons particulièrement apprécié…

Les larmes du Professeur Tartara, le matin, quand il nous a démontré la nocivité des navires de croisière pour la lagune, qui, en frôlant les fonds vaseux, entraînent chaque année 1 million de mètres cubes de sédiments dans l’Adriatique.

Intervention du Professeur Tartara lors des Journées Internationale de lutte contre les Grands Navires le 8 juin 2013 à Sacca Fisola – Venise

L’intervention du Professeur Conti qui prône un tourisme absolument écologique dans la lagune qui, nous a t’il affirmé, est tellement détériorée, qu’il est nécessaire, désormais, de replanter les herbier sous marins pour reconstituer impérativement la flore perdue. Sans quoi la lagune de Venise deviendra dans un temps très proche un biotope complètement stérile, une sorte de mer morte, probablement même un dépotoir marin hostile à toute forme de vie.

Intervention du Professeur Conti lors des Journées Internationale de lutte contre les Grands Navires le 8 juin 2013 à Sacca Fisola – Venise

Revue de presse du dimanche 9 juin 2013 :

La presse, ce matin, commentait largement les journées de mobilisation et les réactions un peu partout dans le monde.

Le reportage de Berengo Gardin: "Ecco i mostri che sfregiano Venezia" (Voici les monstres qui laissent des cicatrices dans Venise)

Il s’est réveillé à cinq heures du matin pendant plusieurs semaines. L’objectif était de saisir les grands navires à leur entrée dans le bassin de San Marco et le canal de la Giudecca. "Volevo fotografare i mostri mentre arrivano, mentre fanno la posta alla loro preda", dit Gianni Berengo Gardin, l’un des photographes italiens les plus importants du quotidien  "Repubblica" qui a voulu dénoncer le massacre du passage des navires de croisière à Venise .

Le rapport complet sur ​​la "Repubblica", en vente, ce matin, en même temps que la Nuova Venezia.

Les photos de Gianni Berengo Gardin pour la "Republica":

Hier soir, notre ami Flavio Cogo nous reprochait d’avoir diffusé un article absolument mensonger, à propos de l’information que la questure souhaitait empêcher les manifestants d’accéder au port (article mis en ligne sur le site du Gazzetino par Paolo Navarro Dina).

Flavio Cogo, le samedi 8 juin, pendant les Journées Internationale de lutte contre les Grands Navires

Selon lui, cet article que nous avons publié est un faux, et la manifestation est autorisée.

Il y a eu aussi des questions parlementaires (du Sel et du Parti démocrate) pour demander le "respect de la liberté de manifester."

Effectivement, la presse locale, ce matin, insiste sur le fait que les autorités de Venise ne souhaitent pas revivre le traumatisme de septembre dernier (surtout que la justice a donné raison aux manifestants par la suite).

Un communiqué officiel précise même que "… pour protéger les manifestants et assurer leur sécurité contre toute tentative d’agression, l’itinéraire entre la piazzale Roma et le port de tourisme à Tronchetto sera libéré de tout obstacle pour assurer la liberté de manifester… ".

Le maire de Venise, Giorgio Orsoni, a salué l’initiative avec une déclaration "Il faut faire réfléchir les gens, il est temps de trouver une alternative au passage des navires en face de San Marco."

"Manifestazione faccia riflettere".

Giorgio Orsoni, actuellement au forum économique Italie-USA en cours au Lido de Venise a également déclaré : "La manifestazione che sarà promossa a Venezia contro il passaggio in Bacino di San Marco delle grandi navi da crociera «deve essere guardata con grande attenzione e presa per quello che vuole significare…"

Traduction de la déclaration complète : "La manifestation, qui se déroule à Venise contre le passage dans le bassin des grands navires de croisière de Saint-Marc doit être examiné très attentivement et prise pour ce quelle signifie. Si les vénitiens en sont arrivé  à organiser une telle initiative, c’est parce que, évidemment le problème se fait fortement ressentir à tous les niveaux de la population, ce qui devrait donner à réfléchir à ceux qui ont le pouvoir de décider. La Ville de Venise fera porter grand et fort sa voix dans cette affaire, parce que c’est une question que nous avons soulevé tant de fois et que j’ai porté à l’attention du gouvernement."

Bien avant 10 heures, ce matin, des centaines de personnes se sont dirigées vers la piazzale Roma.

Les participants sont venus spécialement, de partout dans le monde, y compris des intellectuels et personnalités culturelles telles que Nanni Balestrini, Ottavia Piccolo, Alex Zanotelli, Gianni Berengo Gardin et bien d’autres. Avec la présence de nombreux étrangers et de personnalités, la police ne peut plus récidiver dans des actions violentes comme par le passé.

Bloqués, les touristes sont obligés d’aller au port à pieds.

A 10 heures, beaucoup de monde piazzale Roma.

La circulation a été coupée, la voie est déserte… le cortège s’ébranle. Nous sommes des milliers !

Grâce à nos amis vénitiens, vous pouvez encore suivre la manifestation en direct !

Restez connectés !

C’est une manifestation à l’italienne, colorée, festive et très, très bruyante, beaucoup sont venus en famille.

L’accès au port est barrée par une nuée de policiers, boucliers en avant. Le journaliste du Gazzettino avait, raison, c’est bien la mafia qui commande en Italie et non pas la raison et le bons sens.

Il y a au moins 200 policiers et carabiniers en tenue de combat, une dizaine de fourgons et encore une fois un hélicoptère, pour empêcher une manifestation pacifique avec des enfants.

Les organisateurs tentent de négocier le passage, les policiers répondent avec des coups.

Voilà la belle image que donne l’Italie au monde entier, en direct.

Les manifestants ont décidé de former un bloc compact, impossible à pénétrer par la police sans faire des centaines de blessés. Il y a des moments d’extrême tension où l’on pense que tout peut arriver. Le face à face des deux blocs empêche désormais tout accès à la gare maritime…

On entends crier "non siamo contro il lavoro ma contro lo scempio della laguna" ou encore "in città benvenuti i viaggiatori, non i turisti" …

Les touristes eux, sont désormais complètement bloqués et, de toute manière, ne peuvent plus embarquer à bord du navire. Nous en profitons pour leur expliquer les dangers pour Venise et sa lagune, dans toutes les langues à notre portée.

Il semble que les policiers aient arrêté un manifestant, on ne sait qui, ni pourquoi. Cela fait remonter la tension d’un cran… des manifestants crient “servi! La polizia è dal lato sbagliato”.

Les deux blocs, compacts se font face à face, plus rien ne bouge… ni les manifestants …

… ni les touristes de la croisière dont personne ne se soucie vraiment et qui se demandent "partirons", "partirons pas"… bienvenue dans le port de Venise !

Alors que les hauts parleurs répètent les annonces pour inviter les pigeons à l’embarquement, un touriste français ose crier : "Égoïstes pensez à nous qui avons payé".

Quel con !

Fier d’avoir payé pour le destruction d’un joyau patrimoine de l’UNESCO. Quel dommage de ne pas savoir qui il est pour le prendre en photo et montrer au monde entier notre honte nationale…

Messeiurs les politiques, messieurs les croisiéristes, messieurs les gestionnaires du Port de Venise, voilà les images qui vont faire le tour du monde pour assurer la publicité de Venise sur la terre entière.