African tabloïd, de Janis Otseimi

Par Goliath @Cayla_Jerome

Dans les arcannes du pouvoir politique on travail ferme, au moins autant que dans les bidonvilles de la capitale. Rien d‘extraordinaire à cela puisque chacun cherche à améliorer sa condition, sortir des ruines de l’état l’ayant vu naître. Entre ces deux mondes existent des liens fragiles que tentent de dénouer des policiers étranglés entre la pression d’en haut et le l’apiration d’en bas. Ils doivent cultiver l’art du moindre mal, du compromis permanent afin de faire respecter le droit des citoyens à une justice honnête. Le manque de système informatique, la paresse clientéliste joue pleinement son travail freinateur dans les recherches judiciaires, dopant le moral des OPJ en quête de vérité, ravissant le lecteur par des rebondissements surprenants. Durs souvent, mais également tendres car les hommes dépourvus de sens commun sont aussi des amants et des pères : messieurs-tout-le-monde au grand jour, adeptes de la truanderie au tombé de rideau.

Chaque nouveau livre de Janis Otseimi est une nouvelle aventure pour le lecteur, un régal pour ceux qui aiment le jeu de la langue, le polar noir, les voyages en terres inconnues. Il brode ses livres avec la gouaille jubilatoire d’un titi parisien, l’argot de Mesnil-Montant — langage parlé des truands nord-parisiens en début de XXème siècle — auquel il ajoute le librevillois des bas quartiers gabonais forme un tout singularisant l’unicité de son travail d’écrivain. Les polars de Janis Otseimi sont à nul autre comparable, noir et frais, violent et tendre à la fois.

Un polar, certes, mais un livre riche d’enseignements ! Janis Otseimi réécrit la langue française à sa manière selon son d’habitude, mais pour une fois, se fait aussi pédagogue en nous expliquant le pays qu’il affectionne tant : il dénonce la corruption africaine endémique verrouillant l’avancée de la démocratie, mais n’oublie pas d’endosser le rôle d’historien afin de nous expliquer le Gabon, avec son défaut cruel de moyens et ses luttes tribales. Il se risque même sur la pente sensible du rôle colonial de l’occident sur son continent : sujet éminemment controversé selon l’appartenance géographique du lecteur. Ce qui est remarquable chez lui, c’est la synthèse qu’il en fait. Janis Otseimi fait la part des choses entre l’apport palpable et le dictat de la pensée occidentale sur la coutume séculaire qui reste la colonne vertébrale de son continent : plus la pente est raide pour s’élever, mieux l’on se conforte dans la tradition.

4ème de couverture

Libreville. 2008. Un an avant les élections, un type est retrouvé mort sur une plage de Libreville, près du palais de la présidence de la République, une balle dans la gorge et deux doigts de la main gauche coupés. La victime est un journaliste d’investigation connu pour ses enquêtes très sensibles sur le pouvoir dont il dénonçait la corruption et la main mise sur les affaires du pays. Pour la corporation, la société civile et les associations de défense de la presse, il s’agit là, à l’évidence, d’un assassinat politique. Mais à Libreville, comme partout ailleurs en Afrique, les apparences sont souvent trompeuses…

 Détails sur le produit

  • Broché: 208 pages
  • Editeur : Jigal (12 septembre 2013)
  • Collection : Polar
  • ISBN-13: 979-1092016079
  • ASIN: B00ESJ5DHE
  • Dimensions du produit: 19,4 x 12,4 x 2 cm

L’auteur (source Jigal)

 (source photo : Encre noire)

Janis Otsiemi est né en 1976 à Franceville dans la province du Haut-Ogooué au Gabon. Il vit et travaille aujourd’hui à Libreville. Nourri à la double source du polar français, « auquel il emprunte le goût de l’argot, de la marge, de la description sociale » et du polar américain « pour la vision sombre et pessimiste du monde ». Janis Otsiemi brosse dans ses romans et avec une belle vitalité un tableau dont la noirceur n’a d’égale que la dureté… De Bamako à Saint-Malo au festival Etonnants Voyageurs, Janis Otsiemi est devenu en quelques romans d’exception un des ambassadeurs avisés du polar de la brousse – tendance social et urbain. Son roman La Vie est un sale boulot paru aux Editions Jigal a reçu le Prix Gabonais du Roman 2010.

Comme il aime à le dire lui-même, Janis OTSIEMI est entré dans le polar par effraction. Sauf qu’en trois romans, il est devenu un maître du genre, un des talents les plus remarqués du polar africain actuel. « Sec et corrosif, il entrecroise les intrigues, et de ce bourbier se dégage une odeur de décomposition qui vous prend à la gorge, une odeur que seul savait faire naître Chester Bomar Himes… » Dans AFRICAN TABLOID Janis OTSIEMI entend secouer le cocotier local avec une vigueur régénératrice, mais aussi avec un humour épicé, un savoir faire de vieux loup de mer et une dérision jouissive… Il dit écrire pour rendre la minorité visible et lui donner (un peu) la parole… Il n’a pas oublié d’où il vient, du ghetto, il n’a pas oublié ses potes qui lui demandaient alors d’écrire pour eux. Depuis c’est devenu une des raisons d’être de ses polars. Ses polars qui sentent comme là-bas la sueur, le shit et le sang chaud mais aussi la corruption, l’injustice et l’abus de pouvoir permanent… C’est sombre et poisseux comme une nuit africaine… AFRICAN TABLOID est un polar sacrément écrit par le talentueux Janis OTSIEMI qui donne des ailes à cette langue que nous avons en partage, qu’il réinvente et dont il nous régale à chaque page… C’est une vision acide et désenchantée de l’Afrique… Tour à tour jubilatoire, sensible, ironique, mordante… mais toujours sans aucune complaisance ! « À Libreville, où il a grandi, dans un « matiti », un ghetto, il a puisé dans ce chaudron la substance de ses romans noirs. » © MARIANNE. Janis OTSIEMI est une sacrée découverte, un auteur riche, dense, habité, au style fort et inimitable !

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