Versailles en voyage scolaire : rencontre avec Penone aux détours des jardins

Publié le 03 juillet 2013 par Lifeproof @CcilLifeproof

Fin mai j’ai fait un truc un peu fou : je suis partie rejoindre à Paris la classe des 6ième Doré du collège Rouget de Lisle de Schiltigheim. Leur prof est une amie, ceci expliquant peut-être cela ! J’ai donc fait ce que je n’avais plus fait depuis mon premier séjour à Paris alors que j’avais 10 ans : le Trocadéro, le château de Versailles, sa galerie des glaces, ses jardins et le Louvre avec La Mort de Sardanapale de Delacroix (l’une de mes œuvres préférées) ou La Joconde de Léonard de Vinci. Surprenant voyage !


Giuseppe Penone, Albero Porta-Cedro ou Arbre Porte-Cèdre, 2012. Bois de cèdre. © Giuseppe Penone

Quelque peu débordée avant de partir pour ce voyage, je n'ai pas vraiment eu le temps de préparer ce périple et c'est bien dommage, quoique... En effet, en arrivant au château de Versailles, j'ignorais que j'allais y voir des œuvres de Penone, l'un de mes artistes chouchous de l'Arte Povera. Dès l’entrée, nous avons vu une première œuvre s'intitulant Albero Porta-Cedro ou Arbre Porte-Cèdre et datant de 2012. Cette sculpture avait l'air d'être de Penone, les élèves se sont aussi demandés de quoi il s'agissait, je leur ai dit : « je crois que c'est une œuvre d’un artiste contemporain qui s’appelle Penone » mais je n'étais pas sûre (note pour plus tard : apprendre à se faire confiance), il a fallu faire le tour de l’œuvre, trouver le cartel pour avoir confirmation que la bonne surprise de cette visite était, pour moi, l’exposition de Penone à Versailles.


Giuseppe Penone, Spazio di Luce ou Espace de lumière, 2008. Bronze. © Giuseppe Penone

Giuseppe Penone, artiste italien, est l'un des chefs de file de l'Arte Povera qui se traduit par art pauvre et dont on vous a déjà parlé , ici ou encore . Il s'agit d'une attitude artistique née en 1967 qui a pour particularité de travailler avec des éléments pauvres tels de la toile de jute, des chiffons, de la terre, du bois, de la corde, du sable, des vêtements usés, etc. Les artistes tels Giovanni Anselmo, Michelangelo Pistoletto (on a d'ailleurs vu des œuvres de ce dernier dans les couloirs du Louvre le lendemain), Alighiero e Boetti, ou encore Luciano Fabro, Mario Merz, Piero Manzoni, etc. réutilisent souvent des objets qu'ils récupèrent et détournent de leur usage habituel. Ces artistes se sont aussi associés car ils souhaitaient, grâce à leurs œuvres, s’opposer au marché de l’art, à la conservation des œuvres et désiraient lutter contre la société de consommation dans laquelle ils vivaient (et dans laquelle nous vivons encore).


Giuseppe Penone. Premier plan: Spazio di Luce ou Espace de lumière, 2008. Bronze. Arrière plan: Tra Scorza e Scorza ou Entre écorce et écorce. © Giuseppe Penone

À Versailles, il y a peu d’œuvres à découvrir dans les salles, l'essentiel se trouve dans les jardins... Au début on voit la porte dont je vous ai parlé plus haut, ce tronc dans lequel un arbre semble pousser. L'artiste a évidé le tronc, en a gardé des éléments de telle façon à figurer une porte et il a sculpté un autre arbre à l'intérieur, un peu comme s'il s'agissait de l'arbre quand il était jeune, comme si Penone cherchait à nous montrer les diverses étapes de son développement. Giuseppe Penone travaille la plupart du temps avec des éléments issus de la nature ou, du moins, en parle.


Giuseppe Penone, Le Foglie delle radici ou Les feuilles des racines, 2011. Bronze, végétal, terre. © Giuseppe Penone

Que fut Versailles sinon une cage dorée pour nobles au 18ième siècle ? Il s’agit surtout d’un lieu où les aristocrates devaient se montrer et où l’apparence régnait en maître absolu dans les luttes de pouvoir qui s’y déroulaient. Ainsi, où l'aspect de l'ensemble se devait d'être grandiose et en mettre plein la vue afin de donner aux nobles l’impression que le roi était tout puissant et détenait tout le pouvoir… Se mesurer à cela, à cette architecture et à l'histoire de ce lieu, est-ce que c'est faisable ? Comment faire ? Depuis quelques années, le château de Versailles invite des artistes contemporains, les œuvres de Penone y seront visibles jusqu'au 31 octobre prochain. Penone, avec ses sculptures dans les jardins du château, dialogue avec ce dernier et son histoire : avec Spazio di Luce ou Espace de lumière, une sculpture en bronze de 2008, on voit l'intérieur d'un arbre évidé à l'horizontale, les bords intérieurs du tronc sont recouverts de doré comme si la lumière venait de l'intérieur et rayonnait ensuite. À Versailles, Penone présente des sculptures qui sont monumentales, elles parlent de la nature, de cette nature que l'humain détruit et qui finit toujours par reprendre ses droits. C'est le cas dans l’œuvre Le Foglie delle radici ou Les feuilles des racines (2011) : un arbre est retourné, mort en quelque sorte vu que ses racines sont tournées vers le ciel, mais, un arbuste y pousse, la vie se poursuit.

Avec ses œuvres, Giuseppe Penone montre que les choses changent, évoluent, que ce soit doucement ou rapidement, avec les artistes de l’Arte Povera, il expose la vie qui s'enfuit, le temps qui s'égrène et nous donne à voir l'impermanence de toute chose. Et, pendant ce temps là... Les élèves ont visité les jardins et rejoué le conte du Petit Chaperon Rouge, l'un des thèmes de leur voyage!

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« Penone Versailles »

11 juin – 31 octobre 2013, pour plus d'infos, c'est par là.

Cécile.