[Culture] Les Bôsôzokus

Par Yomigues @Yomigues

Ce mot ne vous est peut-être pas familier et pourtant, tous les fans de manga et de Japanimation connaissent un Bôsôzoku : Eikichi Onizuka. Beaucoup d’œuvres relatent les aventures de Yankees ou de Fûryo (jeunes voyous), mais très peu se penchent sur le sujet des Bôsôzokus qui se limitent souvent à de brèves apparitions. Nous allons donc tenter de découvrir d’où provient ce mouvement et ce qu’il cherche à véhiculer.

Un film, un club


Commençons par décomposer ce mot: « Bôsô » signifie « conduite violente, imprudente ». « Zoku » fait référence au mot « clan ». On peut aussi interpréter le « Bô » du début comme un élément provenant de « bōryokudan » dont la définition exact est « bandit » (confirmé par les caractères imprimés sur leur veste qu’ils portent fièrement durant leur parade). On peut donc dire que les Bôsôzoku sont donc des voyous agissant en bande à moto et avec une conduite dangereuse à la clé.

Les Bôsôzokus naissent dans les années 50 au Japon (principalement à Tokyô et Osaka), sous l’influence du film, Wild One (1953) avec Marlon Brando et des Hells Angels. Le long métrage Wild One met en avant Marlon Brando et sa bande de motards qui sèment autant le désordre qu’ils inspirent le respect. Il va faire la rencontre d’une serveuse qui tombe amoureuse de lui et à qui il va faire connaître la sensation de liberté que l’on éprouve à pleine vitesse. Il marquera aussi sa domination sur les autres gangs à travers des rixes endiablés… Le code vestimentaire est très ciblé, dans le film il s’agit de blouson de cuir.

Quant aux Hells Angels, il s’agit d’un club de moto américain que l’on considère comme faisant partie du crime organisé. Pour ce groupe, la terre c’est l’enfer et la vitesse est encore une fois un moyen libérateur d’en réchapper, un salut. Le nom de ce groupe provient d’une escadrille de la Première Guerre Mondiale (portant le même nom en fait) et réputée pour avoir en son sein de vraies têtes brûlés. Les Hells Angels suivent des règles strictes, ce qui leur octroie paradoxalement leur liberté.

Le logo des Hells Angels

Le respect aux aînés est de mise et lorsque l’on rentre dans le club, on commence par les tâches ingrates. Un manquement aux règles se conclut par une punition à plus ou moins grande échelle, fonction de sa gravité. On retrouve chez les Bôsôzokus un mixte de tous ces codes : le respect d’une règle de conduite stricte et celui de ses aînés, les guerres de clans, l’inspiration du respect par la tenue vestimentaire, la coupe de cheveux en banane, la terreur, une passion pour la moto, son customage ect… Le mot « liberté » revient souvent et il passe par l’enfreint de la loi, la vitesse.

Vous avez dit méchant ?


La rue devient le témoin privilégié du théâtre gigantesque auxquelles les Bôzôzokus se livrent : guidés par le sentosha (leader des parades légales ou non qu’ils ne doivent sous aucun prétexte dépasser) avec leurs motos customisées aux bruits pétaradant, les bôsôzokus font plus peur qu’ils ne font de mal. Ils sont bien sûr les auteurs de délits bien connus comme les guerres de gang où les blessures sont parfois sévères, le grillage de feu rouge ou la pleine vitesse en centre-ville.

Il faut voir ces infractions comme un moyen libérateur de se défaire des chaînes d’une société conformiste, où tout le monde est soumis à la compétition et au stress le plus profond dès l’enfance. C’est moyen quelconque de devenir quelqu’un de respecté, de se marginaliser pour se différencier de la masse, un cri de révolte plein de vie. Ainsi leur code vestimentaire et signes empruntent beaucoup aux Kamikazes (symboles impériaux avec le soleil couchant par exemple), plus pour provoquer qu’autre chose.

Les Bôsôzokus véhiculent une image de voyous alors qu’en réalité, il s’agit d’une bande de jeunes (20 ans tout au plus) en quête de reconnaissance et avides de rêves. Peu d’entre eux finissent chez les Yakuzas ou dans une autre organisation criminelle. La plupart finissent salarymen ou avec une vie bien rangée, preuve qu’il s’agit en réalité d’un passage vers l’âge adulte, pour grandir.

Ce mouvement a connu un véritable essor dans les années 80 et connaît un déclin depuis les années 2000. En 2007, on ne dénombre plus que 13000 Bôsôzokus à travers tout le Japon. Ils furent aussi majestueux et bruyant que leur moteur, tout comme ils furent aussi éphémère qu’un feu d’artifice. Pour les plus intéressés, je vous laisse un reportage très intéressant intitulé « Godspeed you! Black Emperor (1976) ». Je vous conseille aussi les manga Young GTO et Bakuon Rettô pour en apprendre plus !