Visite de la gare de Lyon ou comprendre l’histoire et le fonctionnement d’une gare (Paris 12)

Par Carnetauxpetiteschoses @O_petiteschoses

C’est avec le directeur de la Gare de Lyon lui-même que la découverte de la Gare de Lyon s’est déroulé, en arpentant des lieux accessibles au public, et d’autres ouverts seulement en certaines occasions (comme les journées du Patrimoine par exemple). Recueillir ses mots et son point de vue ont permis de mesurer à quel point la vie fourmillait dans ces lieux, l’activité dont on prend rarement conscience quand on y est, et tous les métiers de l’ombre à l’œuvre pour le bon fonctionnement des choses.

La gare depuis l’escalier du Train Bleu, « la ruche » et ses métiers

C’est en haut de l’escalier qui mène au Train Bleu, le restaurant réputé de la Gare, que l’on contemple « la ruche ». La vue sur le Hall 1 est impressionnante. Ça bourdonne, ça s’active, et ça court après le temps. Les trains arrivent sur les quais coordonnés avec le cheminement de l’aiguille de l’horloge.
En effet, la Gare de Lyon est la 3ème gare de Paris par son trafic, en comptant environ 83 millions de voyageurs par an. Elle dessert en particulier un grand quart Centre-Est/Sud-Est de la France (de Besançon, en passant par Lyon et jusque Montpellier), mais aussi l’international en assurant la liaison avec la Suisse et l’Italie, en Ile-de-France elle couvre la desserte du sud-est (Montereau, Montargis, ou Fontainebleau). C’est aussi la première pour les TGV Sud-Est, Rhône-Alpes et Méditerranée.


De ce point de vue, il est possible de voir l’activité insoupçonnée de la gare, celle à laquelle on ne fait pas attention quand on vient pour prendre son train. Au milieu de la zone d’attente, un camion de ravitaillement passe en direction d’un TGV pour alimenter sa voiture bar, une petite voiture traverse dans le sens inverse la salle, c’est le service nettoyage, un peu plus loin on discerne un homme en gilet orange qui ramasse au milieu de la foule, les détritus. On prend alors conscience de la quantité d’employés qui s’affairent dans la gare à cet instant précis.

Le Train Bleu

Menés au premier étage de la gare, un très bel escalier dit à « double révolution » qui encadre l’entrée du restaurant mythique de la Gare de Lyon, nous découvrons les richesses que recèle le fameux « Train bleu ». Appelé ainsi en référence aux anciens trains de luxe qui circulaient entre Calais et Vintimille (à la frontière de l’Italie) en passant notamment par Paris, il a été classé monument historique en 1972 par André Malraux.


En passant le seuil de la porte, la profusion de détails : moulures, dorures, peintures laisse un instant ébahi. Car style emprunte ses influences au baroque, au Second Empire mais aussi à la Belle Epoque. En effet, à ce jour, le Train bleu est un des lieux mythiques les mieux conservés du Paris des années 1900 et sa rénovation est prévue pour la fin de l’année. Construit pour l’Exposition Universelle de 1900, il dépeint sur sa quarantaine de fresques les étapes marquantes de la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée (PLM) et les événements de cette époque aux balbutiements du 20ème siècle. De nombreuses personnalités de l’époque se sont également inscrites dans son histoire, qu’il s’agisse de Coco Chanel, de Cocteau ou de Dali. Son restaurant gastronomique est réputé sert une cuisine traditionnelle française. Les larges baies vitrées offrent tout de même une vue sur la gare, l’intérieur comme l’extérieur est visible et donne un contraste intéressant au décor du restaurant.

Le hall 1

En redescendant dans le Hall 1, on prend conscience de la vie incessante de la Gare. On s’attache davantage aux différents métiers, aux conducteurs de voiturettes, et aux gens qui s’activent sans cesse parmi le flot de voyageurs.

Le directeur nous indique également la présence du train Thello, premier concurrent de la SNCF, qui propose de voyager vers Venise ou Rome depuis Paris. Thello est un opérateur privé créé en 2011 par Trenitalia et Véolia Transdev qui exploite les trains de nuit entre la France et l’Italie. Le quai dont il dispose se trouve à une extrémité de la gare et son design spécifique lui donne un style tout particulier.

