Amerika

Publié le 30 décembre 2013 par Lecteur34000

« Amerika »

JABER Rabee

(Gallimard)

Encore un roman qui traite de l’immigration aux Etats-Unis. Non que le Lecteur se lasse. Il se lasse d’autant moins que celui-ci raconte ce que fut l’immigration syrienne durant les années qui précédèrent la Première Guerre Mondiale et que le personnage central du récit en est une femme. Une femme qui quitta son village pour tenter de retrouver, à New York, son mari. Un mari qui était censé l’attendre mais qui a disparu. La diaspora va accueillir cette jeune femme. La diaspora lui fournira de quoi vivre puis lui confiera un travail grâce auquel elle s’installera au sein de la jeune société américaine. Une jeune femme de caractère, une battante, une bosseuse, mais avant tout déterminée à retrouver le mari disparu. Jusqu’au jour où un membre de cette diaspora lui fournit une piste qu’elle emprunte illico mais qui la conduira à une cruelle et irrémédiable désillusion. Ce qui sans doute la motivera pour réussir son ancrage américain, même si subsiste la nostalgie du pays natal. Et dans un contexte particulièrement difficile, avec l’engagement tardif des USA du côté des alliés durant cette Première Guerre Mondiale puis, en 1929, la violente crise qui faillit anéantir l’économie américaine et donc celles et ceux qui s’essayèrent à en être des acteurs.

Après avoir refermé ce roman, le Lecteur reste partagé. Certes, il fut très sensible aux belles pages dans lesquelles Rabee Jaber narre les combats d’une femme que rien ne prédisposait à s’insérer dans l’univers sans pitié du capitalisme. De son voyage depuis la Syrie jusqu’à New York via la France et la difficile et douloureuse traversée de l’océan. De ses toutes premières ventes de petites choses jusqu’à la confection de linges et de vêtements. Certes, la solidarité qui rapproche les membres d’une même communauté s’affirme comme une sorte de contrepoint à l’individualisme contemporain. Mais le roman n’échappe à la tentation la plus commune à une certaine littérature américaine : confirmer aux lecteurs qu’ils vivent bel et bien dans une société accueillante, ouverte, généreuse, qu’il est possible pour qui le souhaite vraiment de s’intégrer à cette société-là, la meilleure, la plus accomplie des sociétés. C’est là où le bât blesse, là donc où le Lecteur refuse d’endosser le costume du dupe. Même s’il ne resta pas insensible aux qualités littéraires de l’œuvre.