Contre les idées reçues à propos des roms (suite)

Publié le 26 novembre 2013 par Asse @ass69014555

Sylvie Lhoste

Encore un post publié sur notre page Facebook qui mérite une petite remise de pendules à l'heure... Son auteur, Lionel, est un photographe Séquano-dyonisien qui critique notre manière - et celles de bien d'autres associations - de défendre les roms auxquels nous tentons de venir en aide pour finir sur une publicité sur son travail que nous ne citerons pas ici...

Décortiquons donc ce post...

« Je fais parti de ces rares gens en France qui offrent, grâce à leurs impôts, plusieurs villages d'insertion réservés aux rom. C'est la communauté de communes "Plaine Commune" qui les gère et les finance ».

Comment ça « rares gens » ? Plus de 18 millions de français payent leurs impôts... Et au cas où vous ne liriez pas la presse, la plupart d'entre eux en payent encore plus cette année (16 millions).

Par ailleurs, il convient de ne pas oublier que les fonds européens qui doivent servir à l'intégration - 50 milliards pour 28 pays - ne sont pas, ou mal, utilisés...

France info septembre 2013

« On a mis de l'argent sur la table (pour aider les roms). Il y a 50 milliards d'euros qui sont à disposition et qui ne sont pas utilisés. Je me demande pourquoi." C'est la réponse de Viviane Reding à Manuel Valls ce mercredi matin sur France Info après les déclarations polémiques du ministre de l'Intérieur sur les roms ». (...)
« Au sein du FSE (5 milliards d'euros), Bruxelles a compté 53 projets français d'insertion professionnelle en faveur des gens du voyage pour un coût supérieur à 4 millions d'euros. Il s'agit notamment du financement d'un "village d'insertion" à Lille. Concernant le Feder, huit projets comportent le nom "gens du voyage" ou "roms" dans leur intitulé. Répartis sur six régions, ils ont été cofinancés par l'UE à hauteur de 1,5 million d'euros. Huit projets... sur un total de 3.858. Certains de centaines de projets pourraient aussi financer des actions en faveur des roms sans que ce soit clairement explicité ».

Quant au cadeau offert aux roms, à savoir les villages d'insertion, je n'ai pas du tout quant à moi envie de me vanter de contribuer à "l'offrir"... Voici ce qu'en pense Samir Mile, président de La Voix des rroms. Je vous invite également à visionner le débat télévisé récent diffusé sur Public Sénat.

Blog villagedinsertion

Ne vous y méprenez pas, ce n'est pas l'origine indienne des Rroms qui explique le titre de ce message. C'est l'origine erronée des cochons d'Inde, qui en fait ne sont pas des cochons. Les villages d'insertion, c'est un peu la même chose: tout comme les cochons d'Inde ne sont ni cochons, ni d'Inde, les villages d'insertion aussi, ne sont ni villages, ni d'insertion. Pourquoi ?

1. Sauf pour ceux qui ont voyagé dans des pays en guerre, avez-vous déjà vu des villages entourés de tôle avec un maître chien à l'entrée, qui vous empêche d'y accéder? Eh bien, les "villages d'insertion des Roms", comme leurs gestionnaires les appellent, sont fermés et si vous essayez d'entrer, les premiers êtres que vous y verrez ce sont le gardien et son berger allemand. Et ceux-ci risquent de rester les seuls êtres vivants que vous y verrez, car vous ne pouvez pas y entrer. Même les membres de la famille des habitants ne peuvent y entrer. Ainsi, une grand-mère qui a été placée dans un tel village, doit sortir dans la rue pour voir son petit-fils, qu'il pleuve ou qu'il fasse soleil, et elle ne peut pas lui montrer comment elle fait sa cuisine. Est-ce qu'un village c'est comme ça ?

2. Ce sont des "villages d'insertion". Est-ce peut-être pour cette raison qu'on empêche des gens d'y entrer? Au-delà de ça, avez-vous vu des gens s'insérer sans pouvoir travailler? Les Rroms qu'on parque dans ces camps (ils ressemblent en effet plus à des camps qu'à des villages) sont originaires de Roumanie et de Bulgarie. Selon la législation en vigueur, pour pouvoir travailler ils doivent obtenir à la préfecture une autorisation de travail. Les préfectures sont bien partie-prenantes dans ces projets de "villages d'insertion", mais elles ne délivrent pas d'autorisations de travail, sauf dans les conditions drastiques établies par une circulaire de décembre 2006, qui rendent l'obtention de celle-ci quasi impossible.

