Critique Ciné : Abus de Faiblesse, passion vraie

Publié le 14 février 2014 par Delromainzika @cabreakingnews

Abus de Faiblesse // De Catherine Breillat. Avec Isabelle Huppert et Kool Shen.


Abus de Faiblesse c’est l’histoire vraie de Catherine Breillat et Christophe Rocancourt. Elle livre ici la manière dont elle a été escroquée alors qu’elle était une femme faible qui cherchait simplement de la compagnie. Dans le film, Catherine Breillat s’appelle Maud et Christophe Rocancourt s’appelle Vilko. La manière dont l’histoire est racontée est bouleversante alors que l’on assiste impuissants à une escroquerie rondement bien menée. Et l’on se demande par la même occasion comment elle a pu donner autant d’argent à cet homme jusqu’à ce que la dernière scène du film nous donne la réponse : c’était devenu une habitude. Tout ce qui commençait comme une histoire sincère et touchante s’est terminée en drame. Catherine Breillat ne cherche pas à apitoyer le spectateur ce qui donne un film brut, difficile mais jamais dans le pathos. Elle met alors en lumière la prestation étonnante d’Isabelle Huppert. Cette dernière est parfois même méconnaissable au début du film.
Victime d’une hémorragie cérébrale, Maud, cinéaste, se réveille un matin dans un corps à moitié mort qui la laisse hémiplégique, face à une solitude inéluctable.
Alitée mais déterminée à poursuivre son projet de film, elle découvre Vilko, arnaqueur de célébrités, en regardant un talk-show télévisé.
Son arrogance crève l’écran avec superbe : Maud le veut pour son prochain film.
Ils se rencontrent. Il ne la quitte plus. Elle aussi, il l’escroque et lui emprunte des sommes astronomiques. Il lui prend tout mais lui donne une gaieté et une sorte de chaleur familiale.
Ce film raconte l’abus de faiblesse dont Maud est victime.
Pour tout vous avouer je ne savais pas du tout que Catherine Breillat avait été l’une des personnes escroquées par Christophe Rocancourt mais je savais que ce dernier avait porté plainte contre Catherine Breillat au sujet de ce film. Peu importe, cette histoire est racontée avec beaucoup d’humilité. Le personnage de Vilko, présenté à la fois comme un homme charismatique mais aussi violent (il ne lésine pas sur les moyens pour faire peur à Maud à certains moments du film) est fascinant. Kool Shen, que l’on n’attend pas du tout au cinéma, incarne ici ce rôle avec beaucoup de dextérité. Au début c’est Romain Duris qui devait incarner ce rôle jusqu’à ce que le rappeur tape dans l’oeil de la réalisatrice. Elle nous le raconte d’ailleurs qu’elle fonctionne énormément aux coups de coeur. Isabelle Huppert de son côté n’a rien à envier à qui que ce soit. Je pense qu’elle rend justice à merveille à Catherine Breillat. Pourtant, je ne m’y attendais pas du tout. En allant voir Abus de Faiblesse je m’attendais à un film raté et finalement c’est l’inverse qui s’est produit.
Comme quoi on peut aussi être surpris par de petits films indépendants en France. Afin de ne pas nous apitoyer la réalisatrice garde un oeil distant de son film. Ce regard porté par la réalisatrice fait preuve de beaucoup d’humilité. On aurait pu penser que ce serait une sorte de « revenge movie » où le méchant est présenté comme quelqu’un de salaud et d’impassible mais finalement ce n’est pas le cas. L’ambiance du film devient très souvent pesante mais jamais dans le mauvais sens du terme. Bien au contraire, cela participe à cette mise en abîme de la vie d’une femme qui se sent seule. On nous le prouve assez souvent qu’elle est seule (et même le personnage de Vilko ne va pas venir l’aider par moment alors qu’au fond c’est la moindre des choses qu’il pourrait faire). C’était aussi pénible dans le sens où l’on a envie de frapper le méchant de l’histoire et de lui dire qu’abuser de la faiblesse des gens est sûrement la pire des ignominies qu’il soit.
Note : 8/10. En bref, un film froid et distant mais racontant avec passion une histoire vraie.