La sélection de la semaine : Promise, Calvin et Hobbes, Le Malouin, Anuki, Sortilèges, Macadam Valley et Nounours en enfer.

Par Casedepart @_NicolasAlbert

Pour cette dernière semaine de juin, Case Départ vous propose sa sélection d’albums de la semaine. Parmi ces dernières nouveautés, il y a pour vous quelques petites merveilles : un western haletant Promise, une réédition des aventures de Calvin & Hobbes, une histoire de pirates teintée de fantastique Le Malouin, Anuki le petit indien pour les plus jeunes, un conte fantastique Sortilèges, Une visite de la capitale de l’absurde Macadam Valley et un album sulfureux Nounours en enfer. Bonnes lectures !

Promise :

un western fantastique et terrifiant.

Le livre des derniers jours est le premier tome de la série Promise de Thierry Lamy et Mikaël. Ce premier album extrêmement prometteur, dont l’histoire est prévue en triptyque, est un western fantastique et d’épouvante. Dans un village reculé des Etats-Unis, un sombre prédicateur et son chien terrifiant viennent semer le trouble et le chaos.

Dans l’Idaho en 1864. C’est la fin de la guerre de Sécession, une période troublée, faite de massacres, de pillages, de chaos. Amos Laughton, révérend bossu, parcourt l’Amérique à la recherche de sa «Promise». Accompagné d’un molosse aux yeux d’un rouge sang, l’homme en noir prêche sa bonne parole à coups de sabre. Dans une première maison, il tue sans scrupules et avec férocité femme et enfant.

Isolé au pied des Rocheuses, le petit village de Promise est loin du théâtre du conflit fratricide, loin de la terreur, loin de tout. Promise semble oublié des hommes, de Dieu même. Près de la ferme familiale, la jeune Rachel, paisiblement assise et lisant, est terrifiée par le chien de Laughton. Mais il n’est plus dans les parages, le père de Rachel part à sa recherche dans le massif montagneux attenant. Le pasteur maléfique retrouve le père, fait attaquer son chien et le tue au sabre. En regardant le médaillon qui renferme une photo de la mère de Rachel, le révérant en est persuadé, c’est elle, c’est sa promise. Il décide alors de se fondre dans le paysage du village, convaincu qu’il pourra se rapprocher de la jeune femme.

L’arrivée de Laughton, qui prêche l’apocalypse et la venue prochaine d’un nouveau messie, va perturber la vie de la petite communauté qui tombe rapidement sous l’emprise de ce prophète de la fin des temps.

Le scénario malin de Thierry Lamy est très prometteur, il mêle les scènes d’action et de suspens. Très rythmé, le récit de ce premier tome pose bien les jalons pour comprendre la suite de l’histoire : les personnages quasi démoniaques que son Laughton et son chien, ainsi que la douce mais pas si naïve Rachel ou encore sa mère, aveuglée par les sermons du révérend. L’atmosphère pesante est elle aussi bien retranscrite grâce au trait anguleux et très abouti de Mikaël ainsi qu’avec ses couleurs sombres. Le dessinateur québécois, dont le trait est très assuré, utilise au mieux les cadrages serrés pour dépeindre la terreur sur les visages mais aussi les grandes cases pour illustrer au mieux les très beaux paysages enneigés de l’Idaho. Une série à suivre…

  • Promise, tome 1 : Le livre des derniers jours
  • Auteurs : Thierry Lamy et Mikaël
  • Editeur: Glénat
  • Prix: 13,90 €
  • Sortie: 19 juin 2013

Calvin & Hobbes :

une réédition en petit format.

Il y a des trésors partout ! est une réédition du 20e tome des aventures de Calvin et Hobbes, en français. La maison d’édition Hors Collection propose de (re)découvrir cet album dans un nouveau format, plus petit 17×22 et à un prix réduit 6,90€. La série fut créée en 1985 par Bill Waterson et fut arrêtée en janvier 1996, après avoir été vendue à 23 millions d’exemplaires dans le monde.

