Quand père et fils se mêlent de la magie proustienne
Publié le 17 février 2014 par Rbranche @RobertBranche
Duo amoureux autour de Marcel Proust Il est des livres qui se dégustent lentement comme une gourmandise tellement bonne que l'on se surprend parfois à penser qu'elle est peut-être interdite. Mais il n'en est évidemment rien. Ce type de plaisir loin d'être répréhensible, est plus que recommandé.C'est le cas du "Dictionnaire amoureux de Marcel Proust" écrit en duo par MM Enthoven, père et fils. Même si le plaisir est décuplé si l'on a lu "A la recherche du Temps perdu", rien n'interdit de le découvrir à l'occasion de ce drôle de dialogue.En voici, deux courts extraits portant sur deux thèmes clés au sein de l’œuvre de Marcel Proust : le sommeil et la musique.« Car le monde du sommeil, dont le décor fictif tempère la cruauté des impressions que l’intelligence et la volonté ont cessé de filtrer, contient toutes les réponses et toutes les expériences, sinon la faculté de les mettre à disposition du rêveur. Par conséquent, pour peu qu’on se souvienne de ses rêves et qu’on entende la langue des signes, le « bienfaisant accès d’aliénation mentale » qu’on appelle « sommeil » est une voie royale vers le réel autrement appelé « littérature ». »« Aux dédits du langage et à ses lieux communs, la musique objecte une communication intuitive, un retour à l’inanalysé comme à l’harmonie qui précède la forme, et que chacun est forcément libre d’interpréter comme il l’entend – ou comme ça lui chante. (…) L’anamnèse musicale n’est pas un retour en arrière mais, à l’inverse, la découverte impérative, fulgurante et inoubliable, qu’au sein du temps à l’état pur, les hommes sont les contemporains de toutes leurs émotions. Par-delà mensonge et vérité, loin de l’espoir comme du regret, la petite phrase est la rivière qu’on ne voit pas mais dont un rideau de peupliers dessine le cours, la promeneuse que masque le rideau d’une cascade, l’esclave dont les chaînes font saillir les muscles, la prisonnière d’une sonate elle-même enfermée dans un septuor (…), bref : un souvenir du présent. Une défaite de l’écriture, d’où naît l’art d’être surpris par ce à quoi on s’attend. »