Guillaume Apollinaire - Le Verger des amours

Par Ruedelapoesie @ruedelapoesie

L'amazone au con mercenaire
Que je nommais Félicité
Me violant à la cavalière
N'arborait pour seul bouclier
Que le sein coupé des archères 
A l'aurore au petit matin
Livrée au songe et au mensonge
Ouverte aux baisers clandestins
Sa moniche couleur d'oronge
Evoquait un cratère éteint
Ne prenez pas la Suisse assise
C'est la parole des écus
Qu'un prestidigitateur brise
Prenez-la plutôt par le cul
Tout heureuse de la surprise
A Vevey j'ai vu s'empourprer
Les joues de tes fesses confuses
Quand le carnaval diapré
Les coiffa si je ne m'abuse
D'une moustache et d'un faux-nez
On en dispute encore à Rome
Où les masques sont interdits
Rosette ô peccatum mutum
Dans le vase où rien n'est permis
Passaient les rouliers de Sodome
Ma belle enculée ma Suissesse
Ton oeillet s'est enamouré
Au souvenir de ma caresse
Mon amour sachons distinguer
L'hérésie d'avec la mollesse
Automne pareil à l'automne
Te souvient-il du lit défait
Où j'ai vu s'ouvrir l'anémone
Qui fleurissait ton corps parfait
O toi que les pampres couronnent
Dans le jardin les violiers
Dégageaient cette odeur exquise
Qu'ont aussi les mots familiers
Et ton yoni où le poil frise
Quand mon désir le fait briller
Adieu la valse et la matchiche
Les lorettes exténuées
Sorties de l'école des Biches
Les amoureux qu'on a tués
De leurs baisers n'étaient pas chiches
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