Absolution

Publié le 18 février 2014 par Lecteur34000

« Absolution »

FLANERY Patrick

(Robert Laffont)

L’Afrique du Sud, des années de l’Apartheid aux années Mandela. Une écrivaine âgée se raconte à celui qui est censé jouer le rôle du biographe. Un biographe qui dissimule une part de sa propre histoire. Entre elle et lui, la fille de l’écrivaine qui rejoignit la lutte armée à la fin des années 80. Fille disparue que cette mère s’essaie à faire revivre à travers les traces infimes laissées dans des carnets intimes. La mère confrontée à sa propre histoire, ces temps déjà lointains où déjà connue, elle accepta (se résigna ?) de participer aux travaux d’une commission de censure (« Dans mon cas, le censeur avait envahi mon corps, il était toujours avec moi, entièrement en moi, me suçant le sang de l’intérieur »). Puis vint le temps des travaux de la Commission Vérité et Réconciliation. Des lambeaux de vérité pour une réconciliation aléatoire. Tel est le constat qu’établit le biographe. Tel est donc sans doute le point de vue de Patrick Flanery.

Le roman a passionné le Lecteur. L’histoire de l’Afrique du Sud et la lutte contre l’Apartheid ont jalonné une longue période de son existence. Le personnage de l’écrivaine lui paraît non seulement crédible, mais d’une grande richesse humaine. Elle qui aura traversé toutes ces années-là en essayant de se prémunir des chocs et de la violence, de sauver ce qui pouvait l’être. Sauf sa propre fille qui fit le choix du combat pour la liberté et la dignité, c’est-à-dire du côté des quelques blancs qui refusèrent l’ignominie.

Mais subsiste, le livre refermé, comme un malaise. Certes Patrick Flanery semble prendre le parti des victimes. Il suffit pour s’en convaincre de relire les pages qu’il consacre aux tortures pratiquées par les sbires qui oeuvraient au service du pouvoir blanc. Mais il y a une façon trop oecuméniste de mettre en parallèle cette violence-là avec les dérives des autres, les victimes lancées dans le combat pour la liberté et la dignité. Comme s’il ne fallait fâcher personne, comme s’il était malséant, près de vingt ans plus tard, de prendre parti.

(« J’ai résisté si longtemps, je ne peux plus. Ce n’est pas comme la maladie ou la fièvre, pas même comme la honte. La nudité n’a plus d’importance. Ils peuvent me faire ce qu’ils veulent, ils peuvent me regarder me pisser et me chier dessus, s’il me reste quelque chose à pisser ou à chier. Pas de nourriture dans mon estomac à vomir, pas même de la bile. Ce n’est pas le pire qu’ils aient fait. C’est presque un répit. »)