Entre conte de fée et réalité, la vérité sur le hipster du XVème siècle

Par Marine @Rmlhistoire

Gilles de Rais, déjà avec un nom pareil, le mec il partait mal. Sans doute moqué par ses camarades d’école, il a décidé de se venger. En fait, non, c’est pas possible, parce que l’école au XVème siècle, ça n’existait pas trop trop. Mais l’idée c’est que ce mec déteste les enfants. Ou, il les aime. Trop ? Dans tous les cas, il porte une grosse barbe et va être à l’origine d’un conte, connu de tous.

Qui est Gilles de Rais ?

Gillou est né en 1404 dans une richissime famille, et vu qu’il est malin, beau gosse, avec une grosse barbe, il s’est marié avec une meuf au moins aussi riche que lui. Alors ils s’amusent bien, youpitralala, grandes réceptions et festins. Gilles de Rais a été Baron de Bretagne et c’était un copain de Jeanne d’Arc, ils prennent la ville d’Orléans le 7 mai 1429 ensemble, alors qu’il n’a que 25 ans.

Ceci est la seule représentation de Gilles de Raie de son vivant, les autres sont de plus fictives et imaginatives

Gilles de Rais dépense sans compter, mais à force, il va connaître quelques difficultés. La chapelle Saint-Innocents était luxueuse, c’est un peu le Ritzz des établissements religieux. Tout le fric du barbu y passe. Et puis, vu qu’il n’y a pas que le matériel qui compte, Gillou choisit les garçons les plus choupi-mignons pour en faire ses enfants de cœur, dont les tristement célèbres André Buché et un Rossignol. Il va abuser d’eux sexuellement.

Outre, sa Chapelle, Gilles de Rais a également une autre lubie, une pièce de théâtre. L’idée, c’est d’être représenté et vu de tous. L’idée, c’est d’être mégalomane. Il y a plus de 650 rôles et les décors du « Mystère du siège d’Orléans » sont énormes. Ne serait-ce-qu’une seule représentation coûte un bras à Gillou, mais bon, ça vaut le coup tsais, c’est comme passer à la télé, c’est bon pour l’ego.

Les frais de guerre ont aussi contribué à l’appauvrissement du Baron, et celui-ci pour tenter de s’en sortir, il va mal tourner. Petit brigandage pour gagner 4 sous, et puis finalement, il va être obligé de vendre certaines de ses propriétés. Pour le coup, il est la risée de toute la région. En 1433, il ne lui reste plus que quelques terres de sa femme et sa chapelle et le Roi en personne fait appliquer un édit qui interdit à quiconque de faire du commerce avec lui.

Il lui faut donc trouver d’autres moyens de gagner de l’argent, et va investir dans l’alchimie. Il essaie de fabriquer de l’or, mais ça marche pas trop… Alors, il décide de reprendre ses terres et propriétés en faisant la guerre. Mauvaise idée. Gilles de Rais se met à dos les hommes puissants du Royaume, le duc de Bretagne et l’évêque de Nantes. Ils vont pas le louper. En 1440, une enquête est menée sur ses petites et troubles affaires. Faut dire que dans le coin, ça gueule. De nombreux enfants ont disparu, on le soupçonne de les enlever et de les tuer dans son château.

Les crimes de Gilles de Rais

Toutes ces rumeurs, ça pue un peu pour le baron, l’Eglise s’en mêle. Faut dire que les crimes ont lieux dans la fameuse chapelle. Le 15 septembre 1440, Gillou est suspecté de faire des sacrifices humains. Il découpe les mains, des cœurs et le sang des victimes pour évoquer le démon et espère avec ses actes avoir une révélation quant au secret de la fabrication de l’or. Gilles de Rais est arrêté en compagnie de ses fidèles serviteurs qui sont accusés de complicité, ils aidaient leur maître à enlever des enfants, et parfois à les assassiner.

Aussi, deux procès ont lieu, un ecclésiastique, et un civil.

