Deux beaux acteurs au service de la poésie de Pirandello...

Publié le 28 septembre 2013 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

Au Studio-Théâtre du Français, le sociétaire Michel Favory, à l'initiative du projet, et le pensionnaire Louis Arene, ici acteur-metteur en scène, proposent un travail humble, évident et envoûtant autour de "La Fleur à la Bouche", de Luigi Pirandello, courte pièce adaptée de l'une de ses nouvelles nous interrogeant avec grâce sur la vie et la mort. Deux extraits du "Guépard", roman de Giuseppe Tomasi Di Lampedusa, intégrés en début et fin de représentation, prolongent  judicieusement le propos de ce spectacle d'une heure à peine, séduisant et touchant.

La nuit, deux individus dans le café d'une gare. La conversation s'engage. Un échange courtois et anodin qui rapidement gagne en gravité. En effet le premier, atteint d'un mal incurable (une tâche en forme de fleur au coin de la bouche), confie au second comment il nourrit de sens, d'intensité, de joie, les quelques semaines qui lui restent, tente de se fondre dans le moindre souffle de vie de ses contemporains, scrute ce qui fait le sel, la beauté, la magie de l'existence et la rend si précieuse. Il semble ainsi ouvrir les yeux à son interlocuteur d'un soir qui n'avait peut-être pas tout à fait conscience de la fragilité et de l'exception de ce bien éphémère...

Une scénographie épurée, sculptée de lumières minimalistes, place les protagoniste dans un clair obscur hors du temps, énigmatique, onirique. Michel Favory est un mourant merveilleusement vivant. Sa voix puissante, sa respiration singulière, et sa diction remarquable enivrent, tandis que ses rires fréquents, emplis d'un désespoir heureux, se révèlent bouleversants. De son côté Louis Arene campe avec une infinie subtilité un être distrait, fatigué, peu réceptif à ce qui l'entoure, jusqu'à ce que le discours et l'attitude de cet homme ne l'interpelle. Parce que l'un et l'autre sont masqués, chacun de leurs gestes, se substituant aux expressions du visage impossibles à transmettre, prend une étonnante dimension. Les silences sont forts. Complicité et  écoute transpirent généreusement de ce qui nous est donné à voir. Poignant face à face.

Dans l'interview qu'il nous accordait il y a quelques jours, le metteur en scène qualifiait l'oeuvre de Pirandello de véritable hymne à la vie. Nous avons quitté la salle avec la ferme intention de continuer à en profiter pleinement.

Merci.

Jusqu'au 3 novembre.

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Photos : Brigitte Enguérand