Les gestionnaires de ces camps ce sont des associations bien téméraires pour tenir le discours qu'elles tiennent. A titre d'exemple, l'un des représentants de "Coup de main" se disait surpris de voir que "les Rroms se comportent comme n'importe quelle population". "Pact Arim", prétend que le fait pour les familles de payer un loyer est un pas vers leur insertion. Vous aurez compris, on responsabilise des irresponsables. Payer un loyer, soit, mais avec quel argent, lorsqu'on ne peut pas travailler légalement? Avec de l'argent gagné par du travail illégal, voire pire. Et tout ça, sous l'oeil vigilant d'un Etat qui stigmatise le travail au noir.

Voilà, en quelques mots, la réalité des "villages d'insertion". Vous choisirez la version des faits qui vous semble correspondre le plus à la réalité.

« Je fais aussi parti de ces français qui, au quotidien doivent supporter la cohabitation compliquée avec les roms. Pour avoir travaillé auprès des SDF durant de longues années, je fais parti de ces gens qui connaissent bien le problème rom. Mais je ne fais pas parti de ces français qui ne comprennent pas pourquoi cette population attire tant d'attention car justement je connais bien cette population ».

« Cohabitation compliquée avec les roms », dites vous ? J'ai déjà entendu ces propos dans la bouche d'un ministre contre lequel le MRAP a porté plainte...  Moi, je dirais plutôt cohabitation forcée avec une population qu'on oblige à vivre dans des conditions inhumaines d'où l'accès au droit - facteur d'intégration - est totalement absent.

Et puis periode de crise, la discrimination, la xénophobie et le racisme sont toujours au rendez-vous. Le ton est donné par les élus à tous les étages du pouvoir lors des débats sur l'immigration... Il est plus facile de désigner les étrangers - dont les roms - comme les boucs émissaires du chômage en augmentation que de procéder au calcul simple de ce qu'apporterait leur intégration... Un enfant de douze ans m'a récemment fait part du calcul suivant : « 17 000 roms, 36 000 communes, finalement, ça ne ferait même pas un demi rom à intégrer par commune si on le décidait ». Et toc !

« C'est une population qui obéi à des mafieux, qui est dirigée par des mafieux. Alors ce que je ne comprend pas c'est pourquoi les associations qui défendent cette population s'en prennent à la police qui nous protège et qui fait respecter les lois plutôt qu'aux mafias qui exploitent ces gens jusqu'à prostituer leurs enfants ».

Vous lisez trop Marianne et Valeurs actuelles mon cher ! Ces généralités là sont très dangereuses. Car elles ne touchent pas la totalité des familles venues sur le territoire français en quête d'avenir. Les familles que nous croisons sur leur bout de carton, dans la capitale, ne sont d'ailleurs pas concernées.

Il y a toujours eu exploitation de la misère. De tout temps. Partout... C'est à ceux qui l'exploitent qu'il faut s'attaquer, pas à ceux qui la subissent.
Relayer ces génaralités là, c'est donner du grain à moudre aux identitaires !

« Je ne comprend pas non plus pourquoi ces associations ne vont pas en Roumanie, dans les villages roms pour les aider à faire respecter leurs droits, pour chasser les extrémistes qui les harcèlent. Si les associations ne prennent pas le problème à la base, elle ne trouveront pas de solution. Mais prendre le problème à la base c'est lutter contre les mafias et les extrémistes, c'est se mettre en danger et il est bien moins dangereux aujourd'hui de brailler contre la police française plutôt que de lutter contre les mafias roms ».

Et pourquoi appartiendrait-il aux associations d'aller sur le terrain tenter d'erradiquer les extremismes ou REprendre à la base un problème que l'Europe - la France - n'a pas pris en compte en intégrant la Roumanie en son sein sans exiger qu'elle ne fasse elle-même oeuvre d'intégration pour ses minorités ?

Il est pour nous question d'aider des femmes, des hommes et des enfants à survivre à une situation que les politiques ont créés de toute pièce. Et oui on gueule et on gueulera encore pour dénoncer les actes de certains policiers qui n'hésitent pas à venir harceler avec violence ces familles qui s'accrochent à leur morceau de carton, à jeter à la benne leurs pauvres effets, à les harceler pour qu'elles cachent leur misère là où elle ne dérange pas trop le regard de certains...


