Notre critique de « GodZilla »

Par Evilredfielduniverse

Par RenoZeCut, 

Après une première bande-annonce qui avait l’intelligence de nous en montrer peu,  Godzilla s’est imposé comme un des films les plus attendus de cette année 2014. Aux commandes, un presque inconnu, Gareth Edwards, dont le premier film, Monsters, avait déjà fait parlé par son point de vue original et son intelligence dans la mise en scène.

Synopsis :
Le physicien nucléaire Joseph Brody enquête sur de mystérieux phénomènes qui ont lieu au Japon, quinze ans après un incident qui a irradié la région de Tokyo et déchiré sa propre famille. Refusant de s’en tenir à la version officielle qui évoque un tremblement de terre, le scientifique revient sur les lieux du drame accompagné par son fils Ford, soldat dans la Navy1. Ils découvrent que les incidents ne sont pas liés à une catastrophe naturelle, mais à des monstres réveillés par des essais nucléaires dans le Pacifique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale

A l’inverse de Pacific Rim auquel il est impossible de ne pas faire référence, tant les leurs ont pour origine les monstres japonais (les kaiju), Godzilla ne fait pas dans la débauche visuelle ni dans la destruction gratuite de toute la ville. Edwards rend ici un hommage clair à Spielberg : que ce soit par le plan d’ouverture sur l’hélico qui survole une île, qui n’est pas sans rappeler celle de Jurassic Park ou le nom de Brody aux héros du film qui n’est autre que celle de la famille des Dents de la mer.

Et le rapprochement avec les Dents de la mer (et Spielberg) ne s’arrête pas là puisque tout comme l’attente du requin géant qu’on ne voit jamais, Edwards nous fait languir, il nous fait attendre. Certes frustrant parce qu’on en voudrait plus, il installe un climat d’incompréhension vécu par ses personnages principaux qui ne comprennent pas ce qu’il se passe. Nous sommes en retrait tout comme eux. Nous ne voyons que de leur hauteur. Nous voulons en voir plus, en savoir plus mais il faudra prendre son mal en patience. Avant Godzilla, on découvre un autre monstre, un MUTO (qui fait étrangement penser au ptérodactyle Rodan que rencontre Godzilla dans ses aventures originelles) qui a besoin de produits radioactifs pour se nourrir et vu la taille, quelques litres ne suffiront pas. C’est alors que Godzilla, tel un ancien combattant isolé, sort de sa cachette pour les rejoindre. Il sera d’abord plaques dorsales, écailles et queue. Il faudra attendre presqu’une heure pour le voir sortir des eaux et découvrir le Roi des Monstres dont le physique, décrié par beaucoup, est à mon sens un bel hommage au Godzilla de 1954 et sa création par Toshimitsu.

Il ne ressemble pas au lézard géant de la version d’Emmerich, il a quelque chose de pataud, des grosses cuisses, des petits bras, tout comme le premier (les plaquettes de chocolat en plus) mais il est terriblement efficace et destructeur. Cette référence à l’aspect des premiers Godzilla lui confère une humanité, qui nous dit qu’il n’est peut être pas là pour nous détruire mais bien pour nous aider ou plutôt nous sauver. Comme le dira le scientifique Serizawa, interprété par Ken Watanabe, autre hommage au premier film puisque c’est aussi le nom du scientifique, Godzilla est là pour rétablir l’équilibre, élément naturel dans un monde de plus en plus dénaturé par l’homme. Car le message est bien présent : l’homme déconne avec la Nature, mais la Nature reprendra toujours le dessus, et la Nature ici, c’est Godzilla.

Loin de s’offrir le meilleur scénario (derrière lequel on retrouve entre autres l’irrégulier David S. Goyer mais aussi Franck Darabont), le film reste relativement linéaire dans son traitement et ses personnages. On retrouve le militaire qui tente de rejoindre sa famille tout en étant le seul atout pouvant défoncer tous ces monstres, interprété par Aaron Taylor Johnson, qui ne s’en sort pas trop mal dans ce personnage plein de colère et de bonté, points communs avec Godzilla, avec qui il partagera une scène de face à face magnifique.

Elizabeth Olsen, vraie rescapée du clan Olsen, joue la gentille infirmière qui s’inquiète pour son mari et avec qui on partage l’un des passages les plus frustrants du film où l’on entrevoit le début d’un combat entre Godzilla et les MUTO tandis qu’elle se réfugie dans les tunnels du métro et où les portes se referment derrière elle.

Bryan Cranston n’est malheureusement pas assez présent mais est toujours aussi bon. On l’aime ce Bryan !! Je ne parlerai pas de Binoche qui doit faire environ 2mn30 en tout.

Les autres personnages ne sont là que pour donner une certaine profondeur à un scénario malheureusement pauvret qui aurait peut-être dû s’intéresser un peu plus aux deux scientifiques campés par Watanabe et Sally Hawkins, sœur ratée de Cate Blanchett dans Blue Jasmine.

En revanche, je dis bien en revanche, les trentes dernières minutes sont un chef d’œuvre à elles seules. Sans jamais tomber dans la débauche visuelle, Edwards nous livre un combat de titans entre Godzilla et ses deux adversaires. Lorsque les parachutistes s’apprêtent à sauter de l’avion, comme dans la bande-annonce, ces voix inquiétantes qui se font entendre, on comprend qu’on va avoir droit à quelque chose d’énorme, quelque chose qu’on attend depuis le début avec impatience, mais qui valait le coup.

Tout commence, on s’accroche au siège et on déguste plan par plan ce bon plat. Dès que les soldats ont traversé les nuages teintés du rouge de leurs fusées éclairantes, on découvre un Godzilla plus gigantesque qu’il ne paraissait, une force de la nature, indestructible, magnifique. Sans tomber dans la facilité, sans garnir de plans de la ville détruite, on assiste à un combat titanesque, qui prend place dans la ville qui parait si petite, qui nous rappelle que nous ne sommes jamais que des grains de sable face à cette nature que nous tentons de dominer sans cesse et en vain.

Godzilla est beau, il est grand et atteint son apogée (rien que de l’écrire me donne des frissons) lorsqu’il crache son fameux souffle radioactif, symbole de sa toute puissance. Edwards prend soin de ne pas en faire trop et de soigner la mise en scène pour qu’elle soit la plus lisible possible. La caméra prend de la hauteur et on découvre une ville immensément petite face à ces colosses redoutables.

Campé par une des meilleures orchestrations du prodigue Alexandre Desplat et un mixage sonore qui donne aux monstres ces sons si particuliers, Godzilla version 2014 rend à la fois un vibrant hommage à ce pan de la culture japonaise et à un cinéma de science-fiction américain fasciné par l’envahisseur.

Conclusion : A défaut de remplir toutes les attentes (du moins les miennes), il a au moins le mérite d’effacer l’infâme bouse que nous avait pondue Emmerich en 1998 et a donné un second souffle à une franchise épuisée jusqu’à la moelle (celui-ci est le 30ème film, 60 ans après la sortie). Un pari donc plutôt réussi pour un reboot plus que prometteur.