Des Amours, de Tchekhov aux Arènes de Montmartre (Paris 18)

Publié le 09 septembre 2013 par Carnetauxpetiteschoses @O_petiteschoses

Par la Compagnie des Moutons Noirs, pendant le Festival itinérant Tréteaux Nomades

Pour la fin de l’été, le théâtre faisait son festival, proposant d’investir des lieux peu connus et ravissants, comme scènes improvisées. Le Festival des Tréteaux Nomades invitait ainsi pour sa 14ème édition, plusieurs compagnies, pour jouer des pièces de théâtre burlesque ou musical, des spectacles forains ou de la Commedia dell’arte. Proposées à des tarifs très abordables, ces manifestations originales sont destinées à mettre en valeur les lieux historiques tout en faisant découvrir des textes de choix.

J’ai porté le mien sur 3 farces de Tchekhov, pour la pièce intitulée “Des Amours”, donnée un dimanche grandement ensoleillé dans les Arènes de Montmartre, que j’étais impatiente de découvrir.

C’est en haut du funiculaire que l’on entrevoit les fameux escaliers escarpés qui grimpent au  Sacré Coeur. En descendant une première salve de marches, on aperçoit une entrée entre deux étroits petits murs de pierre. Lorsqu’on se promène à Montmartre on voit rapidement cet espace, de pierres et de verdure, dans lequel on discerne quelques pieds de vigne. Loin de nous de deviner l’existence de véritables arènes, espace de spectacle plutôt privilégié.

C’est dans ce lieu insoupçonné que nous avons pris place, colorant et animant la pierre des gradins. Sur la scène, un comédien et une violoniste esquissant une mélodie.

La Compagnie des Moutons Noirs réussit en quelques minutes à transformer le lieu et le temps, pour nous emmener sans détours en Russie. Donnant corps au texte savoureux de Tchekhov, les comédiens talentueux nous entrainent dans leur phrasé et dans leur jeu.

Mêlant les détails typiques de la Russie de l’époque (le sens du respect de la hiérarchie sociale, les manières procédurières de faire, le poids de l’administration) soulignés par les accessoires et les costumes (bien chauds pour ces conditions météo !) avec les formes de jeu très spontané emprunté à la Commedia dell’arte, le texte devient accessible à tous, et fait mouche. Le public réagit, rigole et s’amuse de ces situations cocasses et comiques. Le format des pièces est concis et va à l’essentiel, laissant le spectateur sur une très bonne impression.

La première piécette, la Demande en mariage, met en scène un jeune homme venu faire sa demande à la jeune femme et à son père. La situation vire pourtant rapidement au drame, à cause de divergences d’opinions irrépressibles, que chacune des deux parties ne peut retenir davantage. La farce éclate alors dans sa plus belle expression, le public apprécie et participe. A la fin de cette première pièce, les comédiens offrent de manière très simple et conviviale un verre de cidre à l’assemblée.

La pièce se poursuit par “Les méfaits du tabac”, un monologue truculent donné par un vieil homme dominé par sa femme, qui le commande. Obligé par elle de s’entretenir avec nous sur un sujet qu’il ne maîtrise pas, le tabac, il procède par digression et finit par se confier. Les méandres de l’écriture provoquent des situations hilarantes. On s’amuse de son personnage et de la tournure de sa soit-disant conférence.

Enfin, “l’Ours”, présente un homme bourru et brute, venu demander à une jeune veuve de l’argent dû par son défunt mari. Au fil de leur échange qui se transforme en affrontement, puis en déclaration de duel, l’homme cède peu à peu au charme de la belle. Ils tombent enfin éperdument amoureux, contre toute attente et ratifiant leurs propos forts intéressant sur le couple.

La pièce s’achève et c’est un succès. La brièveté du format, le jeu et les comédiens vraiment hilarant incarnent à merveille la Russie de Tchekhov, actualisant son propos sur des considérations métaphysiques qui traversent le temps. 

A seulement cinq sur scène, ils nous font voyager, quittant un instant Paris, et revenant à Montmartre en ce lieu magique que sont ses arènes.

A surveiller : les prochaines manifestations aux Arènes de Montmartre
A guetter pour l’année prochaine : le Festival des Tréteaux Nomades
A suivre : La Compagnie des Moutons Noirs

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