Dans le procès de l’Église, il est question de 140 victimes, et le tribunal le juge pour hérésie, sorcellerie et sodomie. Du coté civil, plus de 200 victimes sont mentionnés. Ça en fait des parents pas contents. Le baron est jugé pour félonie (désobéissance au duc) et assassinats d’enfants.

Au début du procès, Gillou nie tout en bloc et crie au scandale. Et puis, lorsqu’on commence à évoquer la torture sur sa petite personne, il passe aux aveux. Sans doute a t’il en tête toutes les horreurs qu’il a pu faire à une centaine d’enfants innocents, et prend pas le risque de subir tout ça. Quel lâche. Il avoue avoir commencé en 1432, soit huit ans avant le début du procès.

La condamnation de Gilles de Rais

Le 25 octobre, le verdict tombe : « Hérétique, relaps, sortilège, sodomite, évocateur des malins esprits, divinateur, égorgeur d’innocents, apostolat, idolâtre, ayant dévié de la foi, hostile à celle-ci, devin et sorcier » Qu’on le pende haut et court, et qu’on brûle son cadavre. Il n’y a pas pire peine que celle-ci. En général, une fois que le mec est pendu, on le laisse quelque jours sur le gibet, histoire que tout le monde puisse le voir et retenir la leçon, et puis on l’enlève. Lorsqu’on décide de brûler le corps, c’est qu’on espère plus rien de son âme et qu’on veut le punir jusqu’au bout.

Et puis finalement, l’Église fait volte-face et décide de l’enlever du bûcher et d’enterrer son cadavre avec les honneurs de son rang.

Mais WTF ? Tout au long du procès, Gilles a rapidement avoué ses crimes mais a toujours nié le faire en vue de sorcellerie ou autre magie noire. Le tribunal ecclésiastique décide de le faire réintégrer l’Église, de manière posthume. Après tout, pourquoi aurait-il menti puisqu’il était déjà condamné à mort ? Mais bon, du coup, ça veut dire qu’il agit par pur sadisme et horrible cruauté. C’est chouette…

Peu de corps ont été retrouvé avant et après le procès, seulement une cinquantaine de crânes dans les souterrains de son château de La Suze-sur-Sarthe. Il a été question des siècles plus tard de son innocence. Le procès aurait été monté de toutes pièces par ses détracteurs. Aussi, en 1992, une révision du procès a eu lieu, bien que le résultat n’a aucune valeur juridique, Gilles de Rais a été acquitté par le Sénat, d’anciens ministres et des historiens consultants.

En réalité, on en sait rien, et Gillou était peut être un vulgaire sadique, un monstre qui n’avait aucun motif de faire subir la torture à des innocents.

Le héros à la barbe

Comme une revanche à sa pièce de théâtre raté, en 1697 Gilles de Rais est devenu le héros d’un conte que vous connaissez tous. Oui, tous. Même toi là bas, qui n’a jamais lu aucun livre.

Gilles de Rais est Barbe-Bleue

Alors que notre Gillou national n’a eu qu’une seule femme, sa cruauté a été la muse de Charles Perrault qui s’est inspiré du personnage pour le conte de fée.

L’homme est terriblement moche avec sa barbe bleue mais il est très très riche. Déjà, là, ça n’attire pas trop les meufs. Mais en plus, le monsieur a tué ses six premières épouses. Alors bon, les autres, elles rechignent un peu à l’épouser… Normal. Sauf une. Attirée par l’argent, elle accepte le mariage.

Elle vit relativement malheureuse, jusqu’au jour, ou, curieuse, elle ouvre la porte qui lui ait formellement interdite. La donzelle découvre mortes les six premières épouses de Barbe-Bleue. Évidemment, c’est à son tour d’y passer, mais elle est sauvée in-extremis par sa soeur et ses frères. Merci la famille.

A la tête d’une grande fortune, elle se remarie, et vit trankil. Hélas, cela n’a jamais été le cas des 150 victimes de Gilles de Rais, le vrai Barbe-Bleue.

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