Mac DeMarco – Salad Days

Publié le 09 avril 2014 par Hartzine

A bien des égards, Mac Demarco incarne ce que l’indie peut produire de plus détestable. Un corps frêle attifé d’une vieille casquette élimée aux couleurs pâlichonnes. Une blue jean sans forme sur le lequel s’affaisse un t-shirt quelconque. Un visage androgyne, sabré d’un large sourire, sur lequel flotte un regard de dément. Une paire d’yeux bleus profond et les dents du bonheur. La gueule de l’emploi. L’allégorie d’un je-m’en-foutisme à la cool qui chantonne, d’une voix nasillarde, l’aventure du quotidien portée par les accords cradingues d’une guitare à trois sous. L’icône du chill et de la coolitude 2.0. Un hipster comme on ne les fait plus ; et le Canadien vient de déménager à Brooklyn – ça ne s’invente pas !

Alors quoi, Mac Demarco, une énième variation de l’adulescent chevelu en mal de maturation ? Point du tout, bien au contraire, et peut-être plus encore. Mac Demarco fait partie, aux côtés de Conan Mockasin, de cette génération d’artistes ayant su se réapropier les codes d’un genre rongé jusqu’à la moelle, pour en extraire le meilleur et en perpétuer l’histoire. Pop isn’t dead, folk either. Très honnêtement, on aurait dû mal à dire ce qui fait recette, mais force est d’admettre que ça marche, et c’est peut-être aussi bien comme ça. Quelques gimmicks bien sentis et des compositions élégantes. Un sens inné du raffinement dans la simplicité. La volonté quasi religieuse de ne jamais rien prendre au sérieux. Un cocktail d’autodérision et de bon goût – quelques notes dispersées à la légère, pour le fun et toujours avant tout pour le fun, parce que sinon « fuck that, what’s the point of doing it in the first place?« .

Pourtant, il y a fort à parier que ce troisième album marque la fin d’une époque pour DeMarco. Après avoir conquis le public et la critique avec la fraîcheur de 2, et répété l’exploit avec Salad Days, il est peu probable que le jeune compositeur puisse tirer sur la corde encore longtemps. La jeunesse est magnifique seulement voilà, en musique comme ailleurs, elle ne dure pas. Et l’insolence naïve des premiers temps ne suffira pas à bâtir l’intégralité d’une carrière sans s’embourber dans l’écueil du ridicule. Mais tout laisse penser que DeMarco l’a compris. Dans trois morceaux déjà, Passing Out Pieces, Chamber of Reflection et Jonny’s Odyssey, les compositions s’enrichissent de nouveaux instruments et de nouvelles tonalités. Le son graisseux des guitares lo-fi machouillées par les effets laissent place à des synthétiseurs qui, sans troquer l’esprit DeMarco, augmentent considérablement l’intérêt l’album. Voilà qui présage le meilleur pour l’avenir. On a hâte de voir la suite.

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