"Elle voyait mes blessures invisibles parce qu’elles étaient aussi les siennes."
De nombreux retours en arrière dans l’enfance d’Alison et dans ses relations amoureuses saphiques tissent des échos dans ce pavé qui demande bien plus de concentration qu’une bande dessinée ordinaire.
L’ouvrage renvoie aussi à la question de l’écriture. Sous forme de mémoire, à mi-chemin entre la biographie, celle de la mère, et l’autobiographie, Alison Bechdel traque la vérité intime au sein des souvenirs, des mots et des récits de rêve. Certaines planches fourmillent de détails, à la manière d’un patchwork variant du rose au gris, conçues comme des strates mémorielles. L’auteur, par l’intermédiaire de son personnage, qualifie d’ailleurs son roman de "méta-livre", soulignant ainsi sa réflexion sur la création, sur ses pouvoirs mais aussi ses dangers, puisqu’il n’est jamais anodin de consacrer une biographie à une personne toujours vivante, qui plus est sa mère.
Ecrire sur autrui pour mieux se connaître, pour pouvoir se connaître, est au cœur de ce "drame comique", qui non sans humour, aborde des thèmes existentiels, renvoyant le lecteur à sa propre image, dans un miroir quelque peu brouillé.
Alison BECHDEL, C’est toi ma maman ?, un drame comique, éditions Denoël Graphique, 24 euros
Lien vers une interview de l’auteur