Dans ce tome, le lecteur retrouvera avec plaisir les personnages de la bande dessinée : Calvin, petit garçon américain de 6 ans, doué d’une réflexion digne des adultes, un poil mégalo, hyperactif, souvent sexiste, qui adore faire des bêtises et a beaucoup de difficultés avec toutes les formes d’autorité. Hobbes, tigre et ami de Calvin, il est pourtant le seul à le voir réellement ; les autres personnes ne voit en Hobbes, qu’un tigre en peluche. Mais aussi Susie, petite fille modèle de 6 ans, voisine, camarade de classe et souffre-douleur de Calvin. Le père de Calvin, qui n’a pas de nom, avocat à la ville, en course pour le titre de père parfait. La mère, elle aussi n’a pas de prénom, femme au foyer, elle a la lourde tache de s’occuper à plein temps de son fils, de lui faire prendre son bain et de le mettre au lit. Miss Wormwood, proche de la retraite, institutrice du jeune garçon dont elle doit subir les affres répétés et les mensonges. Et enfin Moe, camarade de classe, brute épaisse sans cerveau, qui passe son temps à terroriser les plus jeunes en les frappant.

Dans Il y a des trésors partout ! Calvin s’essaie au vélo avec plus ou moins de réussite, se pose des questions sur le fait d’apprendre à l’école, fait signer des contrats à son entourage, ne souhaite ni prendre de bain ni se laver les dents, a des difficultés pour écrire son exposé, essaie de rendre plus performant son cerveau, entretient une correspondance avec le Père Noël ou lance des boules de neige sur Susie.

Il est difficile de ne pas sourire et rire aux nombreuses bêtises et bons mots de Calvin. Le turbulent gamin nous émerveille toujours autant, comme il a pu émerveiller des centaines de milliers de lecteurs à travers le monde. Bill Watterson, couronné par l’Alph-Art du meilleur album étranger à Angoulême en 1992, profite de ses personnages pour critiquer la société américaine et même si les sujets reviennent fréquemment, il les décline toujours avec simplicité et franchise, pour le plus grand bonheur de son lectorat.

  • Calvin & Hobbes, tome 20 : Il y a des trésors partout !
  • Auteur : Bill Watterson
  • Editeur: Hors Collection
  • Prix: 6.90 €
  • Sortie: juin 2013

Le Malouin :

des pirates, un trésor, un génie.

Paru en 2008 aux éditions Emmanuel Proust sous le titre Oeil brun œil bleu, Le Malouin est réédité aux éditions Tartamudo. Augmentée d’un dossier historique sur les corsaires de Saint-Malo, cette fiction historique est teintée de fantastique. Alors que la paix avec les anglais règne sur les mers, la routine des corsaires du Royaume de France est rompue par l’apparition d’un génie qui leur offre 3 vœux à réaliser.

A la suite d’un accord de paix signé entre les royaumes de France et d’Angleterre, un navire corsaire est amarré au port depuis plus de deux ans. Aucune mission pour ces pirates qui commencent à s’ennuyer ferme sur leur bateau.et même leur capitaine, Roscoff déprime. Pourtant cette routine va être rompue par la découverte d’une bouteille où s’est logé un génie, Sharif Edin, cousin très éloigné d’Aladin des Mille et une nuits. Ce bienfaiteur leur propose trois vœux à réaliser et en contrepartie, Roscoff s’engage à le ramener en Mer Rouge d’où il pourra rejoindre sa ville natale.

Grimm Oyres, le sage, raconte à ses coéquipiers-pirates que Rackham le cruel a caché un trésor sur l’île de l’Espadon. Le djinn accepte alors de réaliser leur vœu, à savoir, débarquer sur cette île. Mais un autre équipage rôde sur les mers qui mènent à la fortune, celui de Jack raffle-Tout. Une véritable course s’engage alors entre les deux navires. Arrivés sur l’île, les deux équipages prennent possession des terres chacune de leur côté. Les habitants insulaires observent avec curiosité ce manège bien étrange. D’ailleurs, le chef du village est le petit-fils de Rackham le cruel. Une bataille acharnée commence alors pour l’acquisition du fabuleux trésor.

