Crime d'honneur d'Elif SHAFAK

Par Jellybelly

C'est en 2008 (et oui déjà !) que j'avais découvert, avec plaisir, la plume d'Elif SHAFAK grâce à la lecture de "La Bâtarde d'Istanbul".

Je me suis donc laissée tenter par celle de son tout dernier roman : "Crime d'honneur" et ce fut une nouvelle fois un très beau moment de lecture.

Je vous livre le 1er paragraphe de ce roman : "Ma mère est morte deux fois. Je me suis promis de ne pas permettre qu'on oublie son histoire, mais je n'ai jamais trouvé le temps, la volonté ou le courage de la coucher par écrit. Jusqu'à récemment, je veux dire. Je ne crois pas être en mesure de devenir un véritable écrivain, et ça n'a plus d'importance. J'ai atteint un âge qui me met davantage en paix avec mes limites et mes échecs. Il fallait pourtant que je raconte cette histoire, ne serait-ce qu'à une personne. Il fallait que je l'envoie dans un coin de l'univers où elle pourrait flotter librement, loin de nous. Je la devais à maman, cette liberté. Et il fallait que je termine cette année. Avant qu'il soit libéré de prison."

Esma, la narratrice, une jeune femme kurde, vit à Londres, en 1992, lorsque le roman est écrit. Au gré des souvenirs, elle déroule progressivement le fil de la vie de toute la famille depuis 1945.

Par le biais de cette épopée familiale, Elif SHAFAK aborde la question de l'immigration bien sûr, des souffrances liées à l'exil, des différences culturelles et de l'attachement tout particulier au pays d'origine. "Le pays natal restait immaculé, un eldorado, un foyer où se réfugier, sinon dans la vraie vie, du moins en rêve." (p. 94)

Elle aborde la condition féminine à travers trois générations de femmes, des femmes qui restent soumises aux traditions ancestrales et pour autant confrontées à l'évolution de la société.

Elle évoque les traditions et s'attarde sur la question de l'honneur familial, cet honneur qui ne doit être souillé sous aucun prétexte, au risque de justifier un crime, en référence au titre du livre.

C'est un roman très dense dans lequel Elif SHAFAK donne des respirations avec des passages écrits par Iskender, le frère aîné d'Esma, emprisonné à Shrewsbury. C'est un moyen original de permettre le regard croisé de deux personnages de ce livre, deux regards portés sur des réalités quotidiennes.

Ce roman a reçu le 36ème prix Relay 2013 : http://prixrelay.com/book/crime-dhonneur/

Je vous le conseille !

Annie