Avoir une boutique dans un lieu de commémoration : une voie périlleuse ?

Publié le 06 juin 2014 par Aude Mathey @Culturecomblog

Entre besoin de développer ses revenus et nécessité de respecter la sensibilité de sa clientèle (et le bon goût), la création d’une boutique dans un lieu de commémoration (Maison Anne Frank, musée 9/11, Dallas Holocaust Museum, musée d’Auschwitz-Birknau, etc.) peut parfois se révéler périlleuse.

Cet article rebondit sur la controverse récente avec l’ouverture de la boutique de souvenirs (oui, vous avez bien lu) du musée 9/11, le musée qui commémore les décès et les actions des sauveteurs lors des attentas du 11 septembre 2001. Quelques produits vendus au départ à la boutique pouvait faire montre d’un certain manque de goût douteux, surtout quand on sait à quel point ces attentats restent vivaces au sein de la population américaine. Quelques petits exemples de cadeaux-souvenirs :

Le mug 9 septembre
Le chien de sauvetage en peluche
Le T-shirt : « In Darkness we shine »

Livre « Place of Remembrance »
Porte-clefs « In Darkness we shine »
Vue du musée crédit : Sue Edelman


Il faut comprendre que ces « cadeaux » (car oui il y a une boutique « Gifts » sur le site de la boutique du musée) sont très étatsuniens et sont là pour mettre en avant les notions de patriotisme, honneur, respect, etc. Et bien sûr, s’il est possible d’en tirer des revenus, alors tout est bon.

Le cadeau qui a particulièrement choqué est ce plateau à fromage avec 3 petits trous en forme de coeur où se sont crashés les avions, avec le lequel le musée souhaitait faire en sorte que les visiteurs gardent un souvenir vivace (« tasteful ») du 11 septembre.

Plateau à fromage, crédit : Scott Lynch / Gothamist

Il semblerait qu’avec ce produit le musée ait touché le fond. Il l’a d’ailleurs retiré de la vente.

Emporter un morceau de l’histoire avec soi ?

Selon une interview à Fast Company des conservateurs du Holocaust Memorial Museum à Washington D.C. et celui dédié à l’assassinat du Président J.F. Kennedy, les produits-souvenirs de la boutique donnent la possibilité aux visiteurs d’emporter avec eux un morceau d’histoire ou d’espoir. Il semblerait cependant vu les réactions du public à la boutique du musée 9/11 que ce ne soit pas vraiment ce qu’il souhaite. Et selon mon humble avis, ce n’est pas un plateau à fromage, ou une gourde ou un porte-clefs qui vous donne soit de l’espoir soit de posséder quelque chose en lien avec l’histoire de votre propre pays.

D’ailleurs le Dallas Holocaust Museum, tout comme la maison d’Anne Frank à Amsterdam ou encore le musée d’Auschwitz-Birkenau ne s’y sont pas trompés. La « boutique » du musée est bien plus une librairie qu’autre chose. Elle permet de poursuivre l éducation et la sensibilisation par des livres, bien entendu, traitant du sujet de l’holocauste, la seconde guerre mondiale ou des camps de concentration. On y trouve des cartes postales ou quelques photos officielles, mais certainement pas de porte-clefs ou de plateau à fromage ou encore de tasse avec la photo d’Anne Frank.

Cependant, chose intéressante à noter, le fond de la boutique du musée 9/11 n’est pas vraiment différent des cadeaux-souvenirs autour du 11 septembre depuis 13 ans, si ce n’est que le musée a ouvert récemment. Alors, le public serait-ils devenu subitement prude ?