Hollande et son gouvernement de primaire.

Publié le 02 avril 2014 par Juan

La France attend la nomination de son nouveau gouvernement. Manuel Valls, qui a pris ses fonctions de premier ministre mardi 1er avril (sic!), consulte à tout va. 

Et l'équipe qui se dessine ressemble furieusement à une synthèse digne des pires congrès socialistes. Car voici l'ensemble des concurrents de François Hollande  aux primaires de 2011 rassemblés au gouvernement. 

Mardi soir, EELV confirme qu'aucun écologiste du parti ne sera membre du gouvernement Valls. La séquence qui se clôturait enfin a failli tourner au ridicule. Le matin même, un élu écologiste, François de Rugy, expliquait sur RMC que tout restait possible. Un autre, ministre démissionnaire, Pascal Canfin, affirmait exactement l'inverse sur France inter.
A 15h, Ayrault remet les clés de Matignon à Valls. Le premier repart pour Nantes, en train. Le second reprend ses consultations. Mais qui donc pour le rejoindre ?
Il fait soleil, la transition est rapide. Vingt minutes d'entretien tout au plus. Ayrault en a marre. Il faut passer à autre chose. Il a un train à prendre.


François Hollande n'aurait pas eu le choix, il s'agit désormais d'excuser le bonhomme. Il a "entendu" le "message". Cette curieuse version de l'abandon pragmatique au coeur de la gouvernance politique ne lasse pas de surprendre. Il ne s'agit plus d'expliquer l'action par la contrainte, mais le choix de ses proches collaborateurs (des ministres) sous la contrainte.
Le 1er avril nous rappelle que pour faire des blagues, il faut être crédible
— CharlineVanhoenacker (@Charlineaparis) April 1, 2014


Même Jean-Michel Baylet (PRG) pourrait rejoindre le gouvernement. Avec Manuel Valls, Ségolène Royal et Arnaud Montebourg, voici la quasi-totalité des anciens opposants à François Hollande lors de la primaire de 2011 qui seraient donc au gouvernement. Ajoutez Benoit Hamon, et le plat est fourni, le bouquet trop garni. On se croirait à Reims (2008), ou à Rennes (1990). A l'époque Mélenchon était encore au Parti socialiste. A ce prix-là, ridiculement élevé pour un résultat qu'on devine maigre et dans l'immédiat désastreux, Hollande sort affaibli, inepte, et inaudible.
Ce n'était pas un poisson d'avril.
L'éditocratie applaudit. Ce lâche soulagement, étonnant dans son unanimité dans la presse mardi matin, ne surprendra personne. Dans les colonnes du Figaro, on lit combien Valls est plus populaire à droite que Sarkozy en son temps ne l'était à gauche. Sur France info, on nous livre quelques témoignages sur Valls l'homme privé, humain, drôle, parfois caustique, direct et pas si dur. Cette communication est drôle, hors sol.
A droite, on s'énerve, on s'angoisse. Manuel Valls est trop compatible pour qu'on le reconnaisse.  Même Eric Zémour s'agace.
On ressort les vieilles amitiés d'avec Alain Bauer, le "trait d'union" avec Nicolas Sarkozy. On nous rappelle que Valls avait  été appelé par Sarkozy pour tenter l'ouverture en juin 2007. Pourtant, il n'y avait nul besoin de cela pour comprendre le sens de cette nomination. Michel Rocard ré-apparaît pour applaudir le "briseur de tabous."
Manuel Valls consulte. Le gouvernement resserré n'aura aucun écologiste d'EELV même si François de Rugy, co-président du groupe à l'Assemblée, s'étrangle de rage. Cette recherche de strapontin ne lasse pas de surprendre. On comprend que Laurent Fabius sera encore là, que peut-être Anne Lauvergeon, ex-présidente d'AREVA, pourrait se joindre. Bertrand Delanoë refuse le portefeuille de la Justice. Il aurait pu être premier ministre.
Ce nouveau gouvernement, que d'aucuns attendent et d'autres n'espèrent plus, serait nommé ce jour, mercredi. On a cru un temps que l'Elysée avait attendu le lendemain du 1er avril,  pour éviter qu'on y trouve une allusion au poisson d'avril.
Sans rire.
Qui voulait rire ?
Crédit illustration: DoZone Parody