Il y a beaucoup de français à Londres, entre 300 et 400 milles selon l’ambassade. Et il ne s’agit que des français enregistrés, certains sont là pour peu de temps, et ne se déclarent pas, d’autres au contraire sont arrivés depuis si longtemps qu’ils ne le font plus, surtout quand ils sont mariés à des britanniques. Kensington, le quartier de l’ambassade et du lycée français, est appelé little Paris on the Tames. (Petit Paris sur la Tamise). Quand on sort du métro, on a effectivement l’impression de se retrouver à Paris. Les enseignes sont en français, les passants ne parlent que français et vont acheter leurs croissants chez Paul…je trouve ça un peu déprimant.
Mais dans les petites villes, on est forcément beaucoup moins nombreux. Et on ne peut pas s’empêcher de se retourner dès qu’on entend parler français dans la rue, au supermarché, chez le dentiste… Vous croyez distinguer un mot de français dans votre dos, et vous êtes prise d’une envie irrésistible d’accoster de parfaits inconnus et de lancer un retentissant "bonjour, are you French too?" C’est un classique dans la vie des expats, on ne peut pas y échapper.
Ça marche dans l’autre sens aussi, vous ne savez jamais quand quelqu’un vous tapotera sur l’épaule, avec un grand sourire, parce qu’il ou elle a reconnu un compatriote. Vous étiez tranquillement en train de jurer comme un charretier en français, mais avec un sourire poli en pensant que personne ne comprenait, à la caisse parce que cette imbécile devant n’est pas fichue de compter sa monnaie et que vous êtes déjà en retard….Vous consoliez votre fille, dans la cour de recréation, toujours avec un sourire poli à la ronde, en lui expliquant en français, que la petite peste qui l’a poussée, sans que sa mère ne réagisse, trop occupée à se recoiffer la choucroute, n’est qu’une sale gosse…..Vous encouragiez gentiment votre petit dernier à mettre un bazar monstrueux dans la salle d’attente du docteur, pour passer plus vite, (ça fait deux heures que vous attendez pour un renouvellement d’ordonnance automatique), tout en assurant en anglais, autour de vous, que vraiment , vous ne comprenez pas ce qui lui arrive aujourd’hui ( I am so sorry, vas-y renverse les legos, Oh, dear! )…et hop, "bonjouuuuur! Are you french too?"
Une fois établie que nous sommes French too, ( et après avoir ramassé les legos) s’ensuit un échange passionné. Il faut traiter obligatoirement les questions suivantes:
-vous êtes là depuis longtemps?
-vous venez d’où? (J’ai fait d’énormes progrès en géographie française depuis que je suis expat)
-vous pensez rentrer en France un jour?
-on peut se tutoyer?
On se retrouve rapidement à raconter sa vie par le menu à des parfaits inconnnus, sous prétexte qu’on vient de France. Et on devient très rapidement proches, bien plus que si nous étions restés en France. D’où ma mauvaise humeur du jour…parce que malheureusement, venir du même pays n’est pas forcément un gage d’amitié ou de sincérité…voilà, voilà. À part ça je ne vais pas vous raconter ma vie, et je suis désolée si je suis quelque peu grognon ces derniers temps. Cela dit, grâce à ce merveilleux "Bonjour, you are French too?" , j’ai aussi rencontré des gens formidables et qui sont de vrais amis.