Itinéraire d’un auteur auto-édité

Par Bureaudestyle

(Photo DR) Juliette Merris, la bande dessinée « Il me manque quelqu’un »

Au départ, Juliette Merris était blogueuse et dessinatrice de BD.  Mais devant le succès remporté par son blog jeveux1bébé.com et la demande pressante de ses lecteurs pour que sorte enfin la BD, Juliette a été obligée de se jeter dans le bouillon de l’auto-édition et elle ne regrette rien.

Bureau de style : Avais tu déjà écrit et publié quelque chose avant cet album ?

Juliette Merris: Non, jamais. C’est faire l’expérience de l’inconnu, ajoutée à quelques courriels de lecteurs disant :  » À quand la BD du blog ?  » qui m’a grandement motivée à passer au papier.

Bureau de style : Qu’est-ce qui t’as donné envie de devenir auto-édité ?

Juliette Merris : Les râteaux des maisons d’éditions surtout !
Ceux que j’ai rencontrés m’ont donnés des conseils que j’ai appliqué et puis… Avec ou sans accompagnement, peu-importe, j’avais posé mon planning, envie de faire ma BD, de m’amuser avec cette histoire, pourquoi dépendre du bon vouloir d’un tiers ?

Bureau de style : Quelles sont les qualités d’écriture que doit avoir un auteur de BD ?

Juliette Merris : Parfois c’est un auteur qui fait tout : scénario, découpage, encrage, colorisation et texte. C’est le cas par exemple de Manu Larcenet que j’aime beaucoup. Parfois plusieurs auteurs se partagent ces étapes. Ensuite, il y a ceux qui réalisent deux planches par jour et ceux qui en font une par semaine. Dans tous les cas, c’est une affaire de plusieurs mois, la première des qualités est d’être un bon marathonien et ne pas s’arrêter quand on a mal aux cuisses.

Je me suis entourée pour vérifier la cohérence et la lisibilité de l’ensemble tout au long du processus de deux journalistes Béatrice koepfler et Mélissa alcoléa. Elles m’ont aidé pour les corrections de textes, la syntaxe, la fluidité du récit. Fabienne Saqué, Lisa Marcel Isirdi, graphistes et bédéphyles, pour tout ce qui est codes graphiques et découpage et enfin, deux blogueurs sur le même thème que le mien : humour et maternité, Marie Perarnau et Michael Garcini. Ils ont été les cobayes, je testais sur eux la mémorisation du lecteur. Par exemple, est-ce plus efficace d’introduire la construction d’une action dont la conséquence se situe en page 100, plutôt en page 50, plutôt 10 pages avant seulement, faut-il un rappel parce que l’écart de page est trop grand ? …

Une métaphore très belle pour symboliser les pensées du futur jeune père et le ventre de la mère…

Bureau de style : Quelles ont été tes principales difficultés dans cette démarche d’autoédition ?

Juliette Merris : Celle de ne pas m’arrêter en ayant mal aux cuisses ! Sans la reconnaissance des professionnels de l’édition, j’ai douté, j’ai eu envie de poser le crayon en me disant que je ferai bien mieux d’aller prendre le soleil plutôt que m’entêter sur un projet chronophage qui ne vaut rien.
J’ai aussi rencontré une difficulté au premier tirage où la qualité, le faconnage avaient des défauts. J’ai du rendre l’intégralité du stock et l’imprimeur aussi désolé que moi, de part le travail de son usine, m’a remboursé. J’ai du reporter la sortie, l’annoncer sur le blog. Je n’ai pas dormi de la nuit. À chaque tirage, je crève d’angoisse, je ne dors pas, c’est pénible.
Enfin, il y a eu un crash du site 24 h après l’ouverture des commandes histoire de me donner un nouveau petit coup de sang pour garder le rythme, n’est-ce pas !

Bureau de style : ton autoédition en quelques chiffres…

Juliette Merris : Écrire un livre ou une BD ne rapporte pas d’argent en dessous de 10 000 exemplaires vendus. Car pour tirer l’équivalent d’un smic par mois de travail en amont des ventes, il faut vendre beaucoup déjà dans le circuit classique. Imaginez donc en auto-édition ! Bien-sûr, il y a des exceptions. Je ne sais pas quand est-ce qu’on parle de succès.

Pour donner quelques chiffres quand même,soyons sincères, je n’aime pas en parler car c’est évidemment modeste par rapport au circuit d’édition classique.
Le coût de fabrication à été amorti en quinze jours et le tome suivant peut se financer sur le premier. Le mois de la sortie, j’ai passé 2h par soirée à faire mes envois. De la manutention pure que je j’avais pas prévue. Bien-sûr, je n’en espérais pas tant et je suis ravie.

* D’autres liens amis de Juliette Merris, en rapport avec la maternité/paternité : Michaël Garcini « papa cube » de trois petites filles ; Marie Perarnau teste tout pour les mamans ; Béatrice Koepfler, des chroniques sur le sujet.

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