La Galerie des fresques

En sortant du Hall 1, nous passons dans une salle qui est souvent foulée rapidement, sans être particulièrement regardée, à tort, car il s’agit de « la Galerie des Fresques ». Il s’agit d’une salle des pas perdus, ornée de peintures sur toute sa longueur, mais placées en hauteur. Le voyageur pressé ne prend pas forcément le temps de les observer, alors qu’elles représentent les villes desservies sur le trajet de Paris jusqu’à Menton dans le Sud. Chacune reconnaissable par un monument qui la caractérise. Datant de 1903, la série a été complétée dans les années 1980 par 10 nouvelles images dont les éléments semblent plus contemporains malgré le graphisme semblables aux autres. Actuellement en rénovation, ces peintures seront bientôt plus visibles.
Le directeur nous explique d’ailleurs comment l’art trouve aussi sa place de manière plus actuelle en gare. Sur les structures temporaires qui servent aux travaux, des panneaux proposent l’exposition d’œuvres ici photographiques. Né d’un projet entre Gares et Connexions (la branche « gares » de la SNCF) et les FRAC (Fonds Régionaux d’Art Contemporain) pour exposer dans plus de 40 gares françaises des œuvres contemporaines. Un instant, on ralentit le pas, et on s’attarde devant les images. Le fonctionnel s’orne alors d’esthétique.

Le centre opérationnel d’exploitation de la Gare de Lyon

Au bout de la Galerie des Fresques, le Directeur nous invite en silence à pénétrer dans les bureaux du Centre opérationnel d’exploitation. Centre névralgique de la gare, c’est ici que sont contrôlées et annoncées les entrées des trains, les incidents en tous genres (retards, pannes etc.) Nous pouvons jeter un œil au « plan d’occupation des voies » et observer ce qui se passe dans chaque écran sur le mur. C’est d’ici que part l’annonce des consignes ou des messages d’information qui sont diffusés sur les quais, c’est ici aussi qu’est fait le lien avec le poste d’aiguillage, ou c’est aussi d’ici que part l’info trafic.

Le Hall 2

Nous prenons un instant dans le Hall 2, dont les travaux ont été effectués ces 3 dernières années. Inauguré le 26 juin dernier, il donne un nouveau souffle à la gare, avec sa grande verrière lumineuse, et sa salle des pas perdus dans laquelle jouent les ombres. Dans la mezzanine on y trouve des commerces et des lieux pour se rafraichir ou prendre une pause. Joli lieu où observer la vie de la gare, on apprécie l’ouvrage flambant neuf.

La visite de la tour de l’Horloge

Puis on quitte le sol pour gravir les marches de la tour de l’Horloge qui s’élève à 67 mètres. Il est difficile de ne pas remarquer ce « beffroi » à l’extérieur de la gare qui se reflète harmonieusement dans les immeubles vitrés aux alentours. Il a été construit entre 1898 et 1900 et inscrit  à l’inventaire des Monuments Historiques depuis 1984.

Personnellement j’ai souvent observé ses fenêtres arrondies, et ses cadrans magistraux en passant à ses pieds. Ses cadrans font 6,5 mètres de diamètre, et ses fenêtres à croisillons offrent une vue imprenable sur Paris. La tempête du 26 décembre 1999 a brisé le mécanisme de l’horloge, et ce dernier a été récupéré et réutilisé comme support de table basse, et présenté dans la tour.

Plus l’on gravit les marches (au nombre de 400 tout de même !)  plus on découvre l’histoire de la gare au fil des époques grâce à une exposition qui se déploie sur différents niveaux accessibles par l’escalier en colimaçon. Des photos présentent ainsi la Gare de Lyon au temps de la vapeur, puis l’électrification et l’arrivée du TGV, jusqu’aux travaux entrepris dans les années 2000 : la reconstruction menée, notamment par la création de nouvelles halles, la démolition des anciens bâtiments, la rénovation de la halle historique et les travaux d’embellissement. La tour de l’Horloge elle-même a été rénovée depuis 2004 : sa façade en pierre de Valenge a été restaurée, le remplacement du vitrage existant par du vitrage feuilleté de sécurité a été effectué, et les ensembles métalliques ont été nettoyés. Les lieux seront bientôt entretenus régulièrement. Accessible uniquement pour de grandes occasions privées ou pour les journées du patrimoine (en septembre), la visite vaut le détour pour la vue qu’elle offre.

Du haut de la tour de l’horloge en effet, on découvre à la fois le parvis de la gare, où fourmillent les gens, les bâtiments des employés de la gare dont le bureau du Directeur que celui-ci nous indique, et au loin le rocher de Vincennes, une formidable forêt verdoyante qui surgit au milieu des immeubles haussmanniens, c’est le Parc des Buttes Chaumont, on perçoit à quel point l’emplacement de la gare est précisément dans le prolongement exact de la Bastille, à l’horizon se découpe le Sacré Cœur, puis en baissant les yeux les voitures paraissent semblables à des jouets.

 
Ici on prend le temps de la contemplation, seul ou avec les autres, jouant à reconnaitre les monuments, appréciant la lumière, et la vue si rare qui se présente à nous. Toutes les photos de notre visite ici

Une très belle visite, à faire si vous en avez l’occasion !

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