Chili, un recensement dans le vent

Publié le 16 août 2013 par Anthony Quindroit @chilietcarnets

Que reste-t-il du recensement 2012 au Chili ? Un parfum d’amateurisme…

A quelques semaines du premier tour de l’élection présidentielle au Chili (dont "Chili et carnets" parlait récemment), le président Sebastián Piñera aurait volontiers fait l’impasse sur une séance de contrition publique après un petit séisme mettant en cause l’administration chilienne.
Au cœur du problème, le recensement de 2012 (mais si, celui où des Chiliens militaient pour que "Jedi" deviennent une religion officielle). Loupé. Dans les grandes lignes. Aux orties les quelque $16.700 millones de pesos (environ 25 millions d’euros) déboursés pour ce qui devait être le recensement le plus moderne et le plus efficace qu’ait connu le Chili. Et encore, cette somme ne compte que les salaires.
Un million de personnes n’ont jamais été contactés et 600 000 autres n’ont pas répondu la première fois et n’ont pas été ré-approchées par la suite. Soit, 1,6 million de personnes qui auraient dû répondre et qui n’ont pas répondu (9,3% de la population du Chili)… Une paille !

  • "Dans chaque recensement, il y a forcément des omissions. Mais là, c’est au-delà du seuil recommandable", a reconnu le président Piñera, gêné aux entournures.

Dans un premier temps, alors que le vent commençait à tourner fin avril et que l’opposition évoquait une manipulation des chiffres, le directeur de l’Instituto nacional de estadísticas (INE), Francisco Labbé, a démissionné. C’était statistiquement assuré. Mais ensuite ? La décision n’est pas encore prise. Et l’on imagine mal Sebastián Piñera remettre l’ouvrage sur le métier avant de transmettre l’écharpe présidentielle.
Certains réclament un recensement allégé dans les deux ans alors que le Chili ne procède d’habitude au recensement que tous les dix ans environ. D’autres, à l’instar de MEO, pointent du doigt les sommes engagées dans ce fiasco. Autant de pierres dans le jardin de la majorité présidentielle que de pesos dépensés…
Tout est certes politique. Et les conséquences de ce ratage pèsent maintenant sur la campagne, chaque candidat étant appelé à se prononcer sur la question. La candidate principale ancrée à droite, Evelyn Matthei, assure qu’elle n’aurait aucun problème à lancer un nouveau recensement, tout en rappelant que la Concertación n’a rien fait "en vingt ans, pour améliorer le mode de fonctionnement de l’INE", tacle-t-elle.
La candidate principale de la gauche, l’ex-présidente Michelle Bachelet, se déclare, elle aussi, ouverte à un nouveau sondage de la population, une fois la lumière faite sur les erreurs de 2012.
Pour cela, le Chili se tourne vers des experts analystes. Une première fournée de spécialistes va se poser à Santiago dès ce lundi 19 août, selon le journal El Mercurio. Il s’agit de sommités de la Banque Mondiale. Eurostat – un organisme en charge des statistiques pour l’Union Européenne – est également sur les rangs. Une commission d’enquête a également été créée au Chili pour entendre les différents intervenants, dont Labbé qui sera auditionné ce lundi.
En attendant les résultats – et les décisions !-, l’INE remanié prône l’utilisation des chiffres de la projection démographique et de réaliser un recensement abrégé, ce qui pourrait être réalisé à l’horizon 2015, sur une journée seulement… L’INE préconise aussi une préparation accrue du recensement de… 2022 en prenant exemple sur ce qui se fait à l’étranger : une utilisation plus prégnante des nouvelles technologies à la place du porte-à-porte. Il ne manquerait plus que l’informatique fasse des siennes…