Gravity, ce n’est pas un film, c’est une expérience.

Par Aurealisations

(SANS SPOILER)

Aurélie en mode Vers l’Infini et Au-Delà

Et en tant que tel, il me sera très difficile de décrire ce chef d’œuvre sans en révéler l’intrigue. Mais je ne le ferai pas, promis. N’ayez crainte.

Je n’ai jamais été une grande fan de la 3D, reléguant le style à une évolution imposée comme une vieille mamie déjà arriérée de par les avancées du cinéma, mais je ne peux que m’incliner devant Alfonso Cuarón et toute son équipe. Avec tout le respect que je dois à James Cameron pour être l’un des fondateurs de la 3D, je dois avouer qu’Alfonso passe à la vitesse supérieure. James a du souci à se faire… Faire revivre Titanic en 3D était déjà en soi un tour de force, mais Gravity vous propulse dans une autre galaxie. Dans un monde où j’ai la nette impression que la grandeur et l’excellence sont trop souvent limitées par des considérations terre à terre et des tueurs de rêves et d’art en tous genres, assister à un accomplissement technique pareil, poussé jusqu’au meilleur résultat possible, est simplement magique.

Pour être totalement honnête, j’étais quelque peu effrayée par la perspective du film, voire flippée. Dis donc, t’aurais pas envie d’aller voir un film sur une personne totalement perdue dans l’immensité de l’espace, complètement seule, à court d’oxygène, qui manque de suffoquer à chaque seconde et qui dérive dans le vide intersidéral jusqu’à je sais pas quand, en 3D dans un nouveau cinoche équipé de la toute dernière technologie de son Dolby pour que tu t’y crois encore un peu plus ??

L’équation parfaite réunissant tout ce que les humains abhorrent intuitivement : un scénario en huis clos sur une situation de solitude implacable, sans aucune aide extérieure à envisager, avec très peu de chances de s’en sortir de toute façon, face aux abysses intersidérales sourdes et nocturnes de l’Homme (et de la Femme…) et face à ses propres abysses intersidérales sourdes et nocturnes, en direct live, comme si vous étiez.

Parmi toutes les aventures de Sandra Bullock (et je confirme, George, il s’agit de sa performance à elle, de son « moment » à elle, même si tes apparitions valent carrément leur pesant de cacahuètes niveau attraction) dans une station internationale, une navette spatiale ou sa combinaison astronautique (si, si…), comprendre le second niveau de lecture du film, le niveau métaphysique, n’a rien de très compliqué.

Tout se résume à une seule question : Que voulez-vous vraiment faire ? Quelle est la réponse ultime à cette interrogation ? Quelle vérité subsiste lorsqu’absolument toutes les autres considérations ont été écartées de votre chemin ? Que répondre lorsque, dépouillé de tout, il ne reste rien d’autre que « Que voulez-vous vraiment faire ? » dans l’univers ?

Perchée là-haut, à 10 000, Sandra doit aller au fond des choses, prendre des paris sur des paramètres sans cesse variables et changeants, sans aucun moyen de savoir si tout cela va bien finir pour elle, ou finir tout court, avec la seule certitude que le chemin du retour sera astronomiquement long. Il y a quelque chose (et tout) de ce sentiment latent d’un sportif de haut niveau sur le point de défaillir d’une minute à l’autre et dont l’entraineur sadique sur le banc est là à lui hurler dans les oreilles : « T’es fatigué ?? T’es dépassé par les événements ?? Tu ne sais plus où t’es ?? Tu veux arrêter ?? MAIS TU PEUX PAS, MEC !!! ».

Pourtant avec tout cet espace libre pour les interrogations métaphysiques sur la nature humaine, sur de quoi est-on réellement fait, sur la vérité des âmes, sur pourquoi nous sommes ici et comment ça fonctionne tout ça à la fin, m**** ??!, on choisit de rester simple et rationnel (et j’ajouterai même quasi « masculin ») sur la dose de prise de de tête philosophique. Et ce n’est pas plus mal.

Aucune question évidente n’est posée, on ne vous force à aucune promesse que vous allez changer des choses dans votre vie si on vous donne gentiment une seconde chance, mais l’action ne vous invite pas moins à y réfléchir après coup. Ce sont des graines de réflexion, pas des fleurs en pot prêtes à être mises en terre pour vos beaux yeux (bleus ou marrons d’ailleurs). Que voulez-vous vraiment faire ? Regarder un super film d’action aux images numériques les plus époustouflantes du moment ? Ou lire entre les étoiles sur l’écran et trouver une porte sortie ? Ou les deux ?

P.S. : Nommer cette expérience d’après le seul concept qui est à la fois complètement absent et omniprésent du film, chapeau bas…