Les bénévoles de notre association, dans toute leur diversité, se sont rassemblés pour donner à ceux de la rue dont font partie les roms un peu de cette entraide citoyennes qui devrait couler de source dans le pays de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.
Le peu que nous faisons est accessible à chacun au pied de son immeuble, à l'entrée de sa station de métro... Notre implication a pour sens de montrer que nous avons le devoir en tant qu'êtres humains à traiter chacun comme tel.

« J'ai aussi parfois le sentiment que les gens qui s'apitoient le font pour laver leur conscience. Une lutte contre l'exclusion et la discrimination ne peut pas se contenter de critiques contre une démocratie et de distribution de repas chauds et de vêtements. Cette lutte doit être aussi "violente" qu'est violente la situation de ces gens ».

Chacun des bénévoles de notre association vient en maraude pour donner un peu de chaleur humaine à ceux qui en reçoivent par ailleurs si peu, voir plus du tout... Les échanges avec les personnes à qui nous nous "contentons" de distribuer repas chaud et vêtements nous enrichit, c'est certain. De là à nous donner bonne conscience, il y a un sacré pas !

Vous dites que cette lutte doit être aussi "violente" qu'est leur situation. Vous même luttez - semble-t-il - avec votre appareil photo. Nous luttons quant à nous avec une présence tous les samedis soirs, 52 semaines par an, avec ce que nous pouvons distribuer : de l'entraide citoyenne.


Vous ne savez pas ce que certains d'entre nous font par ailleurs. Abstenez-vous de réduire ce que nous faisons ensemble.

« Ce que vous faites avec votre association est louable mais inefficace. Elle a même l'effet pervers d'amplifier le problème ».

En quoi est-il inéfficace de donner un peu de chaleur humaine et vestimentaire ?

« Et ça va plus loin. Vous êtes-vous déjà rendu dans un bidonville ? »

Oui.

« Et si vous vous y êtes rendu, avez-vous rendu visite aux riverains de ce bidonville, ces gens, souvent des français moyens et des travailleurs pauvres qui n'en peuvent plus ? Il faut écouter tout le monde. Les riverains des bidonville vivent un enfer et ne pas tenir compte de ce fait a pour effet de grossir les urnes de bulletins de vote de partis politiques prônant l'intolérance. Seule la lutte contre les mafias peut améliorer les sort de ces gens et lutter contre les mafias c'est aussi cesser de critiquer les décisions de justice et les actions de police ».

Effectivement... C'est bien pourquoi nous gueulons contre les pouvoirs qui cherchent à exclure les familles roms ou à les enfermer dans ces bidonvilles clôturés que sont les camps qui n'intègrent personne. Bien au contraire...

C'est bien pourquoi nous n'aurons de cesse de rappeler que l'intégration passe par l'accès au droit et que ce ne sont pas quelques milliers de personnes en plus ou en moins dans notre pays qui risquent d'en faire sombrer l'économie, la culture ou quoi que ce soit d'autre. Bien au contraire !

Je vous rappelle aussi que notre association a pour humble vocation de venir en aide aux sans-abris, aux sdf et aux exclus auxquels appartiennent nombre des voisins des camps... Notre souhait n'est pas de niveller par le bas en contribuant à dresser les pauvres contre ceux qui n'ont plus rien !

On a vu ce que cela a donné en septembre 2012 à Marseille où les riverains ont voulu se faire justice eux-mêmes. Une cinquantaine  d’habitants de la cité des Créneaux, à Saint-Louis, dans le quinzième arrondissement de Marseille, s’est réunie pour évacuer un camp de Roms installés depuis quatre jours sur un terrain vague... Quelle horreur !

« Et si vous souhaitez vraiment aider les clochards, aidez moi à faire publier ce livre qui dénonce leur prise en charge dans les ESI parisiens, ces ESI parisiens qui sont gérés par de grandes associations ou par la mairie de Paris ».

Je ne vois pas en quoi nous pourrions vous aider à publier votre livre ni en quoi la dénonciation de la prise en charge dans les ESI parisiens pourrait améiorer la condition de ceux que vous nommez "clochards"...
Je ne vois pas non plus pourquoi - si tant est que nous en ayons les moyens - nous devrions vous aider à publier un livre qui dénonce sans rien proposer...