Tarek, scénariste de l’album Le concierge dont Case Départ vous a parlé il y a peu, met en scène une épopée au souffle épique, entre vérités historiques et imaginaire. Ce récit fantastique est d’une assez bonne tenue. Vincent Pompetti, dessinateur des albums La Guerre des Gaules et Raspoutine, apporte de la lumière à cette histoire grâce à des couleurs directes très abouties, à noter que quelques fois l’encrage est un peu trop marqué ce qui dénote un peu sur les très belles planches de l’auteur.

  • Le Malouin
  • Auteurs : Tarek et Vincent Pompetti
  • Editeur: Tartamudo
  • Prix: 15 €

Le petit indien Anuki chasse le lapin.

Anuki est un jeune indien débrouillard, joueur et surtout extrêmement attachant. Les histoires d’Anuki sont racontées par Frédéric Maupomé et Stéphane Sénégas ; le petit indien vit d’ailleurs sa troisième aventure : Le coup du lapin. Cette série talentueuse présente des bandes dessinées muettes, accessible à partir de 4 ans.

C’est l’hiver, Anuki et ses deux amis s’amusent dans la neige : glissades et construction de totem permettent aux trois jeunes héros de passer le temps. Au loin, les chasseurs du village partent à la recherche de proies pour pouvoir subvenir aux besoins des habitants. Pour impressionner son amie, le petit indien décide de partir chasser dans la forêt. Après une marche dans la neige, il observe un lapin et arme son arc, mais l’animal très rusé ne se laisse pas si facilement attraper. Alors que le lapin s’échappe, un loup rôde et pourchasse Anuki, qui terrorisé, entre dans une caverne sombre…

Le pari délicat de Frédéric Maupomé, à savoir de créer une bande dessinée sans texte et de bonne qualité pour les jeunes lecteurs, est merveilleusement réussi. Mêlant avec malice l’humour, l’action et le dynamisme, le récit du scénariste atteint tous ces objectifs. Alors que son héros doit dépasser ses limites, il se retrouve seul et apeuré, ce qui confère à cette histoire un petit suspens et une angoisse relative pour les tout-petits. Mais comme toujours, Anuki se dépatouille de situations très complexes. Le dessin de Stéphane Sénégas charmera les petits et les grands. Construit comme un long plan séquence cinématographique, l’album est illuminé par les cadrages originaux du dessinateur. La série Anuki, remarquée par les parents, les enfants et les professionnels, collectionne les récompenses. Elle a trouvé une belle place dans le paysage de la bande dessinée pour enfants et d’ailleurs, les éditions de la Gouttière ont réédité en mai avec L’école des loisirs le tome 1 d‘Anuki, dans la collection Mille Bulles.

  • Anuki, tome 3 : Le coup du lapin.
  • Auteurs : Frédéric Maupomé et Stéphane Sénégas
  • Editeur: Editions de la gouttière
  • Prix: 9.70 €
  • Sortie: 14 juin 2013

Sortilèges :

magie, fantastique et humour.

Le lecteur avait quitté Blanche d’Entremonde qui se débattait entre les assauts des ses ennemis et les méchancetés de sa mère; tandis que Maldoror, maître du Royaume d’En-Bas se débattait, lui, des manoeuvres de sa soeur Aldora pour prendre sa place. On retrouve, dans ce deuxième album de la série Sortilèges, de Jean Dufaux et José Luis Munuera, Maldoror en fâcheuse posture et Blanche se muer en véritable guerrière.

A Saint-Alban, Blanche est trahie par son cousin Saumure et son armée est battue; ce qui ne peut que ravir le Reine mère qui avait tirée les ficelles de cette subite trahison. Le royaume d’Entremonde doit alors abdiquer pour le prince. Mais la jeune femme n’est pas décidée à être vaincue, veut reconquérir quoiqu’il arrive son trône et découvrir qui a fomenté cette vile félonnie. La naïve et douce Blanche va alors se muer en une redoutable guerrière. Dans le même temps, dans le Royaume d’En-bas, tout n’est pas simple. Maldoror parti, c’est sa jeune soeur Aldora qui prend sa place.

