Le début de l’histoire : Pendant la Seconde Guerre Mondiale, un avion américain s’écrase dans la campagne japonaise. Un seul soldat a survécu : il a sauté en parachute et a été fait prisonnier par des paysans qui l’ont ramené dans leur village. Or ce soldat est noir et, dans ce village, personne n’a jamais vu de personne de couleur. D’abord enchaîné et considéré comme potentiellement dangereux, il est enfermé dans une cave. Il est surtout un objet de curiosité pour tous les enfants du village, qui se battent pour l’apercevoir par le soupirail de la cave et pour l’approcher, voire même pour le toucher ou lui donner à manger, comme si cet homme était une bête de foire. Quant aux adultes, ils cherchent surtout à se débarrasser de ce prisonnier encombrant, dont ils ne savent que faire : ils vont à la ville consulter les autorités mais ces dernières n’apportent pas de solution immédiate et font traîner leur décision. En attendant, les enfants adoptent tout à fait le soldat noir, le libèrent de ses chaînes, et le traitent comme un animal domestique, une brave bête aux sécrétions corporelles fascinantes, oubliant qu’il est non seulement un homme mais aussi un ennemi, sous-estimant ses capacités, niant son humanité. (…)
Mon avis : Voilà un roman extrêmement dérangeant ! Personnellement, j’ai trouvé cette déshumanisation insupportable et l’enfant qui raconte cette histoire m’a fait l’effet d’un vrai petit monstre ! Cette dénonciation du racisme est extrêmement réussie car on voit à quel point ces enfants vivent dans une sorte de monde fantasmatique, totalement déconnecté de la réalité !
J’ai beaucoup aimé l’écriture de Kenzaburô Ôé, que j’ai trouvée très travaillée, très expressive, avec des descriptions très frappantes pour le lecteur, et qui évoquent parfaitement les couleurs, les odeurs, les paysages et les mentalités enfantines.