Dense, le récit fantastique de Jean Dufaux est passionnant et dynamique. Si les destins de Blanche et Maldoror, dans le tome 1, étaient suivis en parallèle; dans ce Livre II, ils se croisent et se fondent pour n’en former plus qu’un. Magie, Moyen-Age, amour, trahison, prince, princesse, mère acariâtre, trône, guerre, tout est réuni pour que les fans de fantasy soient comblés. De plus, le scénariste s’amuse avec les clins d’oeil répétés à Disney (les miroirs pour la reine) mais aussi à Lewis Caroll, l’auteur d’Alice au pays des merveilles (la reine veut que les murs de son château soient repeints en rose) et l’histoire est truffée d’un humour second degré appréciable. José Luis Munuera, dont le trait est dynamique, permet à l’histoire prendre un relief grandeur nature. Les décors et les personnages sont très travaillés et méticuleusement choisis. Les univers moyen-âgeux et fantastiques lui réussissent bien comme il avait pu le démontrer dans les séries Merlin avec Sfar et Sir Pyle avec Morvan.

  • Sortilèges, livre II
  • Auteurs : Jean Dufaux et José Luis Munuera
  • Editeur: Dargaud
  • Prix: 14.99 €
  • Sortie: 7 juin 2013

Macadam Valley :

Bienvenue dans la capitale mondiale

de l’absurde.

Macadam Valley est le premier album de l’auteur belge Ben Dessy, où le cynisme et l’absurde sont le maître mot. Dans ce lieu intemporel et irréel, le lecteur croisera des personnages dont la fréquentation est peu recommandable. Sous leur dehors très lisses, se cachent des êtres humains cyniques et dont on envie peu l’existence.

En janvier 2012, l’auteur ouvre un blog délirant et drolatique, Macadam Valley, qui recevra un Golden Blog Award dans la catégorie BD la même année. Un éditeur, Même pas mal, lui propose alors de publier quelques-uns de ses meilleurs strips. Et c’est une petite réussite.

Macadam Valley, c’est la cité de tous les possibles, même les pires. Sous leurs airs « bonhomme », ses habitants vandalisent les conventions sociales, le sens commun et les valeurs familiales, bref tous les fondements du vivre ensemble à la mode. Du professeur Schnött, dont on connaît mieux les lubies psychotiques que le cursus universitaire, au shérif prompt à mettre une orpheline de cinq ans sous les verrous, Macadam Valley semble avoir été fondée par un architecte délirant pour accueillir des individus bien trop déjantés pour être pris en charge par la psychiatrie traditionnelle.

Jeune auteur de 25 ans, Ben Dessy, lauréat d’un diplôme d’art option BD et illustration, use et abuse de l’absurde et du non-sense. En quelques strips, il dynamite des situations très banales du quotidien. Parfois étranges, parfois fous, ses personnages sont délicieusement cruels et drôles.

  • Macadam Valley
  • Auteur : Ben Dessy
  • Editeur: Même pas mal !
  • Prix: 15 €
  • Sortie: juin 2013

Nounours en enfer :

un album underground sulfureux.

Les éditions Stara publient pour la première fois en français Nounours en enfer de Rory Hayes. L’auteur américain décédé en 1983 d’une overdose à l’âge de 34 ans fut révélé au public par Robert Crumb dans les années 60. Il entama une courte carrière, entre 1969 et 1975, dans l’univers du comics underground. Artiste controversé, il était considéré comme un auteur sulfureux et extrême. A travers 144 pages, ce recueil montre au public français ses bandes dessinées, il est agrémenté d’une biographie et de témoignages.

Nounours en enfer reprend les personnages d’ours en peluche que dessinaient dans leur enfance Rory Hayes et son frère Geoffrey (qui devint illustrateur pour la jeunesse). Dans la première partie de l’album, on découvre ses histoires d’horreur avec son ours Pooh, déchiqueté à la fin de chaque récit, des maisons hantées, des zombies et des monstres. Dans la deuxième partie, on découvre des récits sexuels extrêmes et enfin, dans la dernière partie, on découvre des récits mêlant l’horreur et le sexe. Nounours en enfer permettra aux passionnés de culture américaine underground de découvrir le trait tortueux et torturé de Rory Hayes, un des artistes majeurs de cet univers des années 70/80.

  • Nounours en enfer
  • Auteur : Rory Hayes
  • Editeur: Stara
  • Prix: 23 €
  • Sortie: 